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Révoltant

Publié le 29 avril 2011 par Malesherbes

Vous pouvez trouver ici un billet dans lequel je rappelais les différents événements du drame de Clichy-sous-Bois. J’évoquerai donc maintenant seulement les épisodes les plus récents.

Le 10 septembre 2010, la procureure du tribunal de Bobigny a présenté une réquisition de non-lieu dans l'affaire de la mort de Zayd Benna et Bouna Traoré le 27 octobre 2005. Elle fondait sa décision sur un syllogisme d’une rigueur implacable : le rôle des policiers est de protéger les citoyens. S’ils avaient su que des adolescents couraient un danger, ils seraient assurément intervenus. Comme ils ne l’ont pas fait, c’est qu’ils ne savaient pas. CQFD.

Heureusement,  deux juges d’instruction indépendants, Claire d’Urso et Marc Sommerer, ne se sont pas laissés intimider par ce qui pouvait laisser supposer une intervention du pouvoir pour ménager la susceptibilité d’un de ses principaux soutiens, la police. Le 21 octobre suivant, ils ont renvoyé les deux policiers en cause devant le tribunal correctionnel pour «non-assistance à personne en danger ». Toujours aussi soucieux d’une bonne administration de la justice, le parquet de Bobigny avait alors fait appel de cette ordonnance. Le 27 avril, la cour d’appel de Paris a suivi les réquisitions de non-lieu du parquet général

Cette décision ne peut avoir qu’une explication : le parquet général n’a pas confiance en la justice de notre pays. Supposons en effet que l’ordonnance des juges ait été exécutée. Puisque ces policiers avaient été suspectés à tort, leur innocence aurait ainsi été complètement établie. Si elle ne l’avait pas été, cela aurait tout aussi immanquablement prouvé leur culpabilité, notre justice étant bien évidemment tout aussi infaillible, qu’elle condamne ou qu’elle absolve. Ne pas s’y soumettre témoigne d’une défiance inexcusable de la part de ceux-là même qui sont chargés de l’exercer.

Soyons plus prosaïques. Etant donné la totale innocence de ces gardiens de la paix, ce non-lieu évite les frais d’un nouveau procès et le préjudice porté à d’honorables fonctionnaires. Mais pense-t-on vraiment que cette absence de procès puisse laver un honneur injustement mis en cause ? Et surtout, oublie-t-on que le sentiment d’injustice suscité par la mort de ces enfants avait été à l’origine de violentes émeutes qui avaient même conduit, le 9 novembre 2005, pour la première fois en France depuis les événements d’Algérie, à la proclamation de l’état d’urgence ?

Oser manifester que tous les citoyens, même les plus humbles, n’ont pas également droit à la justice, est révoltant, au sens propre. Que les apprentis boutefeux prennent garde !


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