Doudou Kane, mon Denndi disparu par le Doyen

*A MON DENNDI par le Doyen

Il fut mon premier patron à la banque. Tout comme il fut de la première génération d’intellectuels qui ont contribué à construire les fondations de la Mauritanie naissante dont le cinquantenaire de l’indépendance vient d’être célébré.

Certes, c’est peu pour évoquer la carrière et les traits marquants de cet homme. Je m’en tiendrai aux deux anecdotes ci-dessous pour illustrer l’une, sa rigueur, l’autre, son extrême simplicité.

-Directeur de la compagnie de la navigation aérienne,  il lui est arrivé de refuser au moment du pèlerinage de retirer la réservation d’un passager  pour le remplacer par celle d’un membre de la famille présidentielle.. Fait non négligeable dans ces endroits où les passe-droits et les privilèges sont  monnaie courante.

Dans son cas, ce refus n’était point une façon de manifester une quelconque rébellion, mais il avait en lui une certaine forme de rigueur.

-Pour illustrer sa simplicité, voilà cette autre anecdote survenue quand des circonstances dramatiques  l’ont forcé à se retrouver dans un pays voisin où l’élégance est de mise. Se présentant dans une agence bancaire, il demanda à un cadre les conditions pour effectuer une certaine opération. Mais celle-ci  nécessitant une demande manuscrite, le cadre le jugeant à priori à partir de son habillement, le pria d’aller chercher quelqu’un pour lui rédiger la dite demande.

Sans dire un mot, il sollicita une feuille, puis rédigea lui-même, séance tenante, sa demande qu’il tendit au cadre qui resta béat et confondu.

*AU VIEIL HOMME par  Safi Ba

 Son  image dans cette maison la veille encore remplie de monde, et brutalement vidée le lendemain de toute sa famille déportée, expulsée, réfugiée à l’ONU, fut une de celles qui m’ont profondément traumatisée. Je  revois encore cet homme de deux mètres ployant  sous le poids de sa douleur et  de toutes les douleurs de chacun des membres de sa famille dont on venait de l’amputer…  Bien sûr aucune larme chez lui, et toutes les leurs en moi .

 Aujourd’hui, je  me demande encore si je lui avais envoyé le deuxième tome des Mémoires du Général De Gaulle comme je le lui avais promis.

Si je ne l’ai pas fait, j’aurai un regret., non pas  parce que les bénédictions si prisées venant d’une personne âgée m’auront échappée, mais plutôt parce que je risque d’avoir des démangeaisons sur ma conscience.

Yoo alla yurmo mo yaafoma

*Photo : (le ponte Faidherbe  à Saint Louis du Sénégal fut jusqu’à l’indépendance le premier lien qui reliait la Mauritanie au Sénégal. Saint Louis était la capitale de la Mauritanie.

*Photo : (Les petit mandiants à qui il distribuait quotidiennement quelques pièces avaient fini par le surnommer « Papa juroom » ont tenu à porter eux même son cercueil.)