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Derrière les étiquettes, la réalité sociale !

Publié le 04 janvier 2011 par Ruminances

Posté par Rémi Begouen le 4 janvier 2011

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‘Communisme’ et ‘Anarchisme’ sont depuis bien des lustres de grandes étiquettes, qui masquent, ou déforment la complexité, mais surtout la richesse créatrice des luttes sociales foisonnantes, parfois radicales.

Moi qui me réclame de ces deux étiquettes ‘idéologiques’ (souvent farouches ennemies, notamment pendant la Guerre d’Espagne, salaud de Staline !), cette réflexion me vient – entre autres ! – de la lecture approfondie de ‘Argentine rebelle’, dont j’ai fait un article publié le 26 décembre… alors que je n’avais encore que ‘survolé’ l’ouvrage (sans en trahir l’esprit, cependant, comme le font tant de ‘savants critiques littéraires’ dans leurs papiers…)

Elle me vient aussi d’un énigmatique, joyeux et fougueux camarade, militant de l’OCL (Organisation Communiste Libertaire), ‘étiquette’ qui me séduisait au point que je lui ai demandé – bêtement ! – d’adhérer à l’OCL. Il m’a expliqué en substance qu’il ne s’agit pas d’un Parti, mais tout simplement d’un réseau d’amis, dont le seul but est d’être à l’écoute et au conseil informel d’activités sociales créatrices, aussi bien en France qu’ailleurs (en Palestine notamment). Et il ajoute, souriant : ‘tu es un agitateur social efficace, à ta façon… continue ainsi, c’est ta place !’

Anarchisme, Communisme : ces deux concepts (du XIX° siècle), sont un sujet si vaste que je ne vais pas me lancer dans le détail : bien des penseurs (du XX° siècle) l’ont fait avec éloquence en France, comme Alain Badiou, Daniel Bensaïd, ou Guy Debord, par exemple. Je me contenterai d’évoquer quelques émotions nées de ma lecture de ce beau livre, si vivant, sur les luttes récentes en Argentine. Par rapport aussi à la Palestine, dont je partage la cause depuis… plus de soixante ans ! (je pourrais aussi évoquer ma longue expérience des luttes sociales en France, mais cela ferait au moins tout un article !).

La première chose qui saute aux yeux est que la ‘crise argentine’ des années 1990 est beaucoup, mais vraiment beaucoup plus grave que celle actuelle en France : à défaut de lire l’ouvrage, la simple lecture de la table des matières (citée dans l’article du 26 décembre) évoque sobrement cette gravité. A savoir : tous les partis politiques (dont leur péronisme ‘mouvant’, un peu comparable à notre gaullisme ‘mouvant’) sont dépassés un jour par l’ampleur de ces catastrophes sociales, ainsi que les syndicats, l’Eglise, etc. …

Ce n’est que peu à peu, après bien des péripéties (restées minoritaires) d’auto-organisation de tant de citoyens jetés dans la misère, que réapparaissent diverses organisations plus anciennes, trotskystes, maoïstes et même ‘communistes orthodoxes’ ou ‘péronistes dissidents’ (du genre d’ex-Tupamaros, ces guérilleros se réclamant de Peron !) … Mais trop tard pour elles : sous leurs différentes formes, les mouvements sociaux restent largement autonomes, libertaires et égalitaires d’esprit. Sans d’ailleurs avoir besoin de se référer ni à l’idéologie anarchiste (largement ignorée) ni au concept de ‘Décroissance’ (encore inconnu), souvent appliqué dans les faits. Par ‘les gens’, les voisins, le quartier, etc., par tous ces gens qui n’avaient pour la plupart jamais milité. Et, ainsi, la minorité des militants politiques ‘organisés’ qui les rejoignent se dévouent en général très humblement aux divers comités autonomes, multiformes, y compris un prêtre qui se défroque ‘pour la cause’

Si jamais, ici, les crises devaient atteindre ne serait-ce que le quart de la moitié de ce qu’ont vécu les Argentins, nous inventerions d’autres luttes bien sûr. Car il est sûr que notre inventivité existe, latente. Sûr que cet exemple d’un pays soudain ‘ex-riche’ (ce que devenait l’Argentine depuis le XIX° siècle) est à connaître par le peuple français… un peu comme ces Argentins qui s’inspirèrent parfois de l’inventivité populaire de la Commune de Paris, dans une situation alors si aiguë de crise !

