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Le boucher dans l'arène, symbole de la culture française

Publié le 10 mai 2011 par Taomugaia

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Tu liras avec grand profit ci-après la lettre qu'Armand Farrachi, responsable du collectif pour l'abolition de la chasse à courre, a adressée à Frédéric Mitterrand, promoteur discret mais efficace de la torture sous le soleil.
Cette lettre est parue dans les pages du quotidien Libération du 3 mai dernier.  

"A Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture

 Monsieur le ministre,

Vous venez d’inscrire la corrida au patrimoine immatériel de la France, «comme la tarte Tatin», précisez-vous avec humour. Merci pour cette action courageuse, urgente et désintéressée qui, grâce aux jeux du cirque, rapproche la France du président Sarkozy de la Rome impériale. Il fallait oser affirmer que la torture des animaux appartient désormais à la culture française autant que le supplice des cent morceaux à la culture chinoise, et pour faire du plaisir de quelques-uns l’héritage de tous. Bravo.

Les Français doivent comprendre que torturer à mort un taureau sous les cris de la foule est un acte culturel, un spectacle familial et un divertissement esthétique. Grâce à vous, notre pays, jusqu’alors patrie de Montaigne ou «pays de la liberté», pourra s’enorgueillir d’avoir institutionnalisé la cruauté avec une tarte cuite à l’envers, ce qui nous rendra la fierté d’être Français.

Cette initiative, vous l’avez prise malgré le dégoût qu’inspire cette activité «patrimoniale» à la majorité de la population, et en dehors de toute pression corporatiste, car, chacun le sait, les aficionados n’ont pas plus que les amateurs de la tarte Tatin formé de lobby. Pour défendre les professionnels du gavage, on avait déjà classé la gastronomie au patrimoine culturel, ainsi transformé en arme. Continuez. Aidez les bourreaux qui vous pressent, je le sais, de protéger la chasse à courre et les combats de coqs. Que diriez-vous aussi des combats de chiens ? Est-ce à vos yeux de ministre de la culture un spectacle assez délicat ?

Qu’importe si la corrida a été importée en France par Napoléon III ? Qu’importe si elle a été abolie en 1937 par la république espagnole et victorieusement rétablie par le général Franco ? Qu’importe si elle a toujours été le divertissement favori des tyrans, et la principale distraction de M. Fillon, chef du gouvernement dont vous êtes membre ? Le noble art de la banderille et de l’estocade est en danger chez lui, en Espagne, où la Catalogne l’a proscrit, comme la Bolivie ou le Venezuela. Les amis des animaux réclament son abolition.
Des députés préparent une loi. Il convenait donc de le défendre, et avant les élections. Dépassez même les nationalismes étroits. Pourquoi le gouvernement de droite «décomplexée» dont vous êtes le digne ministre désapprouverait-il qu’on inscrive au patrimoine immatériel mais néanmoins sanglant de l’humanité la lapidation des femmes adultères comme en Iran, l’excision des petites filles comme en Afrique ou la guillotine sur la place publique, comme au bon vieux temps, spectacles propres à rendre aux citoyens le sens de la morale, de la famille et de la vertu ?

Gardons l’espoir de voir bientôt ces traditions tenues, comme la corrida et la tarte Tatin, pour les plus beaux fleurons de notre civilisation. Car chacun sait maintenant qu’on peut compter sur vous."


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