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Poiémique : Comme en un miroir noétique 1 : Gérard Conio, le sans-objet

Publié le 23 mai 2011 par Tudry

Gérard Conio, Dépassements constructivistes, L'Age d'Homme, 2011 ; et Le Suprématisme. Le Monde sans-objet ou le repos éternel, Kazimir Malévitch, traduit du russe et présenté par Gérard Conio, InFolio éditions, 2011.

[En construction, ce texte va évoluer, avec la maturation des lectures et des méditations internelles, sur un sujet essentiel bien que largement ignoré de nos jours. La théorie (c-à-d vision) de G. Conio au sujet de l'aporistique entre modernisme dans l'art et modernité dans la société fait appel, à mon sens, à une mise sous tension de type abelienne, soit une inversion intensificatrice d'inversion, et se situe, véritablement, dans cette problématique qui sous-tend toute l'histoire occidentale depuis la malversation fillioquiste... ]

Gérard Conio, professeur émérite à l'université de Nancy 2, est l'un des grands spécialistes des avant-gardes de l'Europe de l'Est. Il dirige également les collections Classiques slaves et Slavica, avec G. Nivat et V. Dimitrijevic, aux éditions L'Age d'Homme.

Après deux tomes consacrés au Constructivisme (plastique et littéraire), et le fulgurant essai L'Art contre les masses nous voici confrontés à une autre étude exigeante. Exigeante car le style de Gérard Conio l'est. Nous ne nous trouvons pas ici devant la morne litanie érudite d'un universitaire. Le style de Conio transporte avec lui une énergie profondément amoureuse, proprement « avant-gardiste ». La composition de ce livre en est, au premier abord, la preuve la plus excellente : en effet, plutôt que de publier plusieurs livres séparés présentant ses traductions des textes importants de Taraboukine, Axionov et Eisenstein, Gérard Conio les rassemble, les confronte et se place lui-même au coeur du sujet en intercalant ses propres textes, en tissant ses analyses dans la matière même de son sujet. En outre, l'ouvrage se clôt par un entretien vigoureux avec Marc Konik peintre et designer, acteur et héritier des ces courants de l'avant-garde russe... Disons plutôt que cette clôture est exactement une ouverture... Une invitation à une pensée « projective » (comme l'eut dit Fedorov!). L'objet d'étude de Gérard Conio, en partie grâce à lui et à son travail acharné, se révèle, précisément, non forclos. Le corps bouge encore et s'agite avec l'intention de nous dire beaucoup de chose sur notre « modernité » en décomposition.

Force m'est faites d'énoncer encore la même phrase : par sa fréquentation amoureuse des textes et des idées-forces des avant-gardes russes, Gérard Conio à « inventé », au sens où il a mis à jour un « trésor » enfoui sous une montagne d'idées reçues, de lieux communs glaiseux et boueux... Depuis plusieurs années il exhorte ceux que cela peut encore intéressé à considérer le fossé qui fut creusé entre le « projet » des avant-gardes « modernistes » et la modernité réalisée... Ce mur « nu et aveugle » que, précisément, les constructivistes ont vu se dresser devant leur projet d'un art qui serait le moteur d'une reconstruction de la vie !

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La parution quasi simultanée de ces deux ouvrages (et celui de Malévitch, encore inédit en français en particulier) ne doit rien au hasard. Parution en miroir des deux voies que décidèrent de suivre les jusqu'aux boutistes de l'art ! Dissident des dissidents de l'intérieur Kazimir Malévitch aura décidément tenu un rôle à part dans la folle épopée des avant-gardistes... Vivant en sa chair et en son esprit, totalement, l'absolu raréfaction et liquéfaction des arts :

« Voguez ! L'abîme blanc, l'infini sont devant vous ! » (Malévitch)

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