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L’ultralaïcité en mode maxi-G(u)éant !

Publié le 25 mars 2011 par Copeau @Contrepoints

L’ultralaïcité en mode maxi-G(u)éant !

La France n’a pas toujours été ce pays de nuances et de tons pastels qu’on connaît à présent. De nos jours, la recherche de compromis délicat, l’art subtil de ne froisser personne sont à tel point poussés que plus aucune contrariété n’offusque le citoyen français dans ses journées toutes plus roses les unes que les autres. Mais pour en arriver là, il aura fallu en écrabouiller, des dissidences et des mal-pensances ! Il aura fallu en broyer, des individualités chafouines et des oppositions aussi futiles qu’infructueuses !

Et ce lent et minutieux travail d’aplanissement des difficultés à coups de Bisous Qui Cognent un peu par-ci par-là est passé par plusieurs phases, étalées sur de nombreuses années.

Tout le monde se souvient des travaux préliminaires de reengineering massif de la société par l’introduction progressive d’une myriade d’associations diverses et bigarrées dont le but était, justement, de faire du vivre-ensemble un nouvel étendard jeté vigoureusement à la face des gens normaux, c’est-à-dire trop bêtes pour comprendre où était leur intérêt.

Petit-à-petit s’est constituée tout une galaxie de combattants d’un monde plus doux, extrémistes de la gentillesse unidirectionnelle et électoralement calculée. Un camp d’aimables soldats du respect total et ultime s’est lentement développé. Ce camp du Bien avait une mission : faire en sorte que le citoyen ne soit plus jamais discriminé, d’une façon ou d’une autre.

Le camp du Bien ne recula devant aucun sacrifice, surtout si, pour ces sacrifices, il s’agissait de piocher dans le vivier inépuisable des individus méprisables du camp du Mal.

Dans ce dernier camp, il y avait, notamment, ceux qui avait l’impudence de ne pas se fondre volontairement dans la masse, ceux qui, justement, n’avaient pas compris tout l’indispensable bonheur d’une parfaite homogénéisation avec les autres, ceux qui, en substance, continuaient de présenter de bêtes aspérités méchantes qui piquent.

À commencer par la religion, bien sûr.

Dérive malheureuse d’esprits pas assez citoyens, clairement pas suffisamment festifs et en tout cas malencontreusement poussés à croire en d’autres voies impénétrables que celle de l’administration étatique, ces pauvres êtres frustres avaient la fâcheuse manie, ostentatoire de surcroît, de coller leurs croyances sous le nez des citoyens normaux, même lorsque ces derniers baissaient pourtant la tête sous le joug que l’état leur imposait dans son immense sagesse.

Cette dernière phrase est certes longue, mais voilà, c’est comme ça : la religion n’est pas en odeur de sainteté dans les administrations françaises. Mieux : la laïcité ne supporte pas la religion. Si l’on s’en tient à tout ce qu’en dit la presse, elle ferait même des boutons à son approche, et aurait des démangeaisons législatives fulgurantes si on prolonge l’expérience.

Pour ceux qui ne le savent pas, la laïcité est un concept aux propriétés physiques étonnantes puisque c’est à la fois fumeux, élastique, compressible, invisible, incolore, inodore, sans saveur mais très irritant en cas d’exposition à la lumière. Et surtout, lorsqu’un politique s’en empare, immédiatement, cela devient explosif.

Et quand c’est un type qui, justement, vient de passer de l’ombre à la lumière, le résultat est explosif et irritant. Ce type, rigolo comme un croupier de casino, c’est Guéant.

Guéant, il est géant

A mes plus jeunes lecteurs dont la dyslexie pose problème, je dois dire que non, ce n’est pas le monsieur qui a donné le nom à la chaîne d’hypermarchés, même s’il nous vend, lui aussi, ses salades à prix discount depuis quelques semaines suite au dernier remaniement ministériel.

En gros, le nouveau ministre de l’intérieur rayon grosses légumes, paniers à salades et aubergines n’a rien trouvé de mieux à faire que déclarer, je cite :

Les agents des services publics évidemment ne doivent pas porter de signes religieux, manifester une quelconque préférence religieuse, mais les usagers du service public ne doivent pas non plus.

Je tiens tout de suite à préciser qu’il n’avait pas bu et n’avait pas l’excuse facile de la fatigue qu’une Duflot nous a pondu sans honte pour justifier ses saillies sur un Japon situé dans l’hémisphère Sud.

