Grappillages 2011 (6)

Par Mauss

Il est difficile, face aux événements actuels (Japon, Libye) de ne pas évoquer ces drames du grand village qu'est devenue notre planète terre.

Mais que dire si ce n'est de rappeler la fragilité des choses, les impuissances à aider concrètement, les fausses distances abolies par des images qui tournent en boucle sur les chaînes TV. On pense bien sûr à nos amis comme Bruno Ménard et autres restaurateurs qui ont dû avoir pas mal de casse !*

Et pourtant la vie continue. D'autres drames surviendront, d'autres révolutions émergeront ici ou là et l'Europe montrera encore et encore sa frilosité à parler fortement d'une seule voix. Quelle distanciation entre les peuples et les gens qui les gouvernent !

* : Bruno vient gentiment de m'envoyer un email où il me confirme qu'il n'a pas eu trop de dégâts, mais que les drames humains dans l'est du pays sont énormes.

Lectures

Au sujet du Japon, on apprendra beaucoup (Figaro de ce samedi) sur ces phénomènes imprévisibles et comment ces plaques tectoniques sont capables de bouleverser une humanité croissante qui occupe toutes ces zones côtières à risque où des populations s'installent en espérant ne pas connaître de désastres. Cela nous rappelle les 7 fameuses catastrophes qui ont touché la planète avec le risque à chaque fois d'éliminer toute trace de vie. On n'en est pas là, mais c'est du domaine du possible. Le mot "fragilité" prend ici tout son sens.

Même si on est viscéralement lecteur du Nouvel Obs ou de l'Humanité, on ne peut pas échapper au n° spécial du FigaMag sur l'Italie qui fête cette année le 150ème anniversaire de son unité. Une totale réussite, ce n° spécial, avec, entre autres articles passionnants (Umberto Ecco), une présentation complète du Lago di Garda. Punta san Vigilio : si vous ne connaissez pas cet endroit magique, pas très loin de Vérone, mettez cette adresse dans vos tablettes. De Ferrari à la mafia, de la cuisine à la mode, des musées aux copines (!) de l'ineffable Berlusconi, un apercu assez complet de ce pays qui est une respiration différente de tous les autres. Vous faites la moue ? Allez à Crémone, à Parme, à Bari, à Alba. Un voyage que devrait rembourser la sécu.

Le Point : beaucoup d'articles passionnants dans ce n° 2008, particulièrement une série de présentations d'artisans qui décrivent avec éloquence la noblesse des métiers manuels. Il n'est que temps de désacraliser le baccalauréat comme chemin obligatoire pour trouver un travail intéressant, valorisant, rémunérateur.

Politique

On peut rester sans voix devant le béant des commentaires des médias au sujet de la croissance du FN en énumérant des arguments la plupart du temps totalement à côté de la plaque. Les millions de français dont le souci permanent est proche d'une survie qu'ils veulent digne, qui comptent au sou près, pour qui le mot précarité est quotidien, n'ont que faire de principes, aussi nobles soient-ils, énumérés par quelques pontes bien nourris, bien logés, bien rémunérés. Si DSK se présente, qu'il nous donne vite une explication de texte sur cette phrase qui a le mérite de bien poser les problèmes :

"Dépasser le possible sans promettre l'impossible"

Lire l'édito d'Alexis Brézet dans le Fig Mag. C'est certainement du brutal pour certains, mais au moins, cela pose les questions correctement.

On peut aussi s'intérroger sur ces journalistes qui s'agglutinent autour de Khadafi à accepter ses réponses lamentables et qui lui donnent ainsi une aura sinistre qui n'a strictement aucun intérêt.

Bourgogne

Notre voyage annuel en Bourgogne (DRC, Mugnier, Mortet, Rousseau, Coche-Dury, Pitiot, Faiveley) a montré avec éclat à quel point les grands bourgognes vont devenir la référence absolue des grands vins. Si on peut parfaitement admettre et même comprendre que certains préfèrent les styles bordeaux, rhône, sud, dont les plénitudes des meilleurs représentants sont souvent enthousiasmantes, à un moment de sa vie, l'amateur devra fatalement tomber amoureux de ces vins inouïs que sont ces expressions fascinantes des plus beaux villages de la côte de nuits, sans oublier le Corton, si justement "grand cru" en côte de beaune.

