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Les effets déjà perceptibles de l’adoption de la directive AIFM

Publié le 27 janvier 2011 par Sia Conseil

Les effets déjà perceptibles de l’adoption de la directive AIFM Récemment adoptée par le parlement européen, la directive AIFM entrera en vigueur en Janvier 2011. L’ensemble des décisions prises dans le cadre de l’AIFM constitue un tournant pour l’industrie de la gestion alternative de par les restrictions qui lui sont imposées.

Les autorités nationales des pays de l’UE disposeront d’un délai de deux ans pour transcrire ces règles dans leur législation, notamment sur la question du passeport européen. Cependant on constate d’ores et déjà des impacts assez immédiats dans certains domaines. C’est notamment le cas de la rémunération au sein des fonds alternatifs et du développement d’un nouveau marché, celui des fonds UCITS alternatifs, des points sur lesquels nous nous proposons de revenir.
Un encadrement des rémunérations

La rémunération des fonds alternatifs est généralement du type « 2/20 », c’est-à-dire 2% de frais de gestion et 20% de la surperformance conservés par le gestionnaire. En matière de rémunération, un travail important avait déjà été conduit lors de la mise à jour de la directive réglementant la mise en place des normes de Bâle II (Directive CRD 3 – Capital Requirement Directive – adoptée par le parlement européen en juillet 2010). Ses conclusions ont été en grande partie reprises dans la Directive AIFM. La principale évolution est d’aligner la distribution des rémunérations sur le niveau de risque et le cycle de vie du fonds géré, et ce avec une attention toute particulière sur la partie variable. Il en est ressorti que 40% à 60% (selon son montant) du bonus devra être différé sur une période de 3 à 5 ans et qu’au moins 50% devra être distribué en titres, eux-mêmes conservés pendant une période minimum. Ainsi, pour une rémunération variable de 100 k€, un maximum de 30 k€ pourra être payé en cash la première année. Par ailleurs, en cas de performance négative du fonds, les montants versés par le fonds à ses employés pourront être partiellement récupérés via des mécanismes de malus. La Directive n’a pas été jusqu’à fixer un ratio entre la rémunération fixe et variable, se contentant de spécifier que les deux devront être équilibrées, et le fixe assez élevé pour permettre le non versement d’un variable, dont la garantie de versement est désormais interdite. Du fait du travail déjà mené dans le cadre de CRD 3, la directive apporte déjà un grand niveau de détail au travers d’une annexe décrivant les nouvelles modalités de rémunération. La nouveauté est réelle pour les acteurs alternatifs, mais déjà en partie mise en place par une grande partie des banques après 2008 sous la pression des gouvernements. La partie de CRD 3 concernant les rémunérations étant déjà été transposée dans le droit national (en France, publication d’un arrêté au Journal Officiel du 17 décembre), son élargissement aux fonds alternatifs pourrait donc être relativement rapide. Une augmentation conséquente de la part fixe est donc à prévoir pour les catégories de personnel concernées au sein des hedge funds, à l’image de ce que les banques d’investissement ont fait depuis 2009 en anticipation d’une restriction réglementaire des bonus.

Accélération de développement des fonds NEWCITS

Sur le marché de la gestion d’actifs, l’anticipation de l’adoption de la directive a eu pour conséquence de favoriser l’essor d’un nouveau type de fonds, qualifié par l’industrie de « Newcits ». Ces fonds mettent en place les stratégies de gestion alternatives habituellement développées par des hedge funds dans le cadre règlementaire des fonds UCITS.

La conjonction d’un environnement législatif incertain et la possibilité de lever des fonds auprès d’un nouveau segment d’investisseurs ont décidé les gestionnaires alternatifs à développer leur stratégie à travers des véhicules UCITS. L’entrée en vigueur de la Directive UCITS IV, en juillet 2011, et la possibilité pour un fonds UCITS de bénéficier d’un passeport européen pour sa commercialisation dans l’UE a pu également peser dans le choix. Cet engouement se traduit dans les chiffres : entre septembre 2008 et mai 2010 le nombre de fonds Newcits a quasiment doublé, passant de 270 à 520 fonds et les actifs sous gestion de 45 à près de 90 milliards d’euros.

Les effets déjà perceptibles de l’adoption de la directive AIFM

Symbolisant le développement de ce type de fonds, l’indice « Ucits HFX Index », permettant de suivre la performance globale de ces fonds, a été lancé en février 2010.

Au regard des investisseurs, cette nouvelle catégorie de fonds présente certains attraits par rapport aux hedge funds traditionnels : diversification, effet de levier, valorisation et liquidité sont strictement encadrés. Ce cadre a pris une importance particulière pour les investisseurs après la crise. En effet, nombreux sont ceux qui gardent un goût amer des périodes de rachat excessivement longues pratiquées par certains hedge funds, parfois en enfreignant les termes de liquidité initialement fixés. Cependant, l’entrée de ce nouveau type de stratégies de gestion, dans un univers jusqu’alors occupé par des stratégies standardisées et connues comporte le risque de brouiller la reconnaissance gagnée par le label UCITS. Les stratégies alternatives mises en place peuvent présenter des risques jusqu’alors non présents dans les fonds UCITS, notamment à travers un usage complexe des produits dérivés. Lorsque l’utilisation de ces instruments a été élargie avec la publication en mars 2007 de la directive sur les actifs éligibles dans les fonds Ucits III, le marché des fonds Newcits était beaucoup plus étroit. Pour cette raison, l’introduction de fonds Newcits auprès d’investisseurs non qualifiés, qui par définition ne peuvent pas mener eux-mêmes une due dilligence approfondie sur leurs investissements, nécessitera sûrement un niveau d’information sur les risques encourus plus élevé. Les principes de Directive MIFID devraient néanmoins en partie permettre de distribuer ces produits aux seuls investisseurs européens qui les comprennent.

Des impacts préoccupants

L’adoption de la directive AIFM a déjà des effets notables. En imposant de nouvelles contraintes sur la rémunération du personnel des fonds alternatifs, elle met en place des mesures très restrictives qui nuiront peut être dans un premier temps à la gestion alternative européenne. Mais l’ensemble de la directive, qui apporte une plus grande transparence, pourrait stimuler les fonds alternatifs sur le long terme. Le développement des fonds Newcits représente quant à lui une évolution notable dans le paysage de la gestion. Mais le label UCITS doit conserver toute sa force et sa renommée et pour cela le danger représenté par les fonds Newcits doit faire l’objet de toutes les attentions. En effet derrière la possibilité de permettre aux investisseurs individuels européens d’accéder à une gamme de produits plus large, leur permettant ainsi de diversifier leurs placements, se cache un réel risque de cannibalisation du label. Or la lisibilité des fonds UCITS est un atout majeur pour leur commercialisation auprès des investisseurs internationaux. Il est à parier que l’industrie va regarder de près cette intrusion des fonds alternatifs qui peut réellement ternir l’image de marque chèrement acquise par la gestion européenne.

Sia Conseil


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