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194ème semaine de Sarkofrance : l'incompétence et les manipulations du candidat Sarkozy

Publié le 22 janvier 2011 par Juan
194ème semaine de Sarkofrance : l'incompétence et les manipulations du candidat SarkozyLes semaines de janvier se suivent et se ressemblent. Le candidat Sarkozy continue sa tournée préélectorale, ignorant l'actualité du moment. Il se force à jouer un rôle au point d'en devenir ennuyeux. En coulisses, ces combines sont rapidement dénoncées : manipulations sur les statistiques de la délinquance, réforme du statut des fonctionnaires, projets fiscaux ou contrôle de la justice, Sarkozy peine à masquer. Pire, à trop se concentrer sur sa réélection en 2012, le voici qui finit par commettre de jolies bourdes.
Incompétences diplomatiques
La plus grave et la plus symbolique fut l'affaire tunisienne. Huit jours après le départ précipité de l'autocrate Ben Ali, l'attitude de la France fait toujours polémique. Le débat sur le soutien passé à la dictature tunisienne, qui oppose les tenants de l'habituel pragmatisme diplomatique et de la défense des prétendus intérêts du pays à ceux portent l'exigence morale et démocratique, concerne le candidat Sarkozy sur un point bien précis : l'homme s'est notamment fait élire en 2007 sur de belles promesses en matière de droits de l'homme. On se souvient encore de son discours du 6 mai 2007 au soir où il s'engageait à placer les droits de l'homme au coeur de sa politique étrangère. Comme sur d'autres sujets, Sarkozy a menti. Dès l'été 2007, il s'accroupissait devant les pires régimes au service de causes multiples (vendre du nucléaire, débloquer la situation institutionnelle du Liban, etc).
La « révolution de jasmin » en Tunisie introduit deux autres dimensions à l'évaluation de l'action de Nicolas Sarkozy : diplomates et services de renseignement ont été aveugles jusqu'au bout. A la honte s'ajoute d'abord l'incompétence. L'aveuglement français fut étonnant. Toute la chaîne de responsabilités, depuis Nicolas Sarkozy jusqu'aux services de renseignement, s'est plantée. Plusieurs raisons ont été avancées : la nomination récente d'un nouvel ambassadeur à Tunis, la collusion renforcée depuis la présidence Chirac avec le pouvoir tunisien, l'absence de suivi des réseaux sociaux (nos services de renseignement négligèrent l'activisme terriblement efficace des opposants tunisiens sur Internet), et la doctrine officielle selon laquelle le danger islamiste excuse toutes les compromissions et doit focaliser toutes les attentions. Depuis 2006, Sarkozy nous promettait de rompre avec la pensée unique. En matière diplomatique, et dans l'affaire tunisienne en particulier, il s'est au contraire fondu dans un moule islamophobe rigide et paranoïaque hérité  de l'administration américaine des années Bush. Le plus cruel est que l'administration américaine n'est même plus sur cette longueur d'ondes. Alexis Treget, directeur du Figaro Magazine, voulait excuser l'attentisme français vendredi matin en dénonçant un coup de force du gouvernement américain à Tunis qui, selon lui, aurait exigé du général Rachid Ammar, le chef de l'armée, qu'il se débarrasse de Ben Ali.
Le second drame de l'affaire tunisienne est l'affaiblissement de la France dans la région. Sa réputation est salie, son image dégradée durablement. En visite à Gaza, la ministre des affaires étrangères s'est faite chahutée. Il faut lire les commentaires de la presse maghrébine, soudainement véhémente, enfin affranchie. Le quotidien tunisien le Temps se demande si les Tunisiens pardonneront un jour à la France et ses dirigeants successifs leur silence complice. Un journaliste marocain dénonce l'attitude du « président français Nicolas Sarkozy » qui « a même déclaré en 2008 que la Tunisie vivait en démocratie.» L'heure des comptes a enfin sonné, mais tous les comptes ne sont pas encore connus. On a appris cette semaine que des douaniers français, sans aucune instruction officielle, avaient bloqué, de leur propre chef, une cargaison de matériel répressif commandé par le gouvernement Ben Ali. Le porte-parole du gouvernement a confirmé que cette interception avait été spontanée.
Vendredi, Oussama Ben Laden est venu au secours de Sarkozy. Le leader terroriste a menacé la France si elle ne retirait pas ses troupes d'Afghanistan. Après le fiasco de la prise des deux otages Français au Niger voici 15 jours, ce rappel que le danger islamiste est toujours présent arrivait à point nommé. Lundi, le candidat Sarkozy a eu l'indécence de se présenter aux funérailles des deux jeunes Français tués lors de l'intervention des forces spéciales françaises. La polémique fut rapidement occultée par la révolution tunisienne.
