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Affaire Renault : de l'IE au management

Publié le 17 avril 2011 par Egea

Cela a commencé comme une affaire d'espionnage industriel, c'est dorénavant une affaire managériale. L'affaire Renault montre d'étonnantes évolutions.

Affaire Renault : de l'IE au management
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1/ Tout commence par une affaire d'espionnage industriel. On a beaucoup entendu des experts de l'intelligence économique, qui se sont répandus dans les médias. Curieusement, on les entend moins, aujourd'hui, l'avez vous remarqué ?

2/ Pourtant, ce qui vient de se passer récemment chez Safran prouve, s'il en était besoin, que la menace est une réalité, dans l'industrie française. On ne saurait donc critiquer Renault de son souci de se protéger. La leçon est clairement sur la méthode : dans les affaires grises, les intervenants sont difficilement contrôlables. La question de la qualité totale est alors posée. Les chartes déontologiques servent de peu.

3/ En revanche, Renault est critiquable pour sa méthode : non contrôle de la chaine de la sous-traitance, mais aussi volonté de "régler le problème en interne", sans en parler aux autorités, et en rendant publique l'affaire. Sur les quatre points, il y a erreur.

  • contrôle de la chaine de la sous-traitance : car elle existe en IE, ce qui n'est pas forcément dit par les professionnels : c'est peut-être la principale leçon de l'affaire Renault. Précisons immédiatement : cette "chaîne qualité" est extrêmement difficile à obtenir, et plus encore à garantir. Je connais des professionnels qui refusent d'aller sur le secteur, malgré leur métier proche et les demandes de leur clients, pour cette seule raison de la non-maîtrise de la qualité. J'espère que dans les grandes écoles d'IE, on tirera cette leçon là de l'affaire Renault.
  • règlement en interne : on comprend la volonté d'une action managériale : encore faut-il qu'elle s'insère dans une politique confirmée de management, qui a visiblement démontré ses contradictions. Ou encore, entre un top management, aux soucis planétaires et sans considération empathique, et un middle management qui n'a pas cette hauteur de vue et qui donc rase les couloirs, il y a un fossé béant. Surtout quand la direction assure, pendant des semaines "faites nous confiance, nous avons les preuves" et qu'on s'aperçoit, finalement, que ce n'était pas vrai. La confiance a disparu, et elle mettra des années à se reconstruire. Or, les entreprises devraient comprendre que la confiance interne est un facteur de production essentiel .
  • mutisme envers les autorités, ce qui est doublement fautif, quand on est une société française (je sais, on peut débattre de la nationalité des firmes), mais aussi quand son actionnaire principal est l’État : c'est, à tout le moins, discourtois.
  • en rendant publique l'affaire : on a bien compris l'intention initiale : montrer qu'on ne se laissera plus faire, et fabriquer une image de protection des process alors que la compétition technologique (et IE) est particulièrement vive. Oui, mais... raté, et du coup contre-productif. Je serais malveillant, je me dirais que c'est le moment ou jamais d'aller espionner Renault, car qui, dorénavant, osera dénoncer un fait "bizarre" dans la RNUR ?

4/ On l'aura compris : l'image (donc le goodwill : la valorisation des actifs intangibles de la marque, sa capacité à se développer demain à partir de ses déterminants propres) de l'entreprise est atteinte. C'est qu'une entreprise, ce n'est pas seulement de la technologie ou de la finance, c'est aussi de l'intangible, qui se maîtrise par du management. Le départ du numéro deux signifie clairement cette réalité. Dommage : c'était celui qui visiblement inspirait le plus confiance et avait le plus le goût de l'automobile...

Réf : on lira ce passionnant reportage du Monde sur l'affaire Renault.

O. Kempf


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