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Le nucléaire a-t-il encore un avenir ?

Publié le 18 avril 2011 par Seb322 @nordbretagne
Le nucléaire a-t-il encore un avenir ? Après Fukushima, assistons-nous à la fin d'une "nuclé-ère" ? La France, dont 77 % de l’électricité est d’origine nucléaire, a depuis longtemps fait ce choix énergétique.

La Bretagne est l'une des rares régions a en avoir rejeté la production tout en acceptant le paradoxe d'en importer en grande quantité. Etat des lieux pour comprendre la situation de l'atome sur la scène internationale. Premier volet de notre trilogie dédiée au "nucléaire", alors que l'on fête le triste anniversaire des 25 ans de Tchernobyl.



Le Japon n’en finit pas de gérer la « catastrophe nucléaire majeure » de Fukushima. Selon l’Autorité française de sécurité nucléaire (ASN), où « la situation reste grave est précaire, et les rejets radioactifs se poursuivent. »
Quelle que soit l’évolution de la situation, le Japon aura à gérer, dans la durée, les dépôts de radioactivité consécutifs à ces rejets.
Selon la Commission de recherche et d’informations indépendantes sur la radioactivité (Criirad), d’importantes doses ont d'ores et déjà contaminé la chaîne alimentaire (eau, lait, œufs…). Celles-ci pourraient conduire à terme, à « une hausse du risque de cancer », comme ce fut le cas lors de l’accident de Tchernobyl, il y a tout juste 25 ans. Quel que soit le dénouement -dont la gravité est désormais classée niveau 7 (soit autant que Tchernobyl)- indéniablement, comme le souligne Areva, fleuron français de l’industrie nucléaire : « Dans tous les pays qui étudient actuellement les conditions d'une reprise du nucléaire, celle-ci va être nécessairement plus difficile à concrétiser ».
Pour l’industrie, il y aura bien un avant et un après Fukushima. Pour les populations également...

Un débat relancé dans le monde

Après avoir construit 54 réacteurs nucléaires en un demi-siècle -par souci d’indépendance énergétique- le Japon, troisième puissance nucléaire civile, aura bien du mal à éviter un débat sur les risques nucléaires, une fois la situation stabilisée. Un débat, qui partout ailleurs, a d’ores et déjà commencé à agiter les passions.

Comme en France, où les écologistes, dont Corinne Lepage, Daniel Cohn Bendit et Cécile Duflot, réclament un « grand débat national » sur ces questions, voire même un référendum sur l’énergie nucléaire. Quant au gouvernement, par la voie d’Eric Besson, le ministre de l’Industrie, il assure « ne pas vouloir remettre en cause ce choix stratégique opéré depuis des décennies » et mettre en place au plus vite « une évaluation liée à la sûreté de chaque réacteur nucléaire. » L’objectif : « tester leurs capacités de résistance face au risque sismique et aux inondations. »

Paradoxalement, jusqu’à cette catastrophe, l’énergie nucléaire semblait promise à un bel avenir, au regard de la flambée des prix du pétrole et du récent classement de cette énergie au rang de « source décarbonée », par l’Union européenne. Ce qui lui confère désormais un rôle de premier plan dans la lutte contre les gaz à effet de serre, au même titre que les énergies renouvelables - et ce alors que les centrales émettent de la vapeur d'eau qui est en outre un des gaz à effet de serre.
Preuve de la bonne santé du secteur, en février dernier, Areva envisageait de vendre des réacteurs à la Chine, à l’Inde ou encore à l’Afrique du sud. Et des contrats étaient en cours de négociation pour des projets de centrales en Italie, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

Des centrales en "excellent état", selon M. Proglio

Dix-sept pays avaient par ailleurs demandé un agrément à l'Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour construire leurs premières unités. Aux rangs desquels le Chili, à fort risque sismique ou encore le Bangladesh, contrée soumise au risque d'inondations. Selon plusieurs analystes bancaires qui observent la chute de la côte d’Areva -dont la Société générale- tous les contrats en cours de négociation « risquent maintenant d’être annulés ou reportés ».

D’ailleurs, le patron du groupe indien NPCIL, Sheryans Kumar Jain, commanditaire de deux EPR, vient de déclarer à l'AFP que « l’accident au Japon pouvait être un gros frein au programme nucléaire indien ». L’Allemagne vient pour sa part d’annoncer un moratoire de trois mois sur la construction de nouvelles centrales (certains y voyant une simple manoeuvre « politicienne » avant les élections) et la Suisse semble en bonne voie pour organiser un vote populaire en ce sens avant l’été. Des annonces encore symboliques mais qui donne le « la » des futures discussions politiques autour de l’atome, notamment à l’échelle européenne.

Pour François Fillon, le premier ministre français se voulant rassurant, « la France ne pourra exporter de centrales nucléaires que dans des pays qui auront atteint un niveau de développement et de maîtrise technologique suffisants, pour faire face à des évènements du même genre que ceux auxquels on assiste ».

Le Japon, qui représente 7 % du chiffre d’affaires d’Areva, l’un des principaux constructeurs de centrale au monde, et peut-être l’un des plus en pointe en matière de technologie nucléaire, pourrait-il réellement ne plus faire partie des futurs clients d’Areva? L’Archipel projetait pourtant de construire 14 réacteurs supplémentaires dans les années à venir... A moins que le géant de l'atome -récemment encensé par le « journaliste » Nelson Montfort pour les mondiaux d'Athlétisme- ne se mette à devenir le numéro 1 de la déconstruction des centrales nucléaires ? L'exemple de Brennilis laisse tout de même sceptique...

Quelles alternatives au nucléaire ?

Le contexte polémique relance donc, de fait, le débat sur le nucléaire en France et dans le monde, à l’heure où près de 10 000 personnes ont manifesté sur le pont de Chalampé, à la frontière franco-allemande, le mois dernier, en faveur de la fermeture de la centrale alsacienne de Fessenheim, la plus vieille du parc français (et la plus exposée aux risques selon les antinucléaires). Alors est-il vraiment envisageable de « sortir du nucléaire », comme le scandent ces manifestants et comme l’ont essayé les allemands par le passé ? Mais pour quelles alternatives et à quel prix ?

« Impossible de sortir du nucléaire soutient le gouvernement, du moins si la France souhaite conserver une électricité bon marché ». Pour les écologistes, dont l’association Sortir du Nucléaire, « seul le développement des énergies renouvelables à grande échelle (éolien, solaire, hydraulique, bois…), associé à une ambitieuse politique d’économie d’énergie, peut permettre de prendre le relais du nucléaire d’ici 25 ans ».
Mais à quel prix ? Difficile à dire puisqu’actuellement « il y a une véritable opacité sur le vrai prix de l’énergie, souligne Corinne Lepage, présidente de Cap 21. Il est impossible à ce jour de comparer réellement les sources énergétiques », regrette-elle. Coût de production certes, mais aussi de démantèlement des centrales, coût de gestion des 55 000 mètres cube de déchets produits chaque année, coût de la recherche et développement depuis la seconde guerre mondiale, aide à l’exportation…

Quoiqu’il en soit, comme l’a expliqué l’égyptien Mohamed El-Baradeï, ancien directeur de l’AIEA dans un rapport antérieur à la catastrophe de Fukushima : « la part future du nucléaire dans le bouquet énergétique mondial dépendra pour beaucoup des innovations, en l’occurrence de la mise au point de nouvelles conceptions de réacteur et de nouvelles technologies du cycle du combustible. Afin d’être couronnées de succès, ces technologies innovantes devront répondre aux préoccupations liées à la sûreté nucléaire, à la prolifération et à la production de déchets, tout en permettant de produire de l’électricité à des prix compétitifs. » Mais surtout, peut-être, de l'acceptation citoyenne de cette énergie atomique ! Thème de notre prochain volet...


Un article réalisé par Julien Dézécot pour notre partenaire Bretagne Durable, www.bretagne-durable.info

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