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Hessel, oui mais...

Par Jujusete

« Je t’ai rapporté le livre dont tout le monde parle ! tu sais, celui que tout le monde lit ! »

Quan ça commence comme ça, on sent poindre le Marc Lévy à l’horizon. Voire pire… Les souvenirs de Sacha Distel, le journal caché de Pascal Servran… Le récit des souvenirs de lycée de Laurent Romejko.

Non (ouf !)

« Le mec qui dit qu’il faut se révolter ! »

Ah ! Hessel !


Je n’avais lu que quelques commentaires sur lui via twitter, l’oiseau Vogelsong n’avait pas encore pondu son premier œuf de l’année que l’on sent moins pondéré, plus vivant que d’habitude. Oui, ça, c’est pour que t’ailles cliquer sur le lien, champion.

Je m suis retrouvée sur les fesses en voyant ce petit livret. C’est ça le petit machin dont tout le monde parle ? qui fait tant de bruit ?

Puis j’ai lu.

Du positif

Je suis d’accord sur le début en particulier sur l’opposition augmentation de la production des richesses et discours des élites nous renvoyant au malaise économique, au « coût des mesures citoyennes » que l’Etat nous dit ne plus pouvoir assurer.

Idem pour poser le problème d’écart entre très riches et très pauvres. Même s’il n’y a rien de neuf, c’est dit, c’est posé là, devant toi, comme ne sait pas le faire la gauche traditionnelle, perdue dans ses tours, ses détours, ses querelles de personnes qu’il ne faut surtout pas froisser. Pendant que le monde continue de tourner.

Hessel ose enfoncer des portes. Oui, comme l’extrême gauche, vous allez me dire. La différence c’est qu’à l’extrême gauche, et je suis bien placée pour t’en parler, aucune proposition, aucune idée, ne vient pour remplacer ce système que l’on trouve si imparfait. 

Le système possession = égoïsme = peur y est aussi décrit de manière très simple. Ça aussi. Qu’il s’agissent des caméras qui fleurissent dans les rues commerçantes, des arrêtés anti-mendicité, des blocs d’immeubles sécurisés, etc. On en a déjà parlé à bloc dans le débat politique, dans les opinions dans les journaux, sur les blogs… là non plus, donc, rien de neuf. Là où j’aurais aimé qu’il creuse, c’est en poussant plus loin cette cogitation sur l’aspect sociétal. C’est précisément ce qu’il se passe actuellement en Egypte.

Une génération qui ne veut pas se révolter

Trois classes. Des archi pauvres, très nombreux, des archi riches et une clase moyenne mais moyenne sympa puisque tu as la possibilité d’écraser ton bawab, ta femme de ménage, etc… et de te la jouer « je suis supérieur, je ne prends pas le métro avec les pauvres ».

Et bien les riches, de ceux qui ont envie que l’Egypte change lorsqu’on discute avec eux, de ceux qui ont envie de se barrer aussi, parfois, des cultivés, et bien ils vont vous répondre qu’ils voteront Moubarak. Pas de changement donc. Et pourquoi ? Et bien parce que faire changer les choses, c’est tout remettre en question, y compris leurs privilèges.

Dans la classe moyenne, par contre, la jeunesse s’est bougée un six avril, la fronde a grandi via les réseaux sociaux, twitter et facebook. Ceux qui ont envie de faire changer les choses sont ceux qui n’ont rien à perdre.

En cela, Hessel se trompe

La jeunesse de France peut toucher le RSA au sortir de la fac, vit avec la sécu, la CAF. Génération zapette, consommation, on a du temps de cerveau libre pour du soda et au final, on n’est pas si malheureux parce que même lorsqu’on est censé ne rien avoir, on a.

Cette génération est molle, pourrie gâtée par des parents qui ont trimé toute leur vie pour leur offrir le peu de confort qu’ils ont. Il n’y a qu’à voir les réunions associatives, les mêmes personnes, souvent à la retraite, qui se bougent pour donner un peu de leur temps, de leur aide, un toit, etc. à d’autres dans le besoin.

Pourquoi cette génération remettrait-elle en question cette société ?

Ceux qui se bougent sont ceux qui n’ont rien à donner à manger à leurs gosses. Ceux qui se bougent sont ceux qui subissent l’oppression au quotidien. Ceux qui se bougent sont ceux qui tentent un dernier truc avant de crever. Pas se qui jouissent.

Cette génération est trop bien née pour être altruiste et pour remettre en question notre confort.

Changer les choses sans violence

Ce que je ne partage pas, c’est sa vision de la révolution sans violence. Ou alors il nous manque des clés. Aucun changement radical de société n’est arrivé sans violence. On ne sait pas où il veut en venir puisqu’il ne propose rien mis à part un pataquès institutionnel avec sa très chère ONU.

Je suis prête et je serais très heureuse d’épouser ses convictions sur la non violene mais mis à part la décroissance (engagement collectif dans des assoss, consommer moins et utiles pour changer le système, produire en local, etc.) je ne vois pas d’autre alternative non violence pour changer les choses.

L’avenir ?

C’est une vision tout à fait personnelle. Je pense qu’on va glisser vers une société des classes (qui existe déjà) avec des inégalités encore plus importantes que ce qu’elles ne sont déjà. Des possédant mieux traités que des sachants qui ne voteront que pour se protéger et des faibles qui n’iront plus voter. A quoi bon cautionner un système dans lequel on ne se reconnaît plus puisque les élus ne sont pas du tout représentatifs de la réalité ? non, nous ne sommes pas tous vieux, issus de grandes écoles et hétéros. A quoi bon aller voter pour que rien ne change ?

Alors on s’endormira, doucement. On laissera planer le doute sur nos enfants et nos petits enfants, eux, iront jeter des cocktails Molotov dans ces rues grises qui se ressembleront toutes.


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