Trop loin, le temps
où vêtu de bas de cachemirede pantalon court marineje courais partoutà la découvertede mon enfance.
Trop loin, le tempsoù portant béret foncéet cheveux en brossej'avais peurd'aller seul au sous-solsans crier maman continûment.
Trop loin, le tempsoù je jouais de la guitaresur une raquette de tennism'imaginant être Paul ou John,faussant sans pudeur couplets et refrainssur Hey Jude.
Trop loin, le tempsoù je découvrais la grande villecontestataire aux cheveux longsexcentrique le jour et froussard la nuitimpressionné par le bruit des bombes du FLQen cette année 1968.
Trop loin, le tempsoù je revenais chez moi,quand nous étions encore sixà rire, à se taquinerà raconter nos histoires, parler de nos viessans remords ni angoisse.
Trop loin, le tempsoù la mort m'a volémes amours, mes amis, mes collèguessans pitié, sans excuses,me laissant sur ces îles si désertesque sont le deuil et le doute.
Trop loin, le tempsoù tous étaient là,amours et amis,quand la maladie et la mortn'étaient que chimères utopiques,qui n’arrivaient qu’aux autres.
Si loin ce temps...