Tunisie: “Le 17 décembre Mohamed Bouazizi, un diplômé chômeur, s’immole par le feu à Sidi Bouzid. Il décédera le 5 janvier”. M. Bouazizi était excédé par les tracasseries policières l’empêchant de vendre ses fruits et légumes sans autorisation…
Et c’est de là que tout est parti, mobilisant une population ne supportant plus l’arbitraire policier, la peur, la corruption et la main-mise du clan Trabelsi (l’épouse de l’ex Président Ben Ali) sur la quasi-totalité de l’économie, les dépêches diplomatiques US parlant même de quasi-mafia. Et ce malgré l’aide policière généreuse que proposait Mme Alliot-Marie, notre Ministre des Affaires Etrangères, au dictateur (avec les Besson, Hortefeux et celle-là, ce gouvernement donne un bel exemple au monde…).
1- Ce qui est frappant, dans les manifestations qui ont abouti au départ de Ben Ali, c’est la quasi absence des “barbus” et autres femmes voilées, l’absence de drapeaux verts. Reconnaissons au moins au dictateur d’avoir convenablement liquidé les islamistes (autres totalitaires) au début des années 90. Il n’y a donc, à mon avis, rien à craindre, pour au moins quelques années, de ce côté là.
2- Il semble que c’est l’armée (cf Rue 89) qui, pour des raisons que j’ignore (vraisemblement liée à la main-mise du clan Trabelsi sur l’économie), a provoqué le départ de l’ex-Président et l’on peut s’attendre maintenant à un bras de fer discret entre elle et les dirigeants du parti de l’ex-Président, le RCD (1 million de membres) soutenus par la police et les forces spéciales, omni-présentes à Tunis. L’armée devra maintenant nettoyer le pays des milices et de la garde présidentielle fidèles à Ben Ali.
3- C’est l’entourage de Ben Ali qui a pris le pouvoir actuellement et qui va vouloir organiser des élections législatives aussi pourries que les précédentes (avec la Constitution actuelle, tout candidat doit être parrainé par au moins 30 députés sortants, c’est à dire du RCD), avec le soutien du gouvernement Sarkozy (qui a “pris acte” des changements survenus) et de nombreux autres pays occidentaux afin que le changement soit simplement cosmétique.
4- La tâche principale actuellement est d’éviter les pillages, vraisemblablement en grande partie manipulés par le RCD (cf. NouvelObs ), et autres excès tout en permettant que se reconstituent les partis politiques d’opposition (dont tous les dirigeants sont tous en exil) afin qu’une Constituante soit démocratiquement élue préalablement à de nouvelles législatives. Il ne peut donc y avoir d’élections législatives propres et libres d’ici 2 mois. Peut-on faire confiance à l’équipe en place pour cela ?
5- Il sera intéressant de voir, dans les semaines et mois qui viennent, les retombées de cette révolution tunisienne sur l’Algérie et, dans une moindre mesure, le Maroc et l’Egypte. Voir Le Monde sur ce thème.
6- Cette chute de Ben Ali constitue un important revers pour N. Sarkozy et le gang du Fouquet’s, en affaire depuis longtemps avec le clan Trabelsi. Cela s’est senti tout au long du processus qui a abouti à la fuite du dictateur.
7- La crise économique engendrée par la crise financière constitue le contexte, fumier fertilisant, de ces évènements. Les effets de cette crise n’en sont qu’à leurs début et on verra vraisemblablement, dans les années qui viennent, de nombreux autres épisodes du même type chassant, démocratiquement ou non, les ploutocraties en place, installées par la force ou par le Spectacle.
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