Havres

par Arion 

Il est des lieux pour souffler : un square sans enfants, un musée sans chefs-d’œuvre, une église sans messe ; ni la beauté ni la foi ne sont de tout repos… Dans une église, aussitôt franchi le porche, la canicule confesse ses torts, le bruit fait pénitence, la lumière s’agenouille, le tracas tombe. C’est brusque et doux comme une syncope.

Éviter les heures d’oraison, les matins sermonnaires, les nefs à merveilles que des étoiles au guide emplissent de flash et de cous dévissés. A d’autres, les chapiteaux du ravissement, les piliers de l’extase. Ne demandez ici que dix minutes de rive entre deux flots, dix minutes de vide entre deux pleins, dix minutes de lenteur entre deux courses, dix minutes de doute entre deux certitudes : un petit miracle.

Mais dix minutes, pas une de plus ! Qui cherche le diable, le trouve : divin diable du retranchement des êtres, satané dieu de la désenvie des choses. Onze minutes -une de trop- et vous seriez cet à quoi bon sur un bord que le flux n’atteint plus. Sortez vite, abjurez l’ennui des faits et gestes, hissez les voiles du vouloir-vivre-encore, rentrez ragaillardis dans le tumulte.