Si l’on met les sous-titres, en l’espèce, notre aimable cucurbitacée à lunettes voulait faire comprendre que les musulmans qui émettent des exigences sur la façon dont leurs soins sont administrés n’ont, en réalité, pas ce droit. Et l’ex-préfet bombardé ministre d’expliquer ensuite que, je cite toujours :

Nous savons bien que nos compatriotes sont très choqués par l’organisation de prières dans la rue, et ce n’est pas non plus une situation facile à vivre pour les musulmans. Il ne faut pas une loi, il n’est pas question de faire des lois, il suffit de décrets parfois ou d’instructions.

On comprend l’irruption cutanée qui s’en est suivie dans les rangs de la majorité (les socialistes de droite), l’opposition (les socialistes de gauche), les écolos (les socialistes bio-compatibles) et les communistes (les ultra-socialistes) : tout le spectre politique s’est agité d’un bond en entendant ça. Tout, sauf bien sûr le Front (les socialistes-nationaux), dont les fonds de tiroir sont précisément remplis de ce genre de saillies.

Egalité, Taxes, Bisous : République du Bisounoursland

En Bisounoursie, le politiquement incorrect, c’est plus qu’une erreur, c’est un affront, une déclaration de guerre. D’autant que ce politiquement incorrect se double ici d’une analyse de société comme à son habitude trempée dans des barils d’étatisme et de vivrensemble que d’ingambes associations s’emploient à injecter à l’hectolitre par les pipelines de la subvention et des actions en justice pour déviance de pensée.

Tous les éléments sont donc réunis pour une bonne polémique où l’on débattra violemment sur la place de l’Islam en France, sur la laïcité et l’absolue nécessité pour la République de faire fermer leur gueule aux croyants, fussent-ils non pas ornés d’une croix, mais d’un croissant. On notera au passage le silence compact sur la religion juive, jamais incluse dans le débat.

On en vient même à lire de consternantes absurdités (celle narrée par l’Hérétique vaut son pesant d’hosties non consacrées) dont le fond est toujours le même : la République ne peut plus tolérer le goupillon, la cornette, la burqua, le tchador, la kippa, le crucifix, le turban, la soutane, la djellaba, les pattes de lapin ou les motos russes.

L’ultralaïcité en mode maxi-G(u)éant !

Pour le string apparent, en revanche, c’est ok.

Guéant a beau jeu de préciser qu’il n’y a pas besoin de légiférer (et qu’on se contentera de travailler du décret, pour changer). En réalité, les associations et autres combattants de l’aplanissement intellectuel ont gagné puisque l’essentiel est oublié.

L’essentiel, c’est de se souvenir qu’il n’existe aucun droit d’aller dans un hôpital et demander un traitement différent des autres ; la magie du collectivisme est passée par là puisque l’hôpital, public, doit à la fois accepter tout le monde (et au moins ceux qui payent des impôts) et ne doit discriminer personne, tout en n’offrant aucun traitement de faveur ; aucune échappatoire à ces ordres paradoxaux. Le grippage de la machine étatique est en marche.

L’essentiel est de ne pas oublier qu’il n’existe aucun droit d’aller dans une école et demander un traitement de faveur, différencié, tenant compte de ses spécificités ; là encore, la tendre magie du Ta Gueule, C’est La République a opéré avec munificence et l’école doit à la fois accepter tout le monde, ne discriminer personne et faire absolument pareil pour tous, « performances » scolaires en sortie comprises. Échec garanti sur facture.

Et dans le spectre politique, socialiste jusqu’à la nécrose, personne n’entend le discours simple et de bon sens des libéraux.

Les croyants veulent des traitements spéciaux dans les établissements de soins, dans les écoles ? Laissez-les reprendre leurs responsabilités, libéralisez les domaines correspondants !

La vraie laïcité ne consiste pas à renvoyer la religion de chacun dans la sphère la plus intime possible qui consiste essentiellement à leur fermer le clapet, mais à laisser, partout où c’est possible et souhaitable, les individus décider pour eux-mêmes, à diminuer le champ d’intervention de l’état.

Guéant, comme tous les autres, ne vise qu’à l’augmentation de ce champ d’intervention, déjà enflé jusqu’au point de rupture (avez-vous noté les lignes de failles, qui s’agrandissent chaque jour ?). Et ce faisant, il n’obtiendra jamais que ce que tous les autres ont déjà obtenu : moins de responsabilité individuelle, moins de laïcité, plus d’état, plus de problèmes insolubles, plus de tensions.

Ce pays est foutu.
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