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Je suis infirme de la glande gustative

Publié le 23 décembre 2007 par Monsieur L'Adulte
ici et . Sans assistance psychologique adéquate, je ne peux compter que sur soi-même. Et encore, pas beaucoup. Je sais que le combat est perdu d’avance, je céderai bientôt comme un rat fini, après moins d’une semaine d’abstinence ardue. À quoi bon prétendre quele choix m’appartient? C'estelle quime choisit, petit à petit. Je ne suis libre que de choisir ma servitude. Et encore, pas beaucoup.


Comme le désir estune fontaine de troubles etde calamités, onest souvent puni parona désiré. Je ne suis pas dupe et j’anticipe qu’éventuellement, avec la trentaine qui s’essuie les pieds sur mon paillasson avant de sonner, je deviendrai ventru grassouillet et devrai me mettre à la soupe aux choux. Et je n'ai pas la force de Zen-Abelle, tel un euphémisme gastrique je suis faible devant ma faiblesse. Mais dans pareil situation les regrets sont vains. On regrette toujours pour rien, étant donné qu'onne peut regretter qu'après. Je grossirai de remords, ceux-ci prenant toute la place tel d’immondes fruits vénéneux.


Manger des poutines est l’équivalence culinaire d’un mauvais one night. Ça débute avec l’appel obsessionnel du ventre, un besoin intrinsèque à combler; on en salive d’envie tel un monomaniaque. On est fébrile lorsque vient le temps de commander, pratiquant d’or et déjà un déni complet face aux conséquences des 15 minutes qui vont suivrent. Les premières bouchées goûtent le réconfort, le bonheur incarné en patate. Puis, peu a peu, bouchée après bouchée, l’envie s’atrophie, devient approximative et quasi-simulée : on devrait arrêter mais on avait si faim. Alors que notre assiette est à demi entamée on entrevoit maintenant l’aspect destructeur du projet. Mais on se force à continuer, même si on n’en veut plus vraiment, parce qu’on ne sait pas quand sera la prochaine fois. Et c’est à partir de là que ça goûte le remord inconfortable, que le bonheur devient douloureux. On fini ce pour quoi on est venu, on est soudainement mal a l’aise, avec l’estomac tordu et le cœur lourd, à moins que ce ne soit l’inverse. On quitte honteux l’endroit avec l'impression que tous les gens croisés savent ce que nous venons de faire. On se promet que la prochaine fois il y aura davantage de résistance, de raisonnement. Et encore, pas beaucoup. La poutine comme une baise manquée: belle, douce et chaude, mais pas faite pour soi.


Peut-être qu’une or
ganisation de Poutineux Anonyme, fondée sur les douze étapes et animée par le besoin de retrouver le contrôle sur mon estomac serait la solution à mon trouble de conscience. Admettre que je suis impuissant devant la poutine, que j’ai perdu la maîtrise de ma vie tout en procédant à un inventaire moral approfondi de mon appétit. Je me sentirais peut-être moins seul...

Je suis infirme de la glande gustative


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