Manipulations médiatiques
En matière de lutte contre l'insécurité, les contorsions gouvernementales pour masquer son échec en deviennent amusantes. Jeudi soir, Brice Hortefeux s'est précipité au JT de TF1 pour dévoiler la primeur de quelques résultats parcellaires et imposer un « story-telling » officiel et positif dans l'opinion. Il avait même sorti un tableau illustrant la baisse de la délinquance générale depuis 2002, comme un représentant de commerce nous vantant la supériorité de ses derniers modèles. Le lendemain, une conférence de presse commune avec Alain Bauer, le président de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, un proche de Nicolas Sarkozy depuis ses années au ministère de l'intérieur qu'on nous vend depuis comme un expert indépendant, a complété l'exercice. Globalement, la délinquance mesurée aurait diminué. Mais, globalement toujours, les atteintes aux personnes progressent. Le ministre Hortefeux s'est abrité, jeudi soir sur TF1, derrière l'explosion des vols avec violence de smartphones dans les transports en communs des grandes villes. Fichtre ! Pour 2011, comme le note Julien Dray, Brice Hortefeux nous sortira l'excuse de l'iPad ! Vendredi, il ne voulait pas de polémique, malgré les discours de Grenoble et les surenchères sécuritaires de l'été dernier : « En 2011, je veux en appeler à l'union sacrée contre la délinquance et l'insécurité. » Union sacrée pour réélire Nicolas ? Les manipulations du ministre deviennent embarassantes. Il avance des chiffres invérifiables dans les statistiques officielles, comme sur les vols téléphones portables, la protection des personnes âgées ou la criminalité organisée. Ces manipulations ne sauraient cacher l'essentiel : les violences aux personnes ont dépassé les 467.000 l'an dernier, soit +14% en 5 ans. Les cambriolages de particuliers, les violences aux femmes, les viols, ou les violences intra-familiales sont en hausse. 
Campagne électorale
Nicolas Sarkozy, lui, a poursuivi sa campagne préélectorale. Cette semaine, le « monde de la connaissance et de la culture », c'est-à-dire les milieux éducatifs et culturels, eut droit à des voeux bâclés au Grand Palais à Paris. Sarkozy évoqua tout juste la réduction des effectifs enseignants (« la qualité plutôt que le nombre »), motif de manifestations ce weekend. Il se réfugia derrière des considérations anecdotiques sur la vente contestée de l'Hôtel de la Marine ou le Musée de l'Histoire, ou des généralités sans substance (l'Internet civilisé contre l'Internet régulé). Certains crurent comprendre qu'il avouait l'échec de sa réforme de la formation des professeurs débutants, désormais jetés dans leurs classes sans entraînement. Pour une fois, les syndicats enseignants avaient quasiment tous boycotté la manifestation.
La veille, Sarkozy s'était davantage appliqué pour le monde agricole. Il visitait une ferme traditionnelle alsacienne. Ça fleurait bon l'identité nationale. Il renifla du foin, caressa des vaches, goûta les produits du terroir, et termina par un interminable monologue, dans un hangar, devant 1500 spectateurs triés sur le volet. Sarkozy était devenu Chirac, ce « roi fainéant » qu'il adore brocarder. Il promit de poursuivre « une action structurelle pour revaloriser le revenu de nos agriculteurs ». L'an dernier, un accord entre producteurs et distributeurs dans la filière fruits et légumes et laitière fut signé. Il impose de contractualiser les relations commerciales. Le candidat promit aussi de défendre la  la Politique agricole commune (PAC), renégociable ...  après le scrutin présidentiel, et l'instauration d'un prix attractif de rachat de l'énergie produit par méthanisation, un engagement déjà ancien mais que le gouvernement tarde à mettre en pratique. Il eut même quelques mots écologiques : « N'opposons pas en France l'écologie et l'agriculture ». Le jour même, un décret autorisait les poids lourds de 40 à 44 tonnes. Et 15 jours avant, la filière bio découvrait que le gouvernement avait réduit par deux le crédit d'impôt bio. Quel écolo ! Trop préoccupé, sans doute fatigué, le candidat n'échappa au lapsus, l'un des plus beaux de cette nouvelle année, en confondant l'Alsace et ... l'Allemagne.
Jeudi, le candidat fut franchement ennuyeux devant des professionnels de la santé. Il évoqua bien le scandale du Mediator de son ami et ancien client Jacques Servier. Il répéta les propos de son ministre de la Santé. Xavier Bertrand, lundi, avait promis une réforme urgente de la pharmaco-vigilance. Et ne lui parlez pas de conflits d'intérêt. Pour le reste, il fit bien attention à ne pas voir la réalité du pays. La précarité d'un nombre croissant de ménages et son impact désastreux sur la santé, ou l'engorgement des hôpitaux publics, sont des sujets qui n'ont mérité aucun commentaire présidentiel. Entre 20 et 30 % des Français déclarent renoncer à des soins pour des raisons financières en dépit du système de protection sociale. Et les récentes mesures entrées en vigueur en 2011 n'arrangeront rien (hausse du tarif de la consultation chez les médecins généralistes et des tarifs de mutuelles, nouveaux déremboursements des médicaments à vignette bleue et orange, participation financière des malades en affection de longue durée). Le candidat Sarkozy nous bassine avec le coût de la dépendance, dont la progression semble inévitable avec le vieillissement de la population, mais il persiste, lors de ses voeux, à lier la progression des dépenses de santé à celle de la croissance économique. Quel rapport ? Sarkozy fit l'éloge de la rigueur, lui qui a plombé nos comptes, entre autres, d'un inutile Grand Emprunt, alors qu'il renonçait à réévaluer la répartition de l'effort fiscal. 
