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Il peut y avoir des homosexuels à l’UMP

Publié le 29 janvier 2011 par Copeau @Contrepoints

Il peut y avoir des homosexuels à l’UMPÀ l’occasion de la délibération et de la décision (insipide, mais qu’attendre d’autre ?) du Conseil Constitutionnel, la polémique Jacques Myard est venue percuter le débat sur le mariage des personnes de même sexe. Cet élu de la droite dure a exprimé avec une maladresse déplacée son mépris pour l’homosexualité. Bon, je sais un peu ce que c’est. En tant que libéral, je suis habitué à être perçu comme quelqu’un d’explicitement pervers. Je connais même des libéraux qui ont vu leur carrière sérieusement mise à mal à cause de cette « anormalité sociale », et je ne parle pas des menaces personnelles. Hélas ici, une fois de plus, l’enjeu de l’accès des homosexuels à l’institution civile du mariage s’est retouvé imbriqué dans le débat bien distinct autour de la liberté d’expression, dont la tendance au rétrécissement prend un aspect effrayant.

Je ne considère pas qu’être majoritaire autorise à brimer les minorités, dérive fréquente dans toute démocratie ; je ne suis pas davantage favorable à voir les minorités brimer  la majorité, pas plus que d’autres minorités. Si chacun doit pouvoir mener sa vie comme il l’entend dans le respect des droits d’autrui, rien ne justifie d’imposer à tous ses choix propres. En dressant la liste des discriminations interdites par la morale puis, rapidement, par la loi, un univers bien pensant est en train d’ériger une monstrueuse discrimination en érigeant arbitrairement un mur entre le camp officiellement étiqueté « du bien » et celui « du mal ». J’ai pu observer que critiquer, voire insulter les chrétiens, les musulmans ou la classe aisée (bourgeoise) est admis, et presque encouragé. Mais qu’en revanche, ne pas considérer positivement les homos ou d’autres minorités à l’influence similaire aboutit à l’exclusion sociale, médiatique. Cette hierarchisation des valeurs est-elle légitime ?

Depuis de nombreuses années, je défends l’alignement de la situation des couples de même sexe en France sur la plupart des pays européens pour le mariage, ou l’union civile selon les pays. D’ailleurs, cela pose la question de l’appropriation du mariage par l’État. À défaut de couper complètement le lien entre le mariage et l’État, nous devrions substituer un contrat d’union civile au mariage, celui-ci étant avant tout un contrat moral, mystique, religieux entre adultes consentants devant une autorité choisie. Cela simplifierait grandement le rapport du politique au mariage. Il serait beaucoup plus simple d’appliquer le principe d’égalité sans distinction de sexes, dans  un cadre légal minimal. Le « mariage » relèverait alors de la vie privée, religieuse et/ou notariale. Mais l’enjeu réel du mariage étendu aux homos, c’est l’homoparentalité. Immense tabou dans un pays qui compte pourtant un grand nombre de familles homoparentales. Il me semble essentiel de clarifier la responsabilité des familles recomposées,  adoptives ou qui ont eu recours à l’insémination artificielle, vis-à-vis des enfants dont personne ne souhaite le malheur.

La notion d’union civile, ou mariage dans le cadre actuel, concerne des dizaines de milliers de citoyens, mais aussi entre 30.000 et 300.000 enfants dont au moins l’un des deux parent est homosexuel. L’aspect fiscal et patrimonial a été en grande partie résolu par le PACS, qui n’impose pourtant pas les mêmes devoirs et obligations que le mariage proprement dit. Et la question de l’autorité parentale est en train de se mettre progressivement en place à travers le cheminement chaotique de la jurisprudence. Mais au terme de ces évolutions, la question de l’égalité de traitement entre hétéros et homos se pose. Surtout, encore une fois, sur le plan parental.

Pour autant, je me dois d’accepter l’expression de ceux qui rejettent l’homosexualité. Cela ne signifie pas que je partage leurs convictions, mais j’accepte de coexister avec eux dans une société ouverte. Or, je constate que les tenants de la pensée unique ne donnent souvent pas la parole à ceux qu’ils vouent aux gémonies. Cette condamnation sans débat contradictoire, en coupant le micro à l’opposant, est non seulement injuste et cruelle, mais elle engendre un sentiment de rejet chez tous ceux qui partagent  plus ou moins ce sentiment refusé et condamné par une petite élite médiatique. Ce sentiment d’injustice devant une condamnation sans défense, ce goût de la marginalisation forcée nourrit et renforce ce clivage pourtant fragile. À la peur de ce qu’on ne connait pas se substitue la haine de ceux qu’on pense disposer de privilèges indus.

J’ai eu des discussions avec Christian Vanneste sur la question de l’homosexualité dans la société. Je ne partage pas son opinion, mais je ne vois pas en quoi je pourrais exiger qu’elle soit condamnée. Jacques Myard est un réactionnaire étatiste dont je ne partage pas les valeurs, je ne vois pas sur la base de quel principe moral je pourrais lui interdire de s’exprimer. Le pire, c’est que la gauche, en proportion aussi homophobe que la droite, est parvenue à capter une bonne part de l’électorat gay sur les fondements d’une escroquerie morale. Pourquoi la majorité de l’électorat homo accepte-t-il d’être ainsi instrumentalisé par une force politique qui n’a rien à faire d’eux, et ne s’intéresse qu’à leurs voix ?

Par ailleurs, je rappelle que l’idéologie d’extrême-gauche défendue par Mélenchon et Besancenot n’a pas seulement interdit l’homosexualité, elle a souvent envoyé les homosexuels à la mort. À Cuba s’exerce toujours, selon Têtu, « harcèlement policier permanent, interdiction des lieux de rencontre, internement pour les séropositifs, la dictature castriste impose toujours sa loi [aux homosexuels] ». Et cette idéologie largement répandue en France n’est jamais condamnée par les organisations homos. Désapprouver avec mépris est interdit, partager l’idéologie qui mène à la mort ne semble poser problème à aucune association de défense des associations LGBT. Pour autant, je ne comprends toujours pas ce que Gaylib fait à l’UMP.

Mais sur le fond, après tout, faire du lobbying apporte-t-il encore quelque chose à la minorité homosexuelle en France ? N’est-il pas temps  de prendre ses distances avec ce combat qui a l’air de plus en plus un combat opportuniste d’arrière garde, pour prendre la voie de la banalisation ?


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