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Etat chronique de poésie 1172

Publié le 29 mars 2011 par Xavierlaine081

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1172 

A ceux qui passent leur vie en exégèses, oubliant de créer la leur, dans l’ombre des maîtres qu’ils vénèrent, je dis qu’il est l’heure du réveil. 

Il est temps de se lever, quitter les oripeaux tant portés et élimés, de se charger du cadeau des anciens, non pour en déterminer l’âme, mais pour vous en imprégner, non pour en réciter les vers sur un ton monocorde, mais pour vous en approprier la substance. 

Quittez donc ces austères cellules où vos yeux se fatiguent à tenter de lire entre les lignes le signifiant, le signifié, le fil et la couture. 

L’écriture qui éclate à vos yeux ne serait pas sans un soleil, sans une source, sans le sourire d’une fleur, sans le bourdonnement d’une ruche, et le souffle du vent sur les blés à peine germés. 

Rien à voir avec ce que vous cherchez, loupe rivée à votre visage terne, muscles bandés dans l’effort de comprendre le pourquoi du comment de la moindre subtilité de langage. 

Il est un univers que vous perdez de vue, tandis que vous passez et repassez sur les mêmes pages, les mêmes noms qui sont vos dieux immuables. 

Que ceux-là aient su faire « œuvre », sans doute en seraient-ils les premiers surpris, si d’aventure ils avaient le pouvoir de revenir. 

Ils seraient étonnés que l’on trouve tant de chose à écrire sur une seule de leurs proses. 

Que les méandres de nos inconscients parlent par la plume qui s’agite, nul n’en niera l’évidence. 

D’en avoir conscience nous conduit à moduler, à tricher, à maquiller pour ne point tomber, chose si courante dans la littérature contemporaine, dans une crise de narcissisme aigu. 

Ce que vous lisez et décortiquez comme les singes décortiquent une banane, ou une coque de cacahuète, n’a rien d’évidemment simple, tant le monde est intégré à nos sens, nos sens à nos pensées qui y lisent bien autre chose, qui en filtrent l’eau pour en éliminer les scories indésirables, les pollens inopportuns, les sables ternes et les horribles poussières. 

Voilà que les pages écrites depuis la nuit des temps ne sont que témoignage indirect de qui nous fûmes, longue litanie sur qui nous pourrions être, si le temps n’achevait pas de son épée tranchante les questions, avant même d’en avoir éludé la moindre réponse. 

Je préfère ne pas imaginer les longues logorrhées en propos illisibles pour le commun que ma prose diarrhéique pourrait provoquer dans vos esprits à l’affût du moindre soubresaut de l’âme. Bien que, je vous entend en nier le terme pour subrepticement le remplacer par un autre, qui fasse plus « scientifique » au yeux de votre communauté jalousement gardée. 

Pas d’inquiétude, Mesdames et Messieurs : le patient vit encore, son cerveau, sans que nul ne puisse savoir comment il s’y prend, ne cesse de crier de mots en mots, ce que l’esprit cherche chez les autres à défaut de prendre un instant pour le trouver en lui-même. 

L’heure est au réveil donc : réveillez-vous. 

Prenez le chemin d’une plume libre de toute entrave, mais nourrie de ce que tant d’autres ont bien mieux que vous énoncé ; libérez-vous de cette catéchèse doctorisante, et prenez le sésame du cœur, pour ouvrir les vannes de votre propre création, de votre propre rébellion, votre chemin d’insoumission aux normes établies. La littérature attend autre chose de vous que ces mémoires qui, inexorablement, iront prendre la poussière en quelques tiroirs d’oubli. 

Manosque, 28 février 2011

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