Magazine Amérique du nord

Quitter New York (2) Repasser chez Boulud

Publié le 26 avril 2011 par Olivier Beaunay

Entre Daniel, la version chic sur Park Avenue, le Café Daniel, le repaire feutré au goût des saisons Upper East Side, DB, la brasserie contemporaine Midtown, DGDB, sa création plus récente à la fois casual et vibrante au bas de Bowery et le Bar Boulud, face au Met, s'il fallait choisir entre les les restaurants de Daniel Boulud à New York, c'est au Bar Boulud que nous retournerions.

Nous y retournons donc. Face à l'opéra, entre le Beacon Theater et Columbus Circle, le Bar Boulud fait une cantine culturelle, mi-lyonnaise, mi-new yorkaise, parfaite. L'inspiration viticole que laisse deviner une forme voutée, tout en longueur, agrémentée de tableaux de tâches de vins fâmeux (parmi lesquels on compte une Romanée Conti) s'y combine avec un meublé de bois sobre et une ambiance tamisée, pour ne pas dire sombre, qui équilibre avec justesse, entre un bar animé et des banquettes plus paisibles, la façade lumineuse du Met.

La table communale, face à la salle, au fond du restaurant, fait une place à la fois conviviale et intimiste qui finit par avoir notre préférence, au moins lorsque la terrasse n'est pas encore ouverte.

Si l'on penche pour un cocktail, il faut opter ici pour le Figue Old Fashion, composé de Bourbon, de Porto, de purée de figue et d'Angostura. Mais le mieux est encore de choisir un vin qui guidera harmonieusement l'ensemble du repas. Sur la suggestion du sommelier (mais en évitant prudemment des méandres conceptuels des sommeliers new yorkais qui n'hésitent pas à emprunter au yin et au yang), un Barbera d'Alba (Piedmont, 2008), de chez Giovanni Conterno, révèle un velouté qui se compare honorablement aux Bourgogne rouges.

Territoire lyonnais oblige, les planches de charcuterie sont, pour commencer, un passage obligé de la maison. Un assortiment léger de pâtés de joues de boeuf, de lapin ou encore de foies de volaille accompagné de moutarde ancienne et de cornichons, mais aussi de quelques betteraves et de carottes au cumin, marient astucieusement le terroir et la fraîcheur.

A suivre, on opte pour une paleron de boeuf à la manière de Boulud, mi-confite, mi-orientale - un régal. Le veau rôti rappelle, par la finesse et le rosé des tranches (dont il faut toujours négocier précisément la cuisson), le vitello tonato, mais dans une version chaude, accompagné d'une polenta crémeuse. Là-dessus, le Barbera d'Alba fait des merveilles.

Cette brave bête inspire pourtant aussi peu la voisine de gauche (un couple juif rêveur et bienveillant) qu'il me réjouit en laissant par ailleurs totalement indifférent, à ma droite, un joueur de soccer tatoué, un peu primaire (qui choisit le steack-frites), compagnon un peu décalé d'un esthète japonais qui penche, lui, pour le saumon sauvage. Une aimable cacophonie des saveurs et des styles qui fait l'un des charmes de la maison.

Le gâteau basque est un incontournable du lieu, dans une version moins épaisse et plus parfumée que son alter et go du sud-ouest. Le gâteau aux abricots et à la mangue est une alternative à la fois courageuse et acceptable. On ressort d'ici ravis, avec la béatitude tranquille que confèrent les bonnes adresses que l'on a fréquentées avec assurance, et que l'on retrouvera d'instinct.


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