Mais les petits volumes 2008 et 2010 vont fatalement pousser les prix vers le haut, et plus que jamais il va falloir vite casser sa tirelire pour encaver quelques joyaux qui vont simplement devenir très vite, trop vite, inabordables. Si vous n'êtes pas convaincus, étudiez les prix actuels des transactions où l'hectare chahute les millions d'euros sans que cela fasse tiquer les acheteurs qui se pressent comme jamais.

Encore heureux - mais pour combien de temps - que l'Asie n'ait pas pour cette région si petite les yeux de chimène qu'elle a pour les sommités bordelaises.

Chez Arnaud Mortet, des vins où la finesse prend le pas sur la puissance

Bernard Noblet, en toute grande forme dans la nouvelle cour de la Romanée-Conti

 

Le moment privilégié dans les caves du Domaine : on déguste de belles choses, souvent surprenantes !

Jean-François Coche-Dury, toujours casquetté. Photo prise par Yi Wang.

Les mots manquent pour parler des immenses vins du Domaine Rousseau. Photo prise par Yi Wang.

L'alter ego de Rousseau dans l'élégance au plus haut niveau : JF Mugnier

Pour notre ami chinois Yi Wang (GJE), ce voyage éclair a été un événement qui va faire des jaloux !

Jean-Marc Burgaud (à gauche) va retourner à Morgon avec plein d'idées neuves. 

Roger, Vialette, Burgaud, bibi, Millet. Photo prise par Yi Wang.

Séance de travail au Montrachet, un hôtel-restaurant top niveau, où il nous fallait identifier les 7 millésimes. Echec lamentable de mes zozos sauf Roger qui en a trouvé 4. Le bougre : je le soupçonne d'avoir travaillé la chose chez lui des semaines durant :-)

Je vous rassure : la portion normale, c'est 12. Un seul mot : une référence absolue.

Primeurs à Bordeaux

Sur son forum, Parker annonce sa venue pour déguster les 2008 (en bouteille) et les 2010 (en élevage). S'il convient que les premiers sont maintenant dans un autre monde, celui des biens de luxe où la marque est tout, il émet quelques doutes sur la poursuite à la hausse des prix, quand bien même on va probablement louanger le 2010 comme un nouveau chef d'oeuvre (pas pour tous, comme d'hab). Il pose la question intéressante de savoir si oui ou non, les 2009 ont bien été vendus aux clients finaux et ne sont pas stockés à la propriété ou chez des négociants spéculant sur la demande asiatique croissante. 

A titre perso, connaissant les prudences de la gente bordelaise, j'ai quelques difficultés à croire que le négoce prenne le risque de garder par devers soi des vins qu'il pourrait vendre tout de suite, avec des marges correctes.L'avenir confirmera ou infirmera ce point de vue.

Gastronomie

Pour avoir une vue extérieure sur l'évolution de a gastronomie française, lisez effectivement le livre de Mike Steinberger publié chez Fayard (€ 19,90) :

"La Cuisine française, un chef d'oeuvre en péril".

Je viens de finir le chapitre sur l'histoire du Taillevent, remarquable. On y parle aussi beaucoup de Ducasse, de quelques vignerons et de l'avenir international de ce qui fait quand même notre fierté nationale n° 1. Le propos est sage, bien écrit, parfaitement documenté, notamment sur le rôle et l'évolution du Guide Michelin. Une très bonne lecture, agréable de surcroît. Merci Mike pour ce livre qui t'a pris tant de temps à l'écrire.

Argentine

Départ en fin de semaine pour l'Argentine, mon premier voyage vers ce pays fascinant où de grands noms bordelais ont créé à côté de domaines locaux, de nouveaux vignobles dont le succès mérite étude. Le pays devrait être notre hôte d'honneur pour le prochain WWS à Villa d'Este. On vous dira tout !