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Sarkozy entame sa tournée des voeux

Publié le 03 janvier 2011 par Juan
Sarkozy entame sa tournée des voeuxA chaque nouvelle année, on se souhaite de bons voeux. On prend de belles résolutions.
Nicolas Sarkozy a entamé sa tournée des voeux dès le premier de l'an. En fin de matinée, avant d'aller déjeuner dans un restaurant chic pas très loin de l'Elysée, il a voulu rendre hommage aux fonctionnaires d'astreinte pendant la nuit de la Saint-Sylvestre. A quelques-uns d'entre eux, il répéta qu'il saluait leurs efforts, qu'il comprenait leurs demandes, mais que la rigueur, pour eux, est nécessaire s'ils voulaient éviter de tomber dans la situation grecque.
Sarkozy est toujours président, il parle toujours de micro-sujets (la neige à Paris), alors que tous les traditionnels récapitulatifs d'actualité de l'année précédente rappelaient combien les Français s'inquiétaient de leur précarité. On ressasse déjà les éléments de langage élyséens sur cette nouvelle présidence française, celle des G20 et G8 alors qu'on mesure déjà l'écart entre discours et réalité sur un sujet aussi emblématique que l'apprentissage.
Bienvenue en 2011, rien n'a changé.
Le Monarque, la neige et la rigueur
Samedi 1er janvier, Nicolas Sarkozy a reçu un échantillon de fonctionnaires d'astreinte le soir de la Saint-Sylvestre en région parisienne. « Le chef de l'Etat souhaite ainsi rendre hommage aux hommes et aux femmes, de tous statuts (civils et militaires, magistrats, fonctionnaires ou salariés de droit privé, bénévoles agissant dans un cadre associatif) qui, dans toute la France, permettent la continuité des services indispensables à la population et assurent la sécurité du réveillon de la Saint-Sylvestre.» Silencieux sur les préoccupations principales du pays, Sarkozy, ce samedi, eut quelques mots à propos des difficultés de transports pendant les récents « épisodes neigeux » de ces dernières semaines.
« Chaque année, depuis 4 ans, je tiens à rendre hommage à celles et ceux qui assurent pendant la nuit du 31 décembre la continuité de la vie nationale et plus particulièrement la vie des services publics.» commença-t-il. Pour déplorer ensuite : « L'hiver qui est arrivé précocement sur le pays a mis à rude épreuve les services publics, contraints de faire face à des conditions climatique exceptionnelles, or dès que nous sommes confrontés à de telles situations, nos moyens d'action, nos modes d'organisation sont remis en question. » Quel scandale ! Mais que fait la police ?! Lisant ses notes pendant quasiment toute son intervention, il n'évita pas l'indignation facile : « La situation de désorganisation que nous avons ponctuellement pu connaître ces dernières semaines n'est pas acceptable ». Il loua pourtant les équipes d'EDF, de la police, et même les cheminots de la SNCF, avant de transiter rapidement sur l'insécurité :  « La SNCF et RFF sont confrontées à une recrudescence de vols de cuivre sur le réseau. » Pire : « cette année, nous avons eu à déplorer, et à regretter, la mort de 5 policiers et de 12 gendarmes dans le cadre de leur activité... Quand même... En 2010... Dans un pays civilisé. Et j'ajoute que 12000 policiers et gendarmes ont été blessés. » (13 000 en réalité).
Sarkozy continua sur sa lancée. «  L'année 2010 a été marquée par la mise en oeuvre du rapprochement de la police et de la gendarmerie sous le commandement unique du ministre de l'intérieur. En île de France, ce fut l'année de la mise en place de la police d'agglomération (...). Dans les mois qui viennent, nous iront plus loin, en réformant les structures territoriales afin de renforcer encore la présence sur la voie publique et les tâches d'investigation.» Il faut faire croire qu'on se préoccupe du sujet.  
« Cette année encore, pour la huitième année consécutive, la délinquance générale a reculé de près de 3%. (...) Les violences physiques continuent de progresser ». Quel aveu ! «... même si c'est dans des proportions cinq fois moindre qu'il y a quelques années » s'empresse-t-il d'ajouter. Vraiment ? Son échec en matière de lutte contre l'insécurité est pourtant devenu un constat partagé. Ces violences se chiffraient à 228.000 actes en 1996, 381.000 en 2002 (+67%), 433.000 en 2007 (+14%). En 2010, elles dépassaient les 460 000 (+22% depuis 2002). Mais rapportés au nombre d'habitants, le nombre de violences physiques crapuleuses est passé de 1,8 pour 1000 habitants en 1997 à 2,5 en 2001 (+38% en 5 ans), puis à 3,4 en 2006 (+52% versus 2001) et encore 3,8 en 2009.
Avant de conclure, Sarkozy reprend un registre désormais habituel : « je connais la difficulté de vos métiers », commente-il, en faisant allusion aux demandes de moyens supplémentaires. « Mais je vous demande de comprendre que ma responsabilité de président de la République, c'est de garantir aux Français un avenir indépendant avec une protection sociale préservée. » Cette ode à l'indépendance, pour justifier la rigueur, est le nouveau phrasé sarkozyen de cette nouvelle année. Sarkozy l'avait testé, quasiment mot pour mot, devant une dizaine d'infirmières juste avant les fêtes. Gageons qu'il nous le ressortira à chaque voeux dans les semaines à venir.
