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Opinion : L'état de la poésie en France.

Par Ananda

Sans tomber dans le féminisme excessif des années 1970 ni dans la tyrannie « branchée » du jeunisme, il faut reconnaître que la poésie française – même « contemporaine » - est encore frileuse pour ce qui est de la place réelle qu’elle réserve aux femmes et aux jeunes.

Prenons, par exemple, le monde fourmillant (mais précaire) des revues de poésie.

Combien de revues et de maisons d’édition poétiques sérieuses où des femmes et des moins de quarante ans aient un poids réel ?

Et à qui la « faute » ?

Certes, au fonctionnement global d’une culture.

Aux hommes, l’activité (parfois la suractivité) et les « bandes de copains » qui tissent (plus ou moins consciemment) d’étroits réseaux de solidarité complice.

Aux femmes, « l’intendance », la passivité, le bon vieux rôle de « mamans-muses », la prison de l’affectif et la difficulté à voir en l’autre poétesse autre chose qu’une dangereuse « concurrente » pour des raisons au demeurant souvent mesquines n’ayant pas grand-chose à voir, en fait, avec la poésie.

Dans ce « petit monde-là », les gens que l’on prend au sérieux sont âgés, et les choses fonctionnent volontiers par couples, assez traditionnels.

Quant aux « jeunes » - femmes et hommes – ils doivent indéfiniment « faire leurs preuves ». D’où une grande frustration, une véritable maladie du « besoin de reconnaissance » qui rend, souvent, les poètes si « insupportables ».

Marginalisée, « prise en otage » par les chapelles, les « patriarches », les réseaux d’ « amitiés » forgées de longue date , les milieux enseignants et universitaires (forcément fortement « formatés ») et, cela va de soi, les milieux bourgeois et classes moyennes, la poésie française, celle du pays de Rimbaud (qui, lui, n’était pas un bourgeois, mais un surdoué), avance-t-elle ?

Y entend-on les voix « émergentes », atypiques ?

Y a-t-il de la place pour elles ?

Entre le culte plein de rigidité scolaire du « beau langage », les « mots d’ordre » qui deviennent des diktats (brièveté, concision du style), l’élitisme  (voire le snobisme), le « vase clos » (ou encore « microcosme »), les copinages et le culte pavé de génuflexions aux « grands aînés », aux « références », elle me semble quelque peu « coincée » et beaucoup fermée sur elle-même.

On parle souvent, à propos de la France, de « société bloquée ».

Il faut croire qu’ici encore, cette expression pourrait bien être, hélas, à l’ordre du jour.

La poésie ronronne dans son petits cercle d’ « habitués » autosatisfaits ( un peu semblables , me risquerai-je à dire – aux « habitués du Café du Commerce »). Elle rêve, elle fantasme sur une image du « Poète » subversif, créatif et « victime », qui ne mange pas de pain. Elle se fait (gentiment), en somme, bien au chaud, son « petit cinéma ».

Pour se dispenser d’avoir à analyser ses propres carences ?

Peut-être faudrait-il une nouvelle « révolution surréaliste », mais qui, cette fois, tiendrait compte de la présence des femmes en tant que véritables créatives et en tant qu’êtres véritablement autonomes ?

Ce qui est sûr, c’est que la poésie est une forme de rupture.

De ce fait, je pense qu’elle doit faire tout, sauf se reposer sur ses acquis.

On s’interroge fréquemment sur la place de la poésie en France.

« Moribonde » ? Mais je crois qu’elle y a sa part de responsabilité.

Peut-on « écrire moderne » dès lors que les réflexes, les habitudes profondes ne le sont pas ?

L’humanité se délivrera-t-elle un jour du carcan de ses hiérarchies de primate ?

PL


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