Magazine Asie

Au bord de la route

Par Antoinehl

Il est huit heures et demi du matin.
Je suis sur ma moto, engoncé dans ma veste dont les renforts me protègeront en cas de rencontre inopinée.
J’ai mes gants, mon casque, mes lunettes, et j’attends au feu.
Entre deux voitures bringuebalantes crachant une musique semblant sortir d’un gramophone, je cuis doucement au soleil du matin bangalori.
Lui est assis sur le trottoir défoncé.
Une longue barbe blanche descend d’une figure anguleuse dont les rides cachent presque entièrement les yeux.
Ses cheveux (mais en a-t-il?) sont recouverts par un turban gris enroulé qui lui donne un air de souverain déchu.
Ses jambes sont maigres… mon dieu qu’elles sont maigres. Celle de gauche est vivante mais l’autre, de même couleur et de même proportions est en plastique, jusqu’au genou. Elles sont repliées, et paraissent a elles seule fournir l’équilibre nécessaire au reste de ce corps décharné.
De chaque cote sont posées les deux cannes vieillissantes qui lui servent a marcher, quand il marche.
Et dans ce tableau misérable, en son centre, est une lumière.
L’homme renverse dans sa bouche, le contenu d’un petit sac en plastique transparent. Ce doit être des légumes dans leur bouillon.
Les gorgées sont mesurées, précises et régulières.
Il mâche beaucoup, mais lentement, la figure tournée vers le soleil matinal. Entre deux lampées, il respire, et nous regarde tous en silence.
Le geste lui rend son humanité, le plaisir qu’il semble prendre lui redonne vie.
Le feu est passe au vert et une avalanche de klaxons, aussi inutile que désagréable, remet en marche la file des véhicules.


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