Vers 13h45 le même jour, Carla et Nicolas se sont montrés ensuite dans les rues sécurisées du 8ème arrondissement de Paris pour aller déjeuner. « le chef de l’Etat se rassure en constatant la "gentillesse" des passants qu’il croise.» commente le JDD. Pourquoi n'est-il pas allé déjeuner à la Comète chez l'autre Nicolas ? Vendredi soir, onze millions de Français auraient regardé sa prestation télévisée. En fait, ce score est très médiocre. Diffusé à 20h en ouverture des journaux télévisés, le président français pouvait compter sur une quinzaine de millions de Français, soit l'audience cumulée habituelle des JT de TF1 et France 2 réunis. Pour l'heure, on décrypte, avec l'aide des conseillers élyséens, les intentions du Monarque pour les semaines à venir : il va continuer ses tables rondes « hors sol », rarement commentées, jamais dans l'actualité, toujours électoralistes. Leur coût sera-t-il imputé sur les comptes de campagne du futur candidat ? On souligne que ses voeux ont couvert un large spectre politique : un peu d'euro pour les centristes europhiles, un peu de laïcité pour les radicaux de Borloo et contre l'offensive frontiste de Marine Le Pen ; de la fermeté, évidemment, sur la sécurité. Un soupçon de nostalgie 2007 pour les électeurs déçus (heures sup' et réformes). Dès le 1er janvier, le story-telling a repris.
Brice Hortefeux avait pris soin de prévenir. Il ne communiquera pas le nombre de voitures incendiées dans la nuit du 31 décembre. Nous eûmes droit à une autre statistique : 501 personnes ont été interpelées. Un chiffre en hausse par rapport aux deux précédentes Saint-Sylvestre (405 personnes avaient été interpellées en 2010 et 288 en 2009). La nuit ne fut « pas si tranquille », notait le Figaro.
L'apprentissage, fausse promesse
Pour 2011, Sarkozy veut « mettre le paquet sur l'apprentissage ». C'est le Figaro.fr qui nous le confirme, dimanche soir. Pourtant, il a fallu attendre ce 1er janvier pour obtenir confirmation que le même Nicolas Sarkozy avait décidé de supprimer l'essentiel des dispositifs de soutien à l'apprentissage. Le motif que ces derniers avaient mis en oeuvre à cause de la crise dont nous serions tous sortis. Au 1er décembre 2008, 412 000 jeunes étaient sous contrats de travail en alternance, dont 253 000 en apprentissage et 159 000 en contrat de « professionnalisation. » Sept mois plus tard, le gouvernement décidait de trois aides : 1 800 euros pour toute embauche d'un apprenti dans les entreprises de moins de 10 salariés, exonération totale de charges pour tout apprenti embauché dans une entreprise de plus de 10 salariés, et primes de 1000 à 2000 euros pour l'embauche d'un jeune en contrat de professionnalisation. Le 1er décembre 2009, on comptait 373 000 jeunes en alternance, soit une baisse de 20% des contrats de professionnalisations de moins, et de 3% pour le nombre d'apprenti. Un vrai paradoxe !  Pire, un an plus tard, au 1er décembre 2010, leur nombre avait à peine augmenté : 130 000 professionnalisations et 256 000 apprentis, soit 377 000 jeunes en alternance, un niveau toujours inférieur de 8% à celui d'avant la crise... Et ce n'est pas tout : pour 2011, le gouvernement a décidé de supprimer les trois dispositifs sus-nommés. « Nous sommes maintenant dans un contexte de sortie de crise, donc il nous faut adapter nos réponses d'accompagnement des entreprises» a justifié Nadine Morano, la nouvelle ministre de la formation professionnelle depuis le remaniement de novembre dernier, le 15 décembre dernier.
L'apprentissage devait être l'une des rares causes nationales retenus par le pré-candidat Sarkozy pour 2011. Xavier Bertrand, son ministre de tutelle, nous avait promis, comme son patron élyséen, le passage rapide de 600 000 jeunes en alternance aujourd'hui à 800 000 en 2015... « voire un million dans un avenir assez proche », avait même rappelé Nadine Morano lors d'une visite à Berlin le 14 décembre dernier.
Que faut-il retenir de ces belles déclarations ? Qu'elles sont vaines, pour amuser la galerie politique, et endormir l'électeur.
Le G20, story telling international
Les mêmes journalistes qui s'amusent des histoires sarkozyennes ont affiché peu de recul sur la présidence française des G20 et G8. Que diable ! Faut-il qu'ils soient amnésiques ? Arnaud Leparmentier, pour le Monde, expliquait vendredi que « Nicolas Sarkozy s'est fixé des objectifs considérables pour la double présidence française de 2011 », détaillant ensuite, citation d'Hubert Védrine, ancien ministre socialiste des affaires étrangères, à l'appui, combien « ce que l'équipe française a préparé est assez astucieux.» Des rencontres délocalisées, un périmètre de discussions quasiment sans limite (réforme du système monétaire et des marchés de matières premières, gouvernance mondiale, débat sur Internet, trafics de drogue et corruption).
Pourrait-on rappeler aux Français que les deux précédentes expériences internationales de Nicolas Sarkozy, la présidence française de l'Union européenne puis le sommet de Copenhague sur le climat furent des échecs retentissants ? Pendant la première, Sarkozy a suivi ses collègues Brown (qui a imposé le soutien au crédit intra-bancaire) et Merkel (qui a lancé un plan de relance plus tôt que les autres). Pour la seconde, Sarkozy s'est révélé incapable de convaincre Obama comme Hu Jintao, malgré ses grandes déclarations.
Quelque soit le sujet, l'année 2011 commence donc comme prévu. Comme si rien n'avait changé.
Ami sarkozyste, où es-tu ?


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