D’ailleurs le ‘message’ de la Commune de Paris, malgré tant d’imperfections et son échec tragique, a résonné partout, via Karl Marx d’abord, mais aussi Bakounine… et dans la Résistance Palestinienne !

C’est dire que nous, ici, n’avons pas à rougir de notre ‘peuple de veaux’, ce que nous serine les cliques politiciennes, mais à rester vigilants et attentifs, partout, dans le moindre quartier, la moindre usine… et dans bien des mouvements courageux comme le DAL, le GISTI, ATD Quart-Monde, etc.

Aujourd’hui, l’Argentine semble bien (bien mal) récupérée par les cliques politiciennes locales, après renflouement par l’infâme FMI, qui a imposé au peuple argentin son diktat… Derrière cette apparence, le présent y est très fragile, et l’expérience populaire y reste immense… : l’avenir est ouvert !

Aujourd’hui, pire que jamais, le peuple palestinien est sous le diktat de l’occupant israélien et de ses immenses appuis internationaux. Mais, sous de multiples formes (dont récemment ‘les anars de Gaza’ qu’évoquait récemment un article de Lediazec), la Résistance y est increvable, malgré que l’avenir soit encore si fermé : ce n’est pas Stéphane Hessel qui me contredira !

Bien entendu, on pourrait (et on devrait !) évoquer aussi le monde tout entier, pour comprendre mieux la diversité et la ténacité des luttes populaires, garder le moral et se préparer au pire. Car il s’agit toujours, sous une forme ou une autre de braves gens démunis face à des puissants, d’exploités face aux exploitants… (et la différence entre trop-riches et trop-pauvres devient hallucinante !).

Pour en rester au domaine francophone, version exotique, je rappelle les héroïques luttes de Kanaks dans leur ‘caillou’ et, plus proche, celles des travailleurs de Guadeloupe… En version hexagonale, après tant d’usines occupées, autogérées (Lip reste un modèle), après tant de rues un temps ‘libérées’ (Mai 68…), nos luttes contre la ‘contre-réforme des retraites’ nous réapprennent que – jamais ! – les organisations syndicales ou politiques du ‘haut du pavé’ ne gagneront contre notre inventivité, notre joie de vivre, libres et égaux ! – Le ‘Grenelle’ de 68 fut la grande trahison syndicale… et le mot ‘Grenelle’ est réutilisé pour continuer de ‘noyer le poisson’… toujours vivant : nous !

Les ‘Grandes Etiquettes’ sont parfois références utiles, mais pas toujours. La créativité sociale reste foisonnante, inépuisable… à en épuiser les Partis, du moins les plus voraces en ‘pouvoirs’. Le pouvoir est dans la rue, certes. Il est surtout dans la tête et le cœur de chacun et chacune. Je rappelle cette belle boutade du poète Mahmoud Darwish (ou de son ami Elias Sembar) : « Les Israéliens colonisent nos terres, nous colonisons leurs têtes »

Extrait du n°1129 de Politis (début décembre), je laisse le dernier mot à Paul Ariès (directeur du ‘Sarkophage’, rédacteur de ‘Décroissance’, et à qui j’ai consacré un article le 17 avril dernier) : « Les peuples d’Amérique latine combattent aujourd’hui au nom du ‘buen vivir’ (…) La ‘vie bonne’, le ‘bien-vivre’, le ‘sumak kawsay’, c’est avant tout le droit de chacun à une vie frugale, certes, mais sécurisée face au capitalisme qui insécurise. Ce combat (…) c’est le refus de la précarisation et du pouvoir par la peur (…) , c’est une façon de faire du neuf avec du vieux. »

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