Il est des choses que l’on accepte des publicitaires et d’autres non. La nudité dans les publicités vendant des produits de soins ou d’hygiène est d’une banalité déconcertante dans notre pays alors qu’elle est plus rare aux USA. Eminemment érotique, cette monstration du corps (le plus souvent féminin) en dit long sur le spectateur-voyeur, sans tomber dans la vulgarité pour autant. L’objectif n’est pas la nudité pour elle-même. Tout est suggéré pour rendre la publicité encore plus marquante. On ne joue ici que sur l’imagination. Elle lance le spectateur vers un objet, créant un lien de désir vers la chose en question. Le désir pour la femme (toujours belle et mince) se transmet immédiatement à ce qui est vendu.
Notons par la même occasion que l’utilisation de la femme nue ne cible a priori pas les clients masculins. En effet, la cible principale reste encore la ménagère de moins de 50 ans et la tranche horaire majoritaire en termes d’investissements reste la journée (40% des investissements publicitaires des marques d’hygiène beauté visent la journée contre 31 % pour le prime time sur les années 2008 à 2011). C’est l’imagination de la femme qui souhaite être aussi attirante que la demoiselle dénudée sous nos yeux qui est utilisée. Ce choix est tiré d’une étude scientifique américaine selon laquelle la femme a tendance à se voir sous l’œil de l’approbation.
La publicité est elle à critiquer pour cette utilisation ? Depuis des siècles, le corps féminin est utilisé dans des œuvres artistiques. Fresques et sculptures ont laissé la place aux films et clips dans la culture populaire. Le culte du corps humain et de sa beauté n’est pas nouveau. On peut tout de même être outré de cette « mise en argent » du corps. Toutes les œuvres artistiques doivent représenter les sociétés desquelles elles sont tirées. Si le cinéma est le 7ème art, la publicité ne peut qu’être comprise comme une partie de celui-ci. Une œuvre particulière certes mais une œuvre tout de même. Si l’on décrypte une publicité avec autant d’attention qu’une peinture, si l’on considère qu’il existe une bonne publicité et une mauvaise… alors la publicité contient un pan artistique (sans dire que c’est de l’Art non plus). De même, on oublie souvent que le peintre peint aussi pour gagner de l’argent. Pour autant, l’influence de la publicité sur le spectateur, trop souvent passif devant son écran, peut poser problème. Ainsi, Jean Luc Godard lorsqu’il traite de son film Une Femme mariée tient ces propos : « Si j’ai montré la place que tiennent les publicistes dans la vie de cette femme, c’est parce que certaines formes de publicité deviennent à la limite la propre pensée de gens : il y a identification entre les modèles qu’on leur propose et eux-mêmes ». La question qui se pose est celle-ci : Le publicitaire crée t’il des modèles de femmes ex nihilo ou utilise t’il les fantasmes des femmes ?