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[Monde du travail] Suicides en France – Fin de rêve | Le Devoir

Publié le 04 mai 2011 par Yes

À quelques jours du 1er mai, donc de la fête du Travail, un autre employé de France Télécom s’est suicidé. À la différence de ceux et celles, ils sont des douzaines, qui se sont donné la mort, lui a opté pour une fin d’une violence inouïe et d’une profonde portée symbolique: comme des moines bouddhistes au Vietnam, comme un jeune vendeur de fruits et légumes en Tunisie, il s’est immolé par le feu. Il en va à France Télécom comme il en va à Renault, aux Postes et autres entreprises aux tailles imposantes: régulièrement, au cours des dernières années, des salariés ont mis leur vie entre parenthèses.

Lorsqu’au nombre de trépassés on additionne celui des tentatives ratées, celui des dépressions, celui des épuisements professionnels et autres abîmés du travail, force est de constater que ce pays est confronté à une épidémie et non à un malaise que l’on pourrait réduire à une simple catégorie sociologique. Une épidémie de souffrance au travail, pour reprendre le qualificatif des experts qui se sont penchés sur ce phénomène. Pour bien souligner qu’il s’agit bel et bien d’une épidémie, rappelons une réalité qui dépasse le cadre des entreprises nommées: les Français sont les plus gros consommateurs de médicaments au monde. Antidépresseurs, psychotropes et autres malices chimiques.

Ce fléau découle d’une culture franco-française de la gestion, de l’adhésion mondiale au culte de la performance et donc de la vitesse ainsi qu’aux politiques du travail qui ont cours au sein de l’Union européenne et de l’Allemagne en particulier. Reprenons dans l’ordre. Selon plus d’une étude, le salarié français est celui qui produit le plus de richesses à l’heure au monde. Le pays des 35 heures, qui soit dit en passant ne s’appliquent pas à tous, présente par ailleurs le taux de syndicalisation le plus bas. Quoi d’autre? La combinaison des coûts salariaux et des charges sociales y est plus chère que dans bien des pays voisins et surtout qu’en Allemagne.

Au nom de la compétitivité, le républicain est soumis à un rythme de travail effréné et à un chapelet de pressions énormes attribuable au principe de changement constant. Il vit sous le joug du toujours plus, que les consultants en gestion et leurs alliés psychologues ont enrobé de mots puisés dans la novlangue de 1984 ou de Fahrenheit 451. Exemple puisé dans le livre de France Télécom: «Le niveau d’énergie exprimé n’est pas toujours représentatif du niveau de résistance réel» ou encore «la vallée des changements».

S’il en est ainsi, c’est également parce que, sur le front du travail, la concurrence entre membres de l’Union européenne (UE) est aussi féroce que sur d’autres fronts. Mettons qu’en la matière l’Allemagne fait ce que l’Irlande fait en matière de fiscalité, soit du dumping salarial. Tout récemment, elle a accordé aux entreprises de construction et de nettoyage industriel le permis d’installer des filiales sur le sol allemand. Résultat net, les charges sociales de la société étrangère située à Munich ou ailleurs seront alignées sur celles qui prévalent au pays d’origine du siège social. Idem sur le salaire minimum. Berlin a fait des concessions qui taxent au fond toutes les politiques de salaire minimum de l’UE. Des concessions qui confirment combien les égoïsmes nationaux ont renvoyé la solidarité européenne aux souvenirs de l’Histoire.

Suicides en France – Fin de rêve | Le Devoir.


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