Pour son logo, la boss de l'Ordre des infirmiers choisit son frérot
Le mariage a plus d'une utilité. Et la possibilité offerte aux femmes de prendre le nom de leur époux n'est pas la moindre : elle assure un confortable brouillage des liens. Qui a permis à la présidente de l'Ordre des infirmiers de confier, en toute tranquillité, un marché de 20 000 euros à son petit frère, comme le révèle Rue89.
Des années que Dominique Le Boeuf porte le nom de son mari. Mais elle est née Ameslant, le jour de la Saint-Valentin, en 1961. Cette protégée de Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, pensait-elle que personne ne ferait jamais le rapprochement entre elle et le dirigeant de la société retenue pour « créer l'identité visuelle » de son ordre, Laurent Ameslant ?
Cette société, Openminded, aujourd'hui rebaptisée Evermore, a été choisie à l'issue d'une compétition pas très transparente.
« Si elle nous avait dit que c'était son frère… »
Le 23 mars 2009, à 2h20 du matin, Dominique Le Boeuf envoie un mail aux membres du bureau de l'Ordre pour leur annoncer qu'elle a « trouvé des prestataires » pour réaliser le logo de leur organisation, à qui elle vient d'envoyer un appel d'offres. Ils sont quatre. Elle précise :
« Je ne pense pas qu'il faille nous en rajouter maintenant, si on veut avoir une identité graphique dans les plus brefs délais… »
Lors d'une séance plénière du conseil national de l'ordre, le 3 avril 2009, elle fait voter, « sur le rapport de la présidente », sa décision : celle de retenir « la société Openminded pour proposer une identité graphique de l'Ordre national des infirmiers, sous réserve d'un approfondissement, à la prochaine séance du Conseil national, des propositions d'infographie, jugées trop limitées. »
Selon un membre du bureau, qui ne veut pas voir son nom publié, « la présidente nous a indiqué qu'elle avait étudié les propositions en détail et que celle d'Openminded était la meilleure ». Un autre : « Si elle nous avait dit que c'était son frère, nous lui aurions évidemment expliqué que ça nous posait problème. » Dominique Le Boeuf jure que leur « lien » n'était pas caché. Version confirmée par sa collaboratrice Myriam Petit, la secrétaire générale de l'ordre.
« Une forme de procès d'intention tout à fait lamentable »
La proposition d'Openminded était-elle vraiment plus créative ? C'est assez subjectif.
L'agence a-t-elle été choisie sur ses références ? Impossible, elle était encore en cours de création quand elle a été désignée.
Etait-elle moins chère que les autres ? Dominique Le Boeuf explique que son petit frère était « le moins disant financier ». Il a pourtant facturé 20 000 euros une prestation proposée moins de 5 000 euros par un concurrent…
Laurent Ameslant considère qu'il n'a « pas fait l'objet d'un traitement de faveur », d'ailleurs, souligne-t-il, « j'ai ensuite participé à un autre appel d'offres pour refaire le site Internet de l'ordre des infirmiers et je l'ai perdu ». Il dénonce « une forme de procès d'intention tout à fait lamentable ».
Sa soeur parle carrément d'un « règlement de comptes » destiné à la pousser à la démission. Quatre ans après sa création, l'Ordre national des infirmiers reste contesté par une grande partie de la profession, qui compte 500 000 personnes.
SOURCE : http://www.rue89.com/