Vendredi, Sarkozy aurait justement pu s'attarder sur les propositions fiscales d'un trio de jeunes économistes, classés à gauche. Ô surprise ! Les trois auteurs rappelèrent, chiffres et calculette à l'appui, que plus on est riche, moins on paye proportionnellement de prélèvements obligatoires. Les 50% des Français les plus modestes sont taxés à 45%, alors que les 10% les plus riches ne sont taxés qu'à 35%. Quelle justice !  Leur idée, réduire l'impôt de quelque 97% des ménages français en fusionnant les impôts et cotisations applicables à tous les revenus (salaire, revenu d’activité non salarié, retraite, chômage, revenus du capital, y compris les plus values). Pas sûr, évidemment, que ces constats orientent la réforme fiscale promise pour le printemps prochain. Sarkozy veut simplement toiletter l'impôt du patrimoine et se débarrasser du boulet/bouclier fiscal. Son ministre de l'industrie, le fidèle Besson, s'est déclaré intéressé et satisfait par l'analyse de l'institut de conjoncture Coe-Rexecode pour « Mettre un terme à la divergence de compétitivité entre la France et l'Allemagne ». Sans surprise, ce dernier a reçu le soutien du Medef, qui le finance. Les conclusions de son rapport sont a priori sans appel : « La France est moins compétitive que l’Allemagne car le coût du travail y est plus élevé », et il faudrait « réduire d'urgence les charges que paient les entreprises, et compenser cette baisse des impôts par une réduction des dépenses publiques.» Pourtant, les failles méthodologiques sont nombreuses : sur l'année, les Français travaillent plus que les Allemands (1554 contre 1390 heures). Et outre-Rhin, l'assurance sociale est davantage financée par l'impôt que par des cotisations sur le travail.
Combines en coulisses
Vendredi 21 janvier, les syndicats ont découvert le projet de décret sur la prise en compte de la pénibilité dans les droits à retraite. En octobre dernier, Sarkozy avait concédé de relever le taux de handicap physique de 10 à 20% pour bénéficier d'un départ anticipé à 60 ans. A peine 30.000 personnes seraient concernées d'après le gouvernement. Mais c'était visiblement déjà trop. Le décret d'application de cette disposition prévoit que les candidats à une retraite anticipée devront également justifier de 17 années d'exposition à des conditions de travail pénibles. L'ignoble se cache dans ce genre de détails.
Le même jour, Nicolas Sarkozy déjeunait avec Jacques Chirac à l'hôtel Bristol, à deux pas du Palais de l'Elysée. Sarkozy aime bien le lieu. Il y reçoit les adhérents du Premier Cercle, les plus riches donateurs de l'UMP. L'ancien président doit passer devant le juge en mars. Le retrait de la plainte de la Mairie de Paris ne change pas grand chose. Officiellement, les deux hommes parlaient du prochain G20.
Le 13 janvier dernier, un député UMP, Jean-François Mancel, ancien mentor d'Eric Woerth dans l'Oise, a déposé un projet de loi révolutionnaire : il vise à réserver le statut de fonctionnaires aux seuls agents travaillant dans les domaines régaliens de l'Etat (justice, intérieur, défense, affaires étrangères). Pour les autres, le contrat de travail de droit commun deviendrait la règle. Rappelons que Mancel est fonctionnaire.
Un autre député, Jérôme Chartier, chargé par l’UMP de travailler à la « convergence fiscale franco-allemande », a suggéré d'exonérer d’ISF les contribuables au patrimoine inférieur à 4,4 millions d’euros. Dans son rapport au secrétaire général du parti sarkozyste, il suggère de taxer la vente de la résidence principale au-delà de 1,2 million d'euros de plus-values, et de réduire le taux de l'ISF de 1,3% actuellement à ... 0,5%. Quelle justice !
Eric Woerth, ancien trésorier de l'UMP, a confié, lucidement, son désarroi. Il a été lâché par Sarkozy et doit se débrouiller tout seul avec la justice. Le cordon sanitaire autour du Monarque s'est durci. Le parquet de Paris vient justement de classer sans suite la plainte du quotidien le Monde contre l'espionnage de l'un de ses journalistes, Gérard Davet, dans le cadre de l'affaire Woerth/Bettencourt.
Les élections cantonales approchent.
Ami sarkozyste, prépare-toi !


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