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Port du voile et liberté

Publié le 10 février 2011 par Mpbernet

orient_des_femmes_029Ce matin, le temps était brumeux…à midi, il tombait une pluie fine et pénétrante. Comme je ne sors jamais sans foulard ni gants – je suis de la vieille école et je collectionne les carrés Hermès – j’ai déployé mon foulard, l’ai plié selon la diagonale et croisé sur mon menton, puis noué sur la nuque, à la manière d’Audrey Hepburn…et pas d’une babouchka russe….ni à la manière d’un foulard islamique.

J’étais protégée…et je me suisimmédiatement demandée ce que pouvait penser une femme ou une jeune fille à qui on impose d’enlever, ou de porter cette pièce de vêtement exclusivement féminin. Pourquoi tant de haine, de paroles définitives, de préjugés venus du fond des âges ?

Je sortais de la merveilleuse exposition « L’Orient des femmes » au musée du Quai Branly, dont je vous parleraidemain. Et j’avais en mémoire l’article de dimanche, dans le supplément FEMINA, qui disait des tas de choses sensées à propos de voile et de liberté.

Souvenons-nous d’abord que dans les civilisations anciennes, et bien avant l’apparition de l’Islam, le voile est destiné à protéger celle qui le porte : de la poussière et du sable, surtout à une époque où la chevelure est difficile à laver et à sécher. Et secondairement, protéger des regards indiscrets. A la seule discrétion de la femme qui le porte, plus ou moins serré. Les patriciennes romaines portaient le voile, la vierge Marie aussi... Dans ma jeunesse, on n’imaginait pas assister à la messe sans foulard sur la tête, ou du moins une mantille, en signe de respect pour la présence de Dieu au milieu des fidèles. Ce reste de tradition demeure une obligation lors des audiences papales : les reines catholiques peuvent seules porter un voile blanc, les autres, noir.

J’ai en mémoire aussi la réflexion de notre gentille guide lors de notre voyage en Egypte. Elle professait des idées très avancées et libérales, mais avait la chevelure sanglée dans un fin voile. A ce propos elle nous déclara : « Dans mon quartier, toues les femmes le portent, et je ne souhaite pas me singulariser. D’autre part, j’ai les cheveux crêpés et lorsque je prends ma douche, je les serre dans le foulard et je n’ai plus de problème pour me coiffer… »

Je doute pour ma part que des parents puissent vraiment imposer le port du foulard à une jeunefille compêtement contre son gré : au coin de la rue, rien n’est plus facile à enlever…Donc, les jeunes filles qui le portent le font de leur propre volonté, elles expriment ainsi leur liberté de dire : «Je respecte la foi de mes ancêtres,  je ne suis pas disponible pour le flirt sans lendemain,je ne veux pas parler avec n’importe qui, je veux rester pure pour celui que je choisirai pour mari, fichez-moi la paix ! » Pourquoi dans ce cas leur « casser les pieds » ? Le voile est aussi une expression de leur volonté et de leur liberté, comme moi, si j’en ai envie, de porter une croix autour de mon cou. Ce qui ne veut pas dire pour autant que les autres, celles qui choisissent de marcher tête nue, soient des filles faciles. C’est cela qu’il faut faire admettre aux jeunes de leur entourage, aux « grands frères »….qui sont tous des parangons de vertu, comme chacun sait…

Toute cette polémique cache une foule de non-dits : une exacerbation de certains laïques "intégristes" (chacun a les siens !) pour qui ceux qui croient en Dieu sont des imbéciles, des aliénés, des suppôts de l’Ancien régime, qu’ils soient chrétiens ou de n’importe quelle religion – notre pays n’a pas encore totalement digéré les lois de 1905 -sans compter ceux qui agitent le tapis pour favoriser les mouvements d’extrême droite et attiser la haine de l’ « autre », celui qui ne partage pas les mêmes coutumes.

hoda_charaoui
Souvenons-nous aussi du geste historique de Hoda Charaoui – en 1923 déjà - propriétaire et éditrice de la revue L’Egyptienne. Elle et ses amies, qui revenaient du Congrès féministe mondial tenu en Italie, ont retiré leur voile en descendant du wagon-harem : le peuple qui se pressait dans la gare du Caire et ses alentours les a acclamées. Elle signifiait ainsi que la femme égyptienne se lançait dans l’ère moderne et la lutte pour la libération de son pays. Le discours de Hoda Charaoui ne touchait que les femmes de la haute société, car la réclusion et le port du voile, signes sociaux de leur position privilégiée, qui leur étaient en principe imposés plus strictement, étaient ressentis comme une violation essentiellement par des femmes avec assez d’instruction et de loisirs pour s’ouvrir à des idées nouvelles en lisant les journaux et les romans étrangers.

L’abandon du port du voile a dans ce cas aussi une signification sociale, mais toujours dans le domaine de l’affirmation de la liberté.

Alors, même si personnellement, je trouve les femmes plus belles auréolées de leurs cheveux, si certaines souhaitent les cacher, laissons-les libres, traitons-les à égalité avec celles qui les montrent, et surtout avec fraternité !


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