« Dis donc, toi qui tiens un blog politique, pour 2012, ça pleut comme à Gravelotte ! » ( Sens )
C’est le Printemps. Les arbres reverdissent et bourgeonnent, les gueules de loup commencent à éclore, et les candidatures à la présidentielle de 2012 poussent comme des champignons qui n’ont même plus besoin de pluie pour se multiplier.
Dernière en date, celle de Patrick Lozès, bien connu des blogueurs, et de votre serviteur qui le visite de temps à autre sur son blog, y laissant de petits commentaires de soutien (il en a bien besoin), comme à cette occasion, où les commentateurs au front bas se sont laissés aller à leurs mauvais instincts, sans que cela n’émeuve personne. Même Mr D.Goux ne s’y est pas risqué, lui qui d’ordinaire ne se prive pas, c’est pour dire.
Quelqu’un qui ose s’attaquer publiquement à Dieudonné (qu’il qualifie à juste titre de représentant d’extrême droite) et à Zemmour, sans attendre opportunément la médiatisation excessive de ce dernier, ne pouvait qu’attirer ma bienveillante attention. La lutte contre tous les racismes et la xénophobie relèvent en effet d’un effort constant, collectif, solidaire.
Je dois cependant faire savoir ici que, malgré la sympathie que j’éprouve pour cet homme qui me semble défendre pour le peu que j’en sais une cause juste, sa candidature me pose question, voire m’irrite un peu. Il n’aurait cependant pas été de bon ton de la dénoncer sans un minimum de précautions oratoires, quand bien mêmes elles ne seraient qu’écrites. L’accusation de racisme peut être bien vite brandie, je l’ai appris à mes dépends. Me concernant, pourtant, il me semblerait absurde de l’invoquer, ne voyant en la matière aucune raison de voir davantage la couleur de la peau de cet homme que les raisons objectives qui me semblent caractériser l’erreur représentée par sa candidature.
Tout d’abord, bien entendu, il y a la multiplication de toutes les autres… Chaque jour nous livre en effet son lot de prétendants à une fonction décidément bien courtisée et de candidats à la candidature. Chaque semaine nous apporte son nouveau bouillon d’écume médiatique à propos d’un épisode, aussi minime et dérisoire soit-il, de suspense savamment et péniblement entretenu par quelques uns.
Effectivement, rien n’est certain. On ne peut qu’évoquer les noms de ceux qui se sont déjà déclarés candidats… aux élections où à la candidature. Voici le patchwork, qui évolue de jour en jour :
Nicolas Sarkozy (UMP), Marion Anne Perrine Le Pen (FN), Christine Boutin (parti chrétien démocrate), Nicolas Dupont-Aignan (Debout la république), Gilles Bourdouleix (CNI),Dominique de Villepin (République Solidaire), Jean-Louis Borloo pour le centre rassemblé ?, François Bayrou (Modem), les candidats à la primaire socialiste (les déjà déclarés Manuel Valls ? Probablement plus si DSK), François Hollande et Arnaud Montebourg, Ségolène ROYAL, Jean Mallot, Anne Mansouret , Daniel Le Scornet , Christian Pierret , Aurélien Tricot, Hacène Mezrag, Will Mael Nyamat, les pas encore comme Dominique Strauss-Khan, puisque Martine Aubry se désisterait, … Nicolas Hulot pour on ne sait pas qui encore et Eva Jolly, Stéphane Lhomme, Henri Stoll et Louisa Benzaïd candidats aux primaires d’EELV, Jean-Luc Melenchon ou André Chassaigne (PCF) Emmanuel Dang Tran , ou André Gérin pour le Front de gauche ? Olivier Besancenot pour le NPA ? Jacques Cheminade (SE), Chevènement , Nathalie Arthaud (LO), Gérard Schivardi (POI) ? Gérard Gautier (qui milite entre autres pour la reconnaissance du vote blanc).
… Sans parler de la myriade d’autres qui ne sont pas vraiment certains de réunir les 500 parrainages, que je vous invite à découvrir ici. Certains me semblent d’ailleurs relever davantage de l’anecdote littéraire et journalistique que réellement de l’histoire politique, comme Renaud Camus ou Calixthe Beyala pour les plus connus. Ce qui nous fait donc si je compte bien environ 36 candidats certains que l’on peut réduire à 16 compte tenu du fait qu’un seul devrait émerger pour les partis organisant des primaires, même s’ils ne nomment pas leur processus de désignation ainsi (PS, EELV, Centre, Front de gauche). Putain… 16 candidats ! Encore plus qu’en 2002 et bien sûr 2007 ! Quel beau merdier dans un tel contexte politique, si explosif !
Le jour même, donc, où j’apprends la candidature de Chevènement (à qui certains prêtent, comme à Taubira, l’échec de la gauche en 2002), qui me met tout autant en colère, pour des raisons déjà exprimées ici, voilà donc qu’une autre, encore plus anecdotique, nous parvient. Son prétexte ? Monsieur Lozès se veut porter la voix des « minorités« , des « non représentés », des « invisibles ». Encore un candidat qui se prévaut de la diversité… N’y en avait-il pas d’autres ? Ah non… pas à droite, ou au centre, il est vrai… Et puis, Monsieur a un livre à vendre.
L’argument du trop grand nombre de candidatures ne suffit cependant pas. Il pourrait être aisément et judicieusement balayé par des détracteurs lambda au profit de l’argument démocrate par excellence qui consisterait à évoquer la légitimité de celle-ci comme de toutes les autres. Soit. Tout le monde a le droit de se présenter, bien sûr. Mais.
Ce mais, que j’adresse aussi et à encore plus forte raison à Chevènement (mais en lequel je n’ai plus guère d’espoir, quant à lui, de le voir rendre raison, compte tenu de son orgueil auquel l’histoire n’a pas servi de leçon…), il représente le danger qu’il y a de laisser triompher un autocrate dangereux pour nos libertés fondamentales qui a opéré la plus importante entreprise de régression sociale qui soit depuis la dernière guerre… Lui qui a rogné un à un, méthodiquement, chaque avantage durement acquis par nos aïeux et extorqués non sans lutte au patronat par les syndicats, derrière lesquels il y avait alors davantage de travailleurs combattants… qu’aujourd’hui.
Ce Mais, il représente également le danger du Front National, qui n’a même plus besoin de se tapir dans l’ombre en attendant son heure comme autrefois, en la personne de son père, mais qui se voit soudain surexposé en pleine lumière par des médias décidément bien dociles, certainement appatés par tant de blondeur…
En outre, il y aurait un relatif racisme, cette fois-ci certain à mes yeux, à ne pas lutter contre un adversaire politique qui se montre prêt à défendre ce libéralisme carnassier notamment représenté par le patron du Fmi, auquel il se déclare éventuellement prêt à donner son soutien, tout en prenant soin de se montrer prudent sur les promesses qui n’engagent que ceux qui y croient…
Enfin, je ne saurais cautionner la candidature de quelqu’un qui, avant cela, n’a pas hésité à travailler pour Borloo ou, pire, Hortefeux, quand bien même ce dernier a été condamné pour injures racistes. Mais peut-être était-ce avant qu’il ne l’apprenne ?
En attendant, je constate une seule chose : il n’est manifestement pas de mon bord politique, positionné comme il l’est dans un élan de libéralisme qui l’a vu porter à la National Black Chamber of Commerce, elle-même membre de l’United States Chamber of Commerce, « connue pour dépenser plus d’argent que n’importe quel lobby du pays sur une base annuelle ». Autrement dit, un membre de cette caste de banksters et autres représentants de l’oligarchie que nous devons combattre par souci d’équité sociale pour que le monde change. Et pour la survie de nos valeurs humanistes, bien peu compatibles avec les règles du marché roi… qui ne répugne pas à l’exploitation de l’homme par l’homme pour des raisons purement économiques certes, mais dont les résultats qui nient tant l’être humain sont si détestables. Et à combattre tout autant que le racisme.
En outre, il m’apparaît également comme éventuellement prêt à changer de veste comme de chemise en fonction du sens du vent. Et je n’aime guère les opportunistes. Et cela quelle que soit la justesse de son combat pour défendre les droits fondamentaux. Ceux des plus démunis doivent l’être aussi et je doute que cette personne soit en légitimité de le faire, au vu de son parcours et de ses idées… Mais s’il n’est pas d’accord, il peut toujours répondre.
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