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Nouveau Talleyrand

Publié le 11 mars 2011 par Malesherbes

Il nous arrive parfois de dire que les jeunes sont mal élevés. Si je soutiens qu'il en va de même pour des moins jeunes, je suis tenté de prétendre, en voyant la conduite de notre Président, que lui n'a pas été élevé du tout. Il a quelques excuses. Abandonné par son père, il a été éduqué par son grand-père, un citoyen turc, vous imaginez ! Il serait trop long ici d'énumérer toutes ses manifestations d'impolitesse. Je me limiterai à évoquer l'utilisation de son téléphone mobile en audience chez Sa Sainteté le Pape, source pour lui de la quintessence de l'éducation, ou son ricanement lors de l'hommage aux dix soldats français tués lors d'une embuscade dans la vallée de Kapisa.

Ce qui m'amène à rédiger ce billet, c'est la déclaration qu'il a jugé utile de faire ce jeudi, après avoir reçu à l'Élysée des envoyés du Conseil national de transition libyen. De sa seule initiative, apparemment même sans avoir consulté son ministre des Affaires étrangères tout neuf, il s'est prononcé en faveur de frappes ciblées contre des sites militaires libyens. Et cela, à la veille d'une réunion des vingt-sept chefs d'État ou de gouvernement de l'Union européenne !

Au second trimestre 2008, Nicolas Sarkozy s'est cru Président de l'Europe, conforté dans cette illusion par le manque de connaissances de certains médias. En réalité, c'était tout simplement à la France d'assurer la présidence du Conseil européen et il revenait donc à son Président la tâche de présider ce Conseil européen. L'existence même de ce Conseil prouve à l'évidence que c'est à cette instance que revient la tâche de définir la politique européenne. Elle ne peut être proclamée au préalable unilatéralement par le dirigeant de l'un seul des membres de l'Union.

Procéder comme l'a fait hier Sarkozy est de la dernière goujaterie et surtout totalement contre-productif. Une position commune ne peut être dégagée qu'à la suite de discussions. Tenter d'imposer sa vision des choses comme il vient de le faire risque au contraire de susciter de réactions de rejet et ne peut que compliquer l'adoption d'une politique unanime. Si l'on veut que l'Europe puisse jouer un rôle au plan international, il est indispensable que ses membres renoncent à se concentrer sur leur seul intérêt national ou, pire, personnel, afin d'être en mesure de parler d'une seule voix.

Il est en outre fort possible que, toujours à l'aise dans les rôles de matamore qu'il affectionne, notre président ait tenu à s'affirmer comme le soutien effectif des révolutionnaires libyens, que, en cas d'échec du sommet, la pusillanimité des autres dirigeants aura empêché d'agir. Il reste fidèle à un discours fréquent chez nos politiques : tout le mal vient de l'Europe. Comment dans ces conditions faire enfin vivre l'Europe dans l'esprit des citoyens ?


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