Ben Ali et Moubarak ont dégagé..
Les événements actuels en Tunisie et en Egypte font naître dans le monde entier un espoir qu’on espère pas trop utopique. Ces gens se soulèvent contre la dictature, se révoltent contre la confiscation des richesses du pays par un petit groupe d’escrocs insatiables, se battent pour la démocratie et meurent pour le droit de vote.
Leçon n°1 pour les blasés de France et d’ailleurs : mourir pour le droit de vote rend obscène l’abstentionnisme et l’indifférence des électeurs pour qui il n’y a qu’un seul slogan : « tous pourris moi je m’en fous je fais mon petit bizness dans mon coin et le reste je m’en tape ! »
On constate en outre que ces bouleversements ont lieu en l’absence d’opposition organisée, de structures politiques alternatives, d’hommes prêts à prendre la relève. Situation à la fois inquiétante et excitante. Lecture inquiétante : ça va être le bordel, l’armée va prendre le pouvoir, une dictature va succéder à l’autre. Ou bien : des ruines et des cendres va surgir, peut-être lentement, peut-être avec bien des à-coups et des difficultés, une nouvelle démocratie, un pays jeune et libre qui donnera des idées aux autres pays opprimés par des pouvoirs illégitimes et totalitaires : Algérie, Libye, Birmanie, Corée du Nord etc.
Leçon n°2 : même s’il y a incertitude il n’est pas interdit, loin s’en faut, de penser qu’un souffle nouveau peut redonner aux peuples un espoir, un optimisme, une dynamique que les oppositions traditionnelles, vermoulues, sclérosées, complices, ne sont plus capables de faire naître.
Une autre caractéristique, pas la moins extraordinaire : tous les doutes que soulèvent de plus en plus les moyens modernes de communication (téléphone mobile, internet, Facebook, Tweeter) sont balayés par cette formidable évidence : c’est grâce à eux que les peuples se sont libérés, court-circuitant les réseaux d’information verrouillés par les pouvoirs en place : journaux, radios et télés se sont révélés des forteresses vides, des moyens de contrôle des esprits obsolètes et totalement insignifiants. C’est une excellente nouvelle.
Leçon n°3 : mondialisation, uniformisation des esprits, standardisation intellectuelle par les médias, tout cela reste un danger bien réel mais n’est plus une fatalité : sauf à interdire toute forme moderne de communication (mais est-ce possible ?) rien ne sera plus jamais pareil et l’avenir de toutes les dictatures semble compté. A qui le tour maintenant ? La théorie des dominos peut-elle se concrétiser ? A quand une révolution démocratique chinoise ?
Reste cependant un problème non négligeable : jusqu’à quel point ce processus est-il exportable, en particulier dans nos pays ? Peut-on imaginer que l’exaspération d’une majorité de Français ou d’Italiens, par exemple, vis-à-vis de leurs dirigeants politiques rende légitime, voire souhaitable, de les pousser vers la sortie par de massives manifestations de rues plutôt que d’en appeler au processus électoral classique ? Jusqu’où la « démocratie directe » peut-elle aller ? Ses dangers (manipulations, démagogie, propagande, phénomènes de foule, défoulements, appels à la violence etc.) ne sont-ils pas plus importants, plus inquiétants que les avantages au moins apparents d’une démocratie « en temps réel » ? Notre organisation républicaine est-elle devenue obsolète ? Ne risque-t-on pas la catastrophe là où on attend le paradis sur terre ? Pour ma part je crois que la réponse est dans la question.
Maurice Claqueboudin