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Henri Guaino sarkonne un max au sujet du dramatique accident de Chelles

Publié le 21 avril 2011 par Kamizole

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Pour Guaino, le chauffard de Chelles mérite la prison à vie (Le Figaro du 17 avr. 2011). Encore une fois, et comme d’habitude avec Nicolas Sarkozy : “un fait-divers dramatique : une loi”… Comme si cela pouvait régler les problèmes ! Claude Guéant y est donc allé de son couplet sur Canal +.

«S’il est avéré qu’il conduisait sans permis et en état d’ivresse, et qu’en plus il avait récidivé dans ce domaine, je crois que cet homme est un criminel qui ne devrait jamais sortir de prison de toute sa vie (…) Ce qu’il a fait en fauchant ces vies innocentes est quelque chose d’insupportable, il s’est mis en situation de tuer délibérément».

Mais quand bien même Nicolas Sarkozy voudrait-il changer la loi, elle ne s’appliquerait pas à ce chauffard en vertu du principe constitutionnel de non rétroactivité des lois pénales pour les affaires non jugées (lorsqu’elles sont défavorables aux prévenus). L’article rappelant opportunément que la perpétuité est réservée aux homicides volontaires jugés en Cour d’assises (l’élément intentionnel étant un des piliers du droit pénal) alors que la conduite en état d’ébriété constitue un homicide invo-lontaire et comme tel, relevant du tribunal correctionnel. La peine maximale de prison encourue étant de trois ans, récemment portée à 10 ans par la loi LOPSI 2 en cas de cumul de circonstances aggravantes, ce qui est à l’évidence le cas dans cette espèce : récidive de conduite en état d’ébriété et conduite sans permis.

Je suis certainement autrement indignée et bouleversée par un tel fait divers que ne le sera jamais – réellement - Nicolas Sarkozy dont on sait bien qu’il n’éprouve aucunement la compassion qu’il affiche – se souvenir que c’est l’homme qui rit dans les cimetières - et qu’il n’a d’autre sujet de préoccupation que lui-même. J’ai trop côtoyé la maladie et la mort et s’il y a une chose à laquelle je n’ai jamais pu me faire c’est bien la détresse de ceux qui perdent un être cher. Je ne peux garder ni le cœur ni les yeux secs.

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J’ai lu depuis avec un malin plaisir qu’un syndicat de magistrat s’émeut des propos d’Henri Guaino sur le chauffard de Chelles (20 minutes, 18 avr. 2011). Il s’agit en l’occurrence du Syndicat de la Magistrature (SM) qui n’y va pas avec le dos de la cuiller. S’émouvant de ce «qu’il y ait tout dans ce “jamais !” : le vol de la souffrance et de la parole des victimes, immédiatement dépossédées de leur histoire par les professionnels du storytelling répressif et réduites au rang de prétextes ; le vieux fantasme de l’élimination des “irrécupé-rables”».

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Qu’Henri Guaino fut “la Voix de son maître” m’a d’emblée paru tellement évident – il reprend le flambeau de Claude Guéant qui multipliait les interventions dans les médias et les communiqués de presse lorsqu’il fut secrétaire général de l’Elysée – que je ne suis pas surprise de lire ce qu’analyse Paul Bacot, professeur de science politique à l’Institut d’études politiques de Lyon «C’est une voix indirecte de l’Elysée: une voix proche s’exprime, commente un point de vue, sans que les mots soient imputables au chef de l’Etat». Personne n’est dupe, quand même ?

Les magistrats retournent plaisamment le compliment à Henri Guaino, estimant qu’il s’érige en «juge de gouver-nement», indiquant qu’il «n’en est pas à son coup d’essai : en novembre 2008, il avait qualifié de «parfai-tement incongrue, scandaleuse, moralement inaccep-table» la décision du tribunal de Paris déboutant Nicolas Sarkozy qui demandait l’arrêt de la commercialisation d’une poupée vaudou à son effigie…».

En toute honnêteté, je ne vois pas ce que la morale vient faire dans cette histoire qui relevait plus de la blague et du mercantilisme qu’autre chose… A moins de croire en l’efficacité de ces rites ? Les créateurs de cette poupée n’ont apparemment pas vendu les pouvoirs magiques qui devraient aller avec

:)
Et quant à Nicolas Sarkozy il restera dans les annales le président de la République qui aura saisi le plus souvent la justice pour régler ses petites affaires et quelques ridicules atteintes à son supposé honneur. «Sarko, je te vois !»

Henri Guaino ayant l’indignation manifestement facile, je m’en voudrais de ne pas rappeler qu’il fut le rédacteur du désormais célèbre et ignoble «Discours de Dakar» où Nicolas Sarkozy aura osé prétendre que «les Africains n’étaient pas entrés dans l’histoire». Mais rassurez-vous : pour lui, l’histoire se résume uniquement aux échanges commerciaux et à la mondialisation. L’esprit VRP fait homme.

Enfin, ces magistrats s’insurgent à bon droit : «le message est passé : honte et gare aux juges qui – pour des raisons obscures aux yeux d’un conseiller de l’Elysée – ne prononceraient pas le maximum de la peine». Il restera que contrairement à ce que désirait Henri Guaino – ou plutôt Nicolas Sarkozy, cela revient au même - ce maximum ne saurait être perpet. 10 ans derrière les barreaux, c’est déjà beaucoup.

Cela me semble au demeurant tout à fait normal que les auteurs d’accidents graves qui roulent en état d’ébriété soient punis sévèrement. Pendant trop longtemps les textes et les juges n’ont pas suffisamment réprimé les délits routiers liés à l’alcool. Sans doute parce qu’en France, grand pays producteur de vins et spiritueux, l’on eut trop d’indulgence pour les consommateurs intem-pérants lorsqu’ils prenaient le volant. A l’évidence, au détriment de la sécurité routière.

«Boire ou conduire, il faut choisir». C’est l’évidence même. Il s’en faudrait néanmoins de beaucoup que cela fût rentré dans toutes les consciences. En dépit de toutes les campagnes de la Prévention routière, de toutes les mesures coercitives de plus en plus sévères. Comment empêcher un conducteur de boire ou de prendre la route quand il a bu ? Comment l’empêcher de conduire malgré tout et ivre quand on lui a supprimé son permis ? N’en déplaise à Henri Guaino et son grand souffleur du Grand guignol de l’Elysée, ces graves questions ne pourront jamais se régler avec des affirmations lapidaires – au double sens du mot – sur le ton des Dupont-la-Joie, beaufs (de gouvernement ?). Un peu de dignité, messieurs !

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