Message politique, la petite phrase d’Anne Sinclair sur DSK - "je ne souhaite pas qu'il fasse un second mandat au FMI" - fut une merveille du genre. Elle a eu le mérite de relancer une campagne électorale qui s’embourbait un peu. Présent par son absence, le Directeur général du FMI surfe d’autant plus sur le désir inconscient des Français que ces derniers projettent volontiers sur le personnage un imaginaire collectif. Capitalisant son éloignement de la place parisienne et de ses douteuses affaires, Washington sera-t-il le Colombey-Les-Deux-Eglises de l’ancien Ministre socialiste de l’Economie?

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Créer le désir avant de proposer le produit
La popularité de DSK s’envole mais ne repose, pour le moment, sur rien de précis. Suffit-il, à force d’impatience, qu’elle perde un peu d’altitude, l’épouse se charge, par quelques mots, de la ragaillardir. Preuve que c’est donc, en premier lieu, le personnage fantasmatique qui intéresse l’électorat : pas son programme. DSK incarnerait-il l’anti-sarkozisme par excellence ? Son allure débonnaire, presque bonhomme dans sa gestuelle, son caractère jovial tranchent, il est vrai, avec l’image du locataire de l’Elysée, volontariste sinon velléitaire. Tout en rondeur pour le premier, plus cassant pour le second si l’en croit l’exaspération rapportée par la Chancelière allemande à ce sujet.La stratégie électorale de Dominique Strauss-Kahn vise, si l’on ose dire, à créer le désir avant de proposer le produit fini. Elle s’inspire de méthodes commerciales désormais bien connues : on suscite l’engouement imaginaire du consommateur en lui faisant miroiter la mise sur le marché, "un jour prochain", d’un nouveau bien. Les campagnes publicitaires s’enchaînent et une fois qu’une étude sérieuse montre un individu suffisamment "accroc" à l’idée, la fabrication réelle est lancée. Erreur, m’objectera-t-on : il suffirait d’un concurrent un peu malin pour annoncer aussitôt un produit aux fonctionnalités identiques et rafler la mise. Au PS, il ne manque certes pas de challengers. Malheureusement, la loi du désir humain possède ses règles strictes. L’énergie pulsionnelle désirante est libre, pratiquement peu repérable, jusqu’à ce qu’elle manifeste son "intentionnalité" à s’attacher à un objet, concept développé par Freud et appris de son maître Franz Brentano à l’Université. Cet étayage en est même la condition d’existence. La relation amoureuse le prouve : lorsque frappe le coup de foudre entre deux êtres, un compétiteur extérieur n’aura plus grand chose à espérer. Ce scénario est celui qui porte DSK. Même s’il semble avoir "verrouillé" sa place auprès du désir des Français, rappelons qu’à terme, un amour présidentiel peut toujours en chasser un autre.
PodcastDSK.mp3
(3.13 Mo)

Jean-Luc Vannier, le 13/02/2011