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L'invention de la France

Publié le 18 janvier 2011 par Egea

Je suis en train de parcourir "l'invention de la France", de Hervé Le Bras et Emmanuel Todd : l'analyse anthropologique appliquée au cas français, dans un essai novateur de 1981, qui a suscité la curiosité mais, finalement, n'a pas eu trop de suites. Et pourtant !

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Je n'en ferai pas une fiche de lecture complète, mais veux juste vous donner quelques extraits particulièrement significatifs.

"La révolution coupe la France en deux. L'analyse des rapports entre parents et enfants, entre hommes et femmes, produit une pulvérisation absolue de l'ensemble national. La France ne contient pas un peuple mais cent, qui diffèrent par la conception de la vie et de la mort, par le système de parenté, par l'attitude face au travail ou à la violence. Du point de vue anthropologique, la France ne devrait pas exister". (76)

"Seuls les États-Unis d'Amérique peuvent être considérés comme un cousin de la France, du point de vue de la diversité anthropologique comme de l'unité nationale. Mais ils avaient l'avantage ... de l'existence d'un noyau anglo-saxon homogène". (...). La France, elle n'a été fondée par aucun peuple particulier. elle porte le nom d'un groupe germanique, parle une langue dérivée du latin, avec un fort accent gaulois nous disent les linguistes. Elle fut inventé par une communauté de peuples. Plus que toute autre nation au monde, elle est un défi vivant aux déterminismes ethniques et culturels"

"Mais les Francs et les Gallo-romains sont déjà, eux-mêmes, des peuples non-ethniques". (77)

"A vrai dire, il y a un mystère franc : les historiens des grandes invasions ne comprennent pas pourquoi ce peuple, inexistant au début de la poussée germanique contre l'Empire, l'emporte finalement sur les glorieuses tribus wisigothiques, burgondes, ou ostrogothiques. Le peuple franc, dans cette lutte pour l'hégémonie, est un outsider tardif. Les spécialistes de la période considèrent qu'il n'est pas, à proprement parler, un peuple, mais une multitude de petits groupes, réunis par une commune insignifiance" (77)

Et l'auteur cite L. Musset "D'où viennent-ils ? (...) depuis le XVII° siècle, quoiqu'il n'y ait aucun texte ancien en ce sens, la plupart des historiens ont admis que les Francs étaient issus du regroupement de diverses peuplades antérieurement connues sur le Rhin inférieur. Parmi les composantes probable de cette synthèse, il faut citer les Chamaves, les Bructères, les Amsivariens, les Chattuarii, les Chattes, sans doute les Sicambres, moins probalement les Tenctères, les Usipètes et les Tubantes, à la rigueur certains Bataves". (78)

"Cette hétérogénéité initiale explique peut-être la tolérance idéologique es Francs, qui fit leur succès. ... Ce que symbolise la conversion au catholicisme romain de Clovis, c'est l'acceptation du principe de l'assimilation" (quand les Wisigoths choisissent l'arianisme).

"Cette histoire sans commencement visible et identifiable na également pas de fin. La France reste aujourd'hui, quoiqu'on en dise, une terre d'accueil". Et plus loin : "parce qu'elle n'a pas d'être anthropologique défini, la France peut intégrer à peu près n'importe qui" (79)

Et pour vaincre l'anthropologie, "la France a dû lutter contre ses tendances centrifuges. Elle a dû fabriquer un État particulièrement centralisé. Elle a développé une passion de la langue, instrument d'unité et de communion nationale" (80) (on pense aujourd'hui au décès de Jean Dutour, parangon le plus récent de cette cause).

Fiche d lecture ici. O. Kempf


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