Conte soufi : Je ne sais pas

Quand on lui posait une question, Nazinda, derviche errant de Boukhara, répondait souvent : “Je ne sais pas.”

À Allahabad une discussion s'engagea entre ceux qui disaient qu'un maître ne devrait jamais avouer son ignorance, ceux qui pensaient que celui-là était, de son propre aveu, ignorant, et que cela ne valait donc pas la peine d'en parler, et ceux qui soutenaient divers autres points de vue.

Les arguments des uns et des autres furent soumis au pandit hindou Ram Lai, qui fit ce commentaire :
   “Quand il dit “Je ne sais pas”, il peut vouloir dire que personne ne sait. Il peut vouloir dire, aussi, que vous ne savez pas : à ce moment-là, il vous renvoie à vous-mêmes. Il peut vouloir dire qu'il n'a pas besoin de savoir, parce que la question, ou la réponse, est fallacieuse.
   - Pourquoi ne s'exprime-t-il pas de façon plus explicite ? demanda quelqu'un.
   - S'il le faisait, dit le pandit, il cesserait de provoquer la réflexion et la discussion.”

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