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Les réseaux de poker en ligne sont encore opérationnels

Publié le 16 avril 2011 par Alain Dubois

FoudreDepuis 13:30 heures (16 avril 2011, heure de New York), les noms de domaine (.com) des sites indépendants PokerStars et Full Tilt Poker ainsi que du portail Absolute Poker du réseau amérindien Cereus (basé à Kahnawake) ont été saisis par le « U.S. Attorney » et le F.B.I. (voir le communiqué de presse officiel). Les visiteurs sont redirigés vers une page d’information du F.B.I. et du ministère de la Justice. Onze fondateurs de ces sites ont été arrêtés ou sont sous mandat d’arrêt. Bien qu’aucun compte de joueur n’ait été saisi, pour leur preuve, les autorités se sont accaparées de 76 comptes bancaires utilisés par les gestionnaires. Les charges concernent des fraudes bancaires, des activités illégales de jeu et du blanchiment d’argent.

Les sites offshores viennent-ils d’être mortellement atteints? Pas vraiment! L’événement ne concerne pas tant l’existence du jeu en ligne que le respect territorial des lois américaines.

La saisie des noms de domaine entrave l’acquisition de nouveaux clients, car le téléchargement du logiciel de jeu requiert cet accès. Mais, ceux qui possèdent déjà ce logiciel peuvent se connecter directement sans passer par le portail … à l’exception près que les adresses IP en provenance des États-Unis sont maintenant refusées par les opérateurs. Dans ce contexte, le site pokerscout signale une diminution de 25% du trafic sur PokerStars, 13% sur Full Tilt Poker et 23% sur Cereus par rapport à la semaine dernière. Peut-être conséquemment, Party Poker est en hausse de 4%.

Les filiales françaises (.fr) ou italiennes (.it) ne sont pas bloquées. Par contre, n’étant que des redirections vers les (.com), les extensions (.ca) aboutissent aussi à la page du F.B.I. et du ministère américain de la Justice. Les activités sur l’île du Man, en Ireland et à Kahnawake se poursuivant, les redirections, hors États-Unis, devraient se rétablir rapidement vers un site possédant un autre nom de domaine.

Cette initiative des autorités américaines n’est pas un coup de tonnerre dans un ciel bleu. L’UIGEA a été adopté le 13 octobre 2006, mais les règlements gouvernant l’application de la loi n’ont pas été finalisés avant juin 2010. L’événement était attendu, bien que plusieurs commençaient à douter qu’il ne survienne un jour.

Des observateurs attentifs ont noté que le dépôt des charges est survenu, à quelques heures près, exactement un an après l’arrestation d’un citoyen australien appelé Daniel Tzvetkoff qui, peu de temps auparavant avait fait faillite aux États-Unis. Une enquête a démontré que Tzvetkoff a participé à l’établissement de pratiques bancaires illégales aux États-Unis par lesquelles des banques masquaient des transactions, au profit des sites de jeu en ligne, en les répertoriant comme étant des achats de biens qui n’ont jamais existé.

Arrêté au Nevada le 16 avril 2010, Tzvetkoff a rapidement obtenu un jugement ordonnant une libération conditionnelle. Il n’en a jamais profité car il a été transféré à New York d’où origine la présente action des autorités américaines. Le 23 août 2010, Tzvetkoff aurait été libéré en secret. L’homme aurait négocié sa libération en échange d’informations permettant d’incriminer certains des fondateurs des sites de poker en ligne.

Dans ce contexte, on peut présumer que les dirigeants de PokerStars, de Full Tilt Poker et du réseau Cereus ne sont pas pris par surprise par les charges déposées hier. On peut s’attendre à des impacts minimisés sur les opérations de ces plateformes de jeu. Les dirigeants ont eu 12 mois pour se préparer.

Outre l’accusation d’avoir organisé des activités de jeu illégales en sachant que c’était illégal de le faire, les compagnies sont accusées, dans un premier temps, d’avoir frauduleusement menti aux banques alors que la loi les obligeait à divulguer la nature des transactions bancaires; ce qu’elles n’ont pas fait. Plus récemment, les compagnies auraient cessé de mentir aux banques en raison du système développé notamment par Daniel Tzvetkoff. Des gestionnaires de banque acceptaient de maquiller les transactions en échange d’investissements se chiffrant en millions de dollars. Les compagnies sont alors accusées, en un deuxième temps, de blanchiment d’argent.

À noter que l’accusation de blanchiment d’argent ne consiste pas à utiliser les établissements de jeu pour blanchir les revenus classiques du crime organisé comme c’est le cas notamment lorsque des criminels utilisent les casinos afin de prétendre y avoir gagné leur fortune. Cette fois, c’est l’argent du jeu qui devait être blanchi par des achats fictifs de biens. Il importe de ne pas confondre entre ces deux situations. Une implication significative du crime organisé dans le jeu en ligne n’est pas encore raisonnablement établie.

Maintenant, que peut-il survenir? À court terme, il sera intéressant d’observer si les compagnies ont la liquidité pour payer les joueurs qui demandent à retirer les fonds de leur compte. À moyen terme, les joueurs vont certainement réaliser qu’aucun joueur n’a été fraudé, et que les accusations ne concernent pas la collusion-cliché avec le crime organisé. À plus long terme, les compagnies risquent de se défaire des individus problématiques et prétendre ensuite être prêtes à respecter la fragmentation territoriale du marché. Loin d’annoncer l’agonie du poker en ligne, les événements du 16 avril pourraient favoriser, aux États-Unis, une légalisation semblable à ce qui est survenu en France et en Italie. Les compagnies devront alors segmenter et adapter leurs activités en fonction des états.


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