Adieu la Direction du projet interministériel de contrôle automatisé (DPICA), vive l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions !
Telle est la conséquence d’un décret du 29 mars 2011 paru au journal officiel du 31 décembre. L’enjeu : perfectionner le traitement des amendes radars.
L’organisation actuelle
Actuellement, le traitement des amendes radars est organisé de la façon suivante :
Deux échelons administratifs sont responsables de la définition et de l’exploitation du système de contrôle-sanction automatisé. Si la responsabilité de l’implantation des radars appartient au délégué interministériel à la sécurité routière, la conception technique et l’exploitation du système d’amendes radars sont de la responsabilité de la direction du projet interministériel de contrôle automatisé (DPICA), qui dirige le centre national de traitement de Rennes (CNT).
Ensuite, il convient de distinguer le traitement de l’information relevée par les radars du constat proprement dit de l’infraction. Le premier est effectué par le centre de traitement de Rennes. Le second également, mais par une structure plus précise, le centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR).
Ce qui va changer
Désormais, c’est donc l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions qui prendra le relais de la DPICA, dirigera le centre de Rennes et en assurera la gestion. Cette structure prendra la forme juridique d’un établissement public administratif de l’Etat placé sous la tutelle du ministre de l’intérieur et dont le siège est fixé à Rennes. On pourrait voir dans cette tutelle de la place Beauvau une confirmation du virage répressif engagé depuis le détachement de la politique en matière de sécurité routière de la responsabilité ministère des transports (voir à ce propos notre article du 9 décembre).
En outre, le fait de confier un service public à un établissement public n’est certainement pas anodin. Ce procédé d’organisation des services publics a pour but de s’évader du carcan rigide des structures ministérielles traditionnelles : le secteur concerné étant individualisé et doté d’une certaine autonomie juridique financière et administrative, il apparait ainsi mieux assuré. Ce type de structure est d’autant efficace que le secteur en question est en pleine expansion. Et c’est exactement ce qui se passe actuellement avec le développement ininterrompu du système de contrôle-sanction automatisé, la mise en service du procès-verbal électronique ou encore le déploiement des radars feux-rouge.
Voici, dans le détail, les missions conférées à l’agence nationale :
• La participation à la définition des normes techniques relatives au traitement automatisé des infractions, le contrôle et l’évaluation de leur application, la contribution à leur évolution et à la surveillance de l’interopérabilité des dispositifs techniques correspondants ;
• La conception, l’entretien, la maintenance, l’exploitation et le développement des systèmes et applications nécessaires au traitement automatisé des infractions ;
• L’édition, le publipostage, le routage et l’affranchissement des différents avis de contravention établis par voie électronique ou dans le cadre du traitement automatisé des infractions, ainsi que les différents courriers nécessaires ;
• Le tri du courrier reçu dans le cadre des recours émis par des contrevenants ou de tous autres courriers ;
• L’information des contrevenants par l’organisation d’un centre d’appels ou de tout autre moyen de communication ;
• L’organisation et la gestion du traitement automatisé des infractions qui lui est confié en qualité de prestataire ;
Quel est le message envoyé aux automobilistes ?
On aurait aimé que le ministère de l’intérieur nous annonce des mesures telles que l’augmentation des effectifs de l’officier du ministère public de Rennes qui traite des contestations ou encore un recadrage de ce dernier dont la tendance à rejeter de façon abusive certaines constations, pourtant tout à fait valables, commence à jeter le discrédit sur l’ensemble du système de contrôle-sanction automatisé. A la place, on a uniquement l’apparition d’un « Pentagone des amendes », superstructure dont il n’est pas certain qu’elle améliore la vision (parfois erronée) qu’ont les citoyens de la politique de sécurité routière menée.
Au final, ce décret portant création de cette agence laisse donc une impression mitigée. En effet, on avait l’impression, avec le récent assouplissement du permis à points, que le gouvernement avait enfin pris conscience de la demande croissante d’une plus grande acceptabilité sociale de la politique de sécurité routière, qui était devenue totalement incompréhensible pour les citoyens. N’y-a-t-il donc pas un risque, même si cela n’est sûrement pas le but recherché, que les automobilistes interprètent cette nouvelle agence comme un retour en arrière, une course vers une industrialisation à l’excès du traitement des amendes ? On aimerait également voir le gouvernement être aussi déterminé dans d’autres domaines, comme la lutte contre la dégradation des routes. Budget d’entretien en baisse, infrastructures inadaptées, voilà un sujet qui mériterait bien la création d’une agence chargée de répondre en urgence à tous ces problèmes !
Sources :
- Décret n° 2011-348 du 29 mars 2011 portant création de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions
- Rapport d’information n° 1650 de la commission des finances de l’Assemblée Nationale