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comment en vient-on a créer sa propre école ?

Publié le 22 mai 2011 par Veille-Education

Anne Coffinier est la créatrice de l’association Créer son école qui travaille depuis 2004 sur le terrain, pour accompagner les parents d’élèves, les enseignants et les responsables locaux dans leur démarche pour l’Éducation de leurs enfants. Dans un entretien accordé à Belle-et-Rebelle, cette femme courageuse et travailleuse offre un état des lieux d’une grande clarté de la situation de l’Éducation en France. Un constat sans équivoque à lire d’urgence. Exclusif.

Vous êtes la créatrice de l’association « Créer son école »; comment en vient-on a créer sa propre école ? De quel constat êtes-vous partie ?

D’une insatisfaction ou plutôt d’une révolte. L’école publique (ou son double privé sous contrat) laisse trop d’enfants sur le bord de la route. « En échec scolaire », comme on dit. Ils n’ont pas acquis les fondamentaux nécessaires à leur vie d’adulte ; leur confiance en leurs capacités est perdue, et ils ne croient plus en la société qui, à travers l’école, les a condamnés. Comme dit Erik Orsenna, à 11 ans, l’école en a fait des exclus pour le restant de leurs jours. Des blessés, des démoralisés, des révoltés. Un tel jeu de massacre est monstrueux, et lourd de conséquences pour la société d’ailleurs.

Cette situation m’a révoltée dès que j’en ai pris conscience ; je n’ai pu l’accepter. L’école est destinée à donner une formation et à préparer les enfants à leur vie d’adulte. C’est un non sens qu’un système éducatif dise qu’il ne peut pas ou ne sait pas instruire 40% des enfants qui lui sont confiés. C’est à l’offre scolaire de s’adapter, non aux enfants d’être mis au rebut de l’école. Mais cela suppose de cesser de vouloir faire marcher tout le monde dans la même direction à la même vitesse. Bref, il faut en finir avec « l’école unique ».

Est-ce à dire qu’il y a un souci avec l’école en France ?

Oui, c’est patent. L’Éducation nationale doit d’urgence se remettre en cause ! Or, elle n’y parvient pas. Un système de 2 millions de salariés gérant 12 millions d’élèves est quasi structurellement irréformable. Les solutions ne sauraient venir d’en haut. Elles viendront nécessairement d’en bas, de la société civile : des mères, des pères, des professeurs, des communautés locales… L’association Créer son école et la Fondation pour l’école se sont justement mises au service de ces initiatives de la société civile, en en respectant la diversité.

La mission de l’école est d’instruire les enfants, de leur apprendre à développer leurs capacités propres, à tirer le meilleur d’eux-mêmes et à trouver leur place dans la société. Au contraire, on constate aujourd’hui que l’école fonctionne comme une machine à reléguer, à casser comme le montre bien Peter Gumbel dans son livre « On achève bien les écoliers ». L’école ne doit pas continuer à fonctionner sur ce schéma inhumain. Mais, attention, la conclusion n’est pas qu’il faut faire de l’école un sympathique lieu de vie, ouvert sur le monde, sans note ni jugement. La conclusion est plutôt qu’il faut oser proposer diverses écoles aux familles pour que les enfants aient plus de chances de trouver un contexte éducatif et des méthodes qui leur réussissent. Des écoles ambitieuses pour les enfants mais variées dans leur approche. Bref, il faut en finir avec l’école publique monolithique centralisée et le rêve d’une France dans laquelle tous les enfants ouvriraient à la même heure le même cahier pour la même leçon. Nous devons accepter que les enfants n’aient pas tous la même forme d’intelligence, la même motivation pour étudier, les mêmes aspirations, les mêmes aptitudes, le même contexte social. C’est une chance pour la société d’ailleurs. A l’école de tenir compte de cette réalité sous peine de mettre au rebut jusqu’à 40% d’une classe d’âge inadaptée à l’institution scolaire, tout en retardant dans leurs avancées les 60% qui pourraient s’accommoder de l’école telle qu’elle est. Bref, arrêtons d’avoir peur de la diversité, de la différence. Seule l’émergence d’écoles variées permettra aux enfants qui ont des aptitudes et des aspirations variées de s’accomplir. Il est temps de rompre d’urgence avec l’égalitarisme idéologique.

En créant l’association Créer son école, j’ai voulu aider les professeurs et les parents à se saisir de leur responsabilité et à proposer autre chose aux enfants que l’école imposée par les hiérarques de l’Éducation nationale. C’est un pari réussi puisqu’il y a aujourd’hui près de 500 établissements indépendants, dont vous pourrez apprécier la qualité et la diversité en consultant l’Annuaire des écoles indépendantes 2011. Ces écoles scolarisent 46 000 élèves de la maternelle au baccalauréat. 20 nouvelles écoles ouvrent en plus chaque année. Ce mouvement de libération parti du bas ne pourra plus être arrêté. Il correspond à un phénomène très naturel : celui de parents, de professeurs, de responsables locaux qui fondent des écoles.

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