Les médias sociaux ont-ils besoin de conversation ?

Publié le 19 avril 2011 par Lilzeon

Citoyens !

Un post ce matin chez Naro relayant les propos du Godfather de l’influence digitale en France, Eric Maillard mérite un débat sur la notion même de “conversation”

“l’engouement des agences et des annonceurs pour l’influence digitale était parfois exagérée, au point d’occulter les prises de paroles sur d’autres médias ou les autres, anciens (vrais?) réseaux d’influence classique qui permettent à une entité, une marque, une institution de rétablir un point de vue.”

En orchestrant un mythe du “tout conversationnel“, on en a oublié certains fondamentaux : d’abord certains sujets ne méritent pas de conversation ; certains autres ne peuvent pas être discutés ; enfin les médias sociaux n’ont pas et ne sont pas que phrases tweetées, bloguées ou “postées”.

Les médias sociaux sont “individus A” interagissant avec “individus B” (volontairement ou non)

C’est probablement le grand changement de paradygme concernant les médias sociaux : si l’on considérait les médias sociaux pendant ces dernières années comme “des gens qui parlent à d’autres gens par le biais d’une technologie“, force est de constater que la définition s’est élargie. Dans un univers où une minorité d’actifs produisent du contenu mais où une majorité de passifs laissent des traces empoignables par les marketeux, la définition du Social Media intègre forcément les interactions “involontaires” entre groupes d’individus.

Et là se pose un nouveau chemin de prescription : ce n’est plus seulement en une connaissance ou en un “ami” que nous faisons confiance mais à un centre d’intérêt où des anonymes peuvent se retrouver et nous apporter de la valeur. Je ne vais donc pas entrer en conversation direct avec eux (et aller boire un café) mais bénéficier de leurs échanges pour faire derrière un choix (aller à la boutique, aller au restaurant, en parler en “off“).

De fait, cette “socialisation” de nos choix démarre aussi avec le moteur de recherche. Tu n’es plus seulement ce que Google dit que tu es (Wired), tu fais ce que Google te dit qu’ils font.

Du média “social” à la “social street” : le social media marketing comme activité support à un “core business”

Qu’on se le dise : la notion de média a sans doute trop de connotations relatives aux espaces “magazines” ou “blogs”. Donc à la fonction de publication de contenus singés sur celui d’éditeurs historiques (journalistes, écrivains…).  En fait, ces espaces sont marginales par rapport à l’impact du “social” dans nos vies ; on nous invite à “check-in” sur Foursquare et à donner des conseils à des anonymes. On QR codise dans l’abri-bus ; on publie un statut Facebook lors d’un concert. Autant d’actions qui vont appeler une interaction par des groupes d’individus, connus ou non.

Dès-lors, on peut simplement rappeler ce qui est désormais une évidence : le social media seul ne sert à rien ; il est par contre à adosser à des “core businesses”. Si je fais des RP, comment injecter du Social Media pour maximiser mon approche influence naturelle ? Si je fais de l’événementiel, comment injecter du Social Media pour multiplier l’expérience, pré/pendant/post event ? Si je fais de la publicité, comment injecter du “Social” afin de propulser plus en profondeur mes objectifs de conversion, par exemple.

Et si le Social n’était que le pendant modernisé du marketing interactif ?

Deighton (Harvard Business School) donnait en 1996 la définition référente du marketing interactif :

“the ability to address an individual and the ability to gather and remember the response of that individual” leading to “the ability to address the individual once more in a way that takes into account his or her unique response”(Deighton 1996).”

En clair : on se rendait déjà compte que l’enjeu n’était plus seulement les coûts de transaction à orchestrer au sein des organisations mais bien les coûts de coordination, à savoir : faire descendre les data pour essayer sur toutes les fonctions de l’entreprise de transformer ces connaissances en interfaces de valeur. On s’est rendu compte que l’interactive marketing a souffert de mêmes travers liés à la “modernité”, ce qui a voulu dire beaucoup de projets d’énormes sites web avec un énorme CRM. Ca vous rappelle les médias sociaux ? BINGO ! Qu’il est beau mon dashboard, et qu’en faire derrière ?

L’interactive marketing étant né juste avant la “libération” des moyens d’expression, on l’a quelque peu oublié…Pourtant, le marketing relationnel pourrait bien faire son grand come-back : la relation n’est plus seulement sur de la data d’achat, de parcours, de search ; elle est désormais partagée, et c’est en ce sens que le Social Media va servir ce marketing interactif plus que jamais : organiser dans cette démocratie de la réputation le partage des dividendes, mettre en place les conditions d’addressabilité des publics et essayer de les comprendre en injectant le social monitoring aux pratiques de planners, directement ou indirectement…

De beaux sujets business qu’on va aborder aussi à l’ESCP Europe la semaine prochaine (mardi) avec une problématique intéressante : pourquoi aussi peu d’étudiants en école de commerce se lancent-ils dans l’aventure du marketing interactif ?