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Ce pouvoir Hongrois qui n’aime pas les philosophes

Publié le 23 mars 2011 par Hmoreigne

 Où va la Hongrie ? Sous prétexte de conduire une ligne résolument hostile à l’Union Européenne, le Premier ministre hongrois , Viktor Orban surfant sur un néo-populisme tire doucement mais sûrement son pays vers un régime autoritaire. La levée de boucliers qui avait entourée l’adoption de lois assurant une mise sous tutelle des médias n’a pas freiné ses ardeurs. Le temps est désormais, comme à l’époque du communisme, à la chasse aux intellectuels.

On arrête plus Viktor Orban depuis que son parti, le Fidesz a largement remporté les élections législatives d’avril 2010. Le libéralisme a remplacé l’économie dirigée mais les vieux réflexes acquis sous le joug de régime communiste subsistent. Certains observateurs affirment que le style autoritaire du Premier ministre répond à une demande du peuple hongrois pour un dirigeant « à poigne », dans la droite lignée des grands dirigeants de son histoire (Miklós Horthy, János Kadar).

Face à une planète en plein chamboulement dans laquelle la Hongrie, comme les autres nations européennes, a bien du mal à se dessiner un avenir, Viktor Orban joue sur du velours en se présentant comme le protecteur d’une nation menacée.

Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux.” Est-ce pour éviter d’entendre cette mise en garde de Thomas Jefferson que depuis le début de l’année une campagne de dénigrement, orchestrée par l’entourage du premier ministre Viktor Orbán, se développe dans les médias hongrois contre plusieurs philosophes ? Sans doute.

Cette volonté de discréditer des intellectuels s’inscrit dans un contexte particulier, celui d’un projet de réforme de la Constitution qui relève plus d’un changement de régime. La version définitive n’est pas encore connue. Elle doit être approuvée par le Parlement le 18 avril puis, signé par le président de la République avant d’entrer en vigueur le 1er janvier 2012. Le projet est démocratiquement inquiétant : réforme du système électoral à l’avantage du parti majoritaire, modification des institutions au profit des partis actuellement au pouvoir et limitation des prérogatives du Conseil constitutionnel qui constitue le dernier contre-pouvoir.

Dans ce contexte des plus sombres, six philosophes dont Agnes Heller, Mihály Vajda, Sándor Radnóti sont accusés d’avoir détournée 2 millions d’euros mais surtout d’avoir sali l’image du pays en dénonçant les lois liberticides contre les médias qui ont valu à la Hongrie les réprimandes de Bruxelles.

La campagne de calomnies menée par trois journaux et trois chaînes de télévision contre Agnès Heller et ses persécutions judiciaires suscitent une vive émotion chez les intellectuels français. En quelques mois, cette vieille dame de 81 ans, universitaire de renom, a été propulsée au rang d’ennemie du nouveau gouvernement Orban sur fond d’antisémitisme.

Le sujet n’est pas très porteur, noyé dans une actualité très chargée. Le Collège international de philosophie tente néanmoins d’alerter les esprits et procède à un rappel salutaire : “l’apparition en Europe de régimes nationalistes dont les pratiques gouvernementales concilient, via quelques aménagements techniques, le respect des normes de l’Union et la chasse à tout ce qui, dans la société, entend se soustraire au consensus obligé, à commencer par la liberté d’expression et de recherche“.

Crédit photo : OCDE (Flickr)

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