Pincez-moi ! Une histoire abracadabrantesque arrive opportunément sur le front présidentiel 2012. Une victime… ou plutôt, un accusé
pour un fait très grave.
L’information du week-end est digne des meilleurs canulars du
1er avril, et celle-ci nécessite de se frotter les yeux plus d’une fois :
Dominique Strauss-Kahn, le directeur général du FMI mais surtout le
candidat virtuel à l’élection présidentielle française qui aurait le plus grand potentiel électoral dans les sondages, a été arrêté samedi 14 mai 2011 à 16h40 (heure NY) à l’aéroport John F.
Kennedy de New York et a été inculpé par le parquet de New York d’agression sexuelle, de tentative de viol et de séquestration après le dépôt d’une plainte d’une employée de 32 ans de l’hôtel
Sofitel près de Times Square. Dominique Strauss-Kahn plaidera non coupable.
Inutile de dire que n’étant pas juge, je suis bien incapable de connaître la réalité des faits (et j’en suis également indifférent), mais
connaissant les États-Unis, il est sûr que l’affaire ne sera pas classée et qu’on en parlera encore dans un an (il faut se rappeler l’affaire Monica). Si un viol est facilement prouvable, une
tentative de viol est ce qu’il y a de plus difficile à prouver ou à nier puisqu’il s’agit d’une parole contre une autre.
Mais la culpabilité de Dominique Strauss-Kahn dans cette affaire importe finalement peu dans ses conséquences politiques. Toute la presse
en fait ses choux gras sans doute à raison : le résultat immédiat est que Dominique Strauss-Kahn est disqualifié pour l’élection présidentielle de 2012.
Jacques Attali parle déjà de remplacer Dominique Strauss-Kahn… au FMI. En pleine crise financière, l’institution internationale est aussi
handicapée que le PS par cette affaire d’ordre portant privé qui a des retombées mondiales.
C’est une surprise avec des sondages qui n’ont jamais cessé de grimper. Le Parti socialiste sera bien en peine de trouver un candidat reconnu par tous.
Le problème de DSK n’est cependant pas nouveau et depuis 2002, ce dilettante oublie que pour se présenter à l’Élysée, il faut y travailler jour et nuit sans arrêt, consacrer les moindres faits et
gestes à ce but ultime. Se montrer maladroitement en Porsche, se faire prier, venir sur les plateaux télévisés pour ne rien dire, ne jamais prendre position ni sur les retraites, ni sur la Libye,
ni sur rien d’autre ne donnent pas le sentiment qu’un candidat se prépare à la bataille politique suprême.
Le PS aura intérêt à tourner très rapidement la page DSK au risque de se retrouver… sans candidat ! Pourtant, certains font déjà
campagne, Arnaud Montebourg, Ségolène Royal… et surtout François Hollande qui a toutes les chances pour l’instant de bénéficier de ce
retrait miraculeux.
Dans l’axe de la direction du PS, il est difficile d’imaginer Martine Aubry en candidate même si elle en a la stature, d’une part, parce qu’il aurait fallu qu’elle démarrât bien plus tôt sa campagne, et
d’autre part, parce qu’elle semble ne pas en avoir vraiment "envie", et l’envie, l’ambition, la combativité, cela ne se commande pas. Elle préfère sans doute un travail plus collectif et Matignon
serait psychologiquement plus adapté à sa personnalité.
Mais l’effet papillon pourrait se poursuivre au sein du PS : en cas d’absence de Dominique Strauss-Kahn et de Martine Aubry dans la
bataille, il est fort probable que l’ancien Premier Ministre Laurent Fabius, pourtant peu populaire, prendrait le relais de cette alliance de Marrakech de 2008. Par ailleurs, on peut aussi
imaginer Bertrand Delanoë, qui jouit encore d’une forte popularité,
n’ait pas dit son dernier mot malgré son échec et renoncement à Reims (j’y reviendrai plus tard).
La secousse de ce week-end est si forte qu’elle va remettre une énorme incertitude dans le déroulement de la prochaine élection
présidentielle.
Depuis deux ans, on parlait de deux voire de trois candidats majeurs pour 2012 : Nicolas Sarkozy (le Président sortant), Dominique Strauss-Kahn (populaire
dans les sondages) et depuis janvier 2011, Marine Le Pen. Ce jeu va
être entièrement remis en cause pour une raison simple, c’est que la forte popularité de Dominique Strauss-Kahn est dû essentiellement à l’électorat centriste et de droite modérée qui ne fait
plus confiance en Nicolas Sarkozy.
DSK était le seul catalyseur des voix centristes au contraire de ses concurrents du PS qui sont beaucoup plus axés à gauche. Cela ouvre
ainsi un boulevard inimaginable aux éventuels candidats centristes : François Bayrou mais également Jean-Louis
Borloo, et, dans le registre d’une droite modérée, à Dominique de
Villepin.
Cette affaire judiciaire est désolante sur le fond. J’aimerais que le potentiel des éventuels candidats à l’élection présidentielle ne
soit basé que sur leurs capacités propres, stature à tenir la fonction présidentielle, compétences pour répondre aux préoccupations sociales et économiques du peuple, crédibilité à redonner à la
France une confiance en l’avenir.
Visiblement, tous les coups sont permis. Certains n’ont même pas besoin d’adversaire pour foncer dans le mur. L’élection de 2012 n’aura
jamais été aussi ouverte.
Aussi sur le
blog.
Sylvain Rakotoarison (15 mai 2010)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Dominique Strauss-Kahn candidat ?
Le PS et l’élection présidentielle.
François Hollande, la surprise pour 2012 ?
Y a-t-il encore un strauss-kahnien dans la salle ?
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/2012-dsk-out-93960