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VIDE ET PLEIN (Texte inspiré par Bertrand Chagal).

Par Ananda

 

Parfois il arrive que le vide soit si vide qu’il aie besoin de faire le plein.

Je vous assure, ça vaut le coup d’œil, lorsqu’il fait  le plein de vide !

Le problème, juste, c’est que plus il fait le plein de vide, plus il devient vide…du vide qui s’ajoute au vide…est-ce que ça nous mène quelque part ?

Mais c’est ainsi, pourtant : le vide a lui aussi besoin de grossir.

Le plein, lui, se heurte à d’autres problèmes : quelquefois, il se sent vidé.

Tellement vidé qu’il ne se reconnait plus lui-même, et qu’il tourne à vide.

Il lui faudrait alors une transfusion : il en devient avide !

Que vaut-il mieux ? Un vide bien plein ou un plein qui ne l’est pas assez ?

Qui est assez plein pour savoir ce que le plein est quand il l’est trop ?

Qui est assez vide pour savoir où s’arrête l’avidité ?

Un vide plein, c'est-à-dire plein de lui-même, plein de son propre vide…cela se peut-il concevoir ?

Et jusqu’où le vide peut-il aller dans le sens du plein, dans le plein sens, sans atteindre le trop-plein (de vide) ?

Quelle est la différence entre un plein de vide et un vide trop plein ?

Le plein, quant à lui, peut-il raisonnablement se vider ? Dans le cas où il se vide, il se vide de quoi ?

Où va ce qu’il perd ?

Et quand c’est le vide à qui il arrive de se vider, qu’en dites-vous ?

Un vide abandonné par sa propre substance devient-il plein ? Et dans ce cas-là, plein de quoi ?

Plein du manque de vide ? Peut-être…

Et allez savoir où s’en va un plein qui a vidé les lieux. Est-il moins plein parce qu’il a laissé derrière lui un grand vide ?

Mais, comme on le constate, le plein est susceptible de créer du vide…un bémol, toutefois : si et seulement si c’est à son insu.

Et que fait le grand vide que le plein a laissé derrière lui (sans le savoir) ?

Va-t-il lui demander une reconnaissance en paternité ?

Il court à l’échec : tout plein qui se respecte ignore l’existence du vide. Et cela, même si l’on a coutume de dire, d’une femelle pleine, qu’elle est grave-vide.

Autre épineux problème : que se passe-t-il lorsque le vide est en état de manque ?

Et qu’est-ce que le vide, d’abord ?

Ne serait-ce pas le manque de plein ?

Force est d’en convenir : le plein manque de vide, et vice-versa.

N’y gagneraient-ils pas s’ils en venaient à se tenir bras-dessous-bras-dessus ?

Certains m’objecteront que s’ils le faisaient, ils s’annihileraient…ou l’un boufferait l’autre…mais qui ?

Mais après tout le vide est assez vide pour contenir le plein.

Imaginez, dès lors…un vide plein de plein…est-ce encore un vide ?

Je plains énormément le plein lorsqu’il a des passages à vide.

De même, j’avoue redouter le vide lorsqu’il fonctionne à plein.

Le plus fort est, toutefois, qu’un jour, le vide rencontra l’envers. Que croyez-vous qu’il se passa ? Je vous le donne en mille ? Ce fut le coup de foudre !

L’envers – qui était du signe du verso – se pâma proprement ; il n’était plus question, pour lui, dès lors, d’être contre tout.

Le vide – qui, lui, était du signe du ver solitaire – tomba à la renverse.

Ce gros plein de soupe-au-lait de plein fut mordu par la jalousie (il était assez charnu pour cela, ma foi). Dans son optique, ce n’était pas un coup de foudre, mais un coup bas.

Qui l’eût cru  (et, dans la foulée, qui l’eût cuit, et qui l’eût cui-cui) ? Les voies du seigneur sont quelquefois imprévisibles et invisibles.

Patricia Laranco


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