Magazine High tech

L'eG8 : la grande manipulation

Publié le 26 mai 2011 par Sebix

eg8

L'eG8. Un nom de téléphone portable pour un faux évènement. Analyse des nouvelles méthodes de communication d'un gouvernement qui ne sait pas comment faire passer la pillule du filtrage internet.

Qui a participé à l'eG8 ?

Assurément pas les véritables acteurs du net : bloggeurs, petits ecommercants, associations, sites d'infos alternatives, etc... En effet, selon le Journal du net (source), la "place" était vendue à trois petits tarifs : 100 000, 250 000 et 500 000 euros. "A partir de 250 000 euros, les sponsors bénéficient de l'affichage de leur marque sur tous les panneaux officiels de la manifestation et les patrons de ces entreprises disposent du statut de "co-chairman" de l'eG8. Etre co-chairman permet notamment de participer aux séances plénières et aux tables rondes". Donc, pour participer "au débat", il fallait donc s'affranchir de la modique somme de 250 000 euros... Assurément, un forum accessible à tous. A en croire l'eG8, internet c'est donc Facebook (qui nous rassure en nous assurant ne pas ouvrir son usine à flicage aux gosses de moins de 13 ans), Yahoo, Murdoch, Google, Amazon, Orange, eBay, Microsoft, Vivendi, Thomson Reuters, Eutelsat, Cap Gemini, Groupon ... En sommes, de "petits sites". Un peu comme si l'on organisait un forum du travail en n'y invitant que Renaud, BP et consorts....

Qui a organisé l'eG8 ?

Une "petite" agence de communication répondant au doux nom de Publicis. , la même société qui publiait un sondage commandé par le gouvernement selon lequel 67% des Français accepteraient de travailler le dimanche si leur employeur le leur proposait (source), a été "choisie" pour organiser l'évènement.

Publicis : le cheval de troie de l'UMP ?

Selon Wikipedia, en 2011, le groupe Publicis rachète Healthcare Consulting, l'agence de conseil spécialisée dans la santé  et appartenant accessoirement à François Sarkozy, frère benjamin de Nicolas Sarkozy. Il devient à l'occasion président de cette nouvelle filiale, Publicis Healthcare Consulting. Dans ce cadre, est il etonnant que la société de com' choisie par l'Elysée pour organiser l'eG8 soit Publicis ? N'y voyez aucun conflit d’intérêt...

Sarkozy ou la grande bataille de l'"internet civilisé"

Sarkozy n'aime pas la liberté. C'est un fait. Quatre ans au pouvoir et quatre ans de lois liberticides. Aucune "nouvelle" liberté crée mais un maximum de restrictions. Il faut lutter contre le terrorisme, la délinquance, les accidents de la route, les fumeurs et les immigrés... De la communication éculée qui fonctionne à merveille : on se base sur la peur pour que le peuple accepte de voir ses libertés reculer au profit d'une soit disant sécurité. Cela fonctionne à merveille. Il suffit d'écouter le discours de ce même président sur sa volonté de réduire les morts sur les routes en y ajoutant des radars en plein ligne droite. C'est bien connu c'est la vitesse qui tue le plus sur la route. Pas la fatigue. Bien évidemment, ce dernier n'abordera jamais le nombre de morts par an directement liés à l'alcoolisme...

Appliquée  d'Hitler à Busch, le peuple suit sans sourciller. C'est la base de la communication de Sarkozy pour réguler internet. Il faut désormais lutter contre le terrorisme sur internet, lutter contre la pédo-pornographie et lutter contre le piratage, ce crime contre la culture Universal.Ainsi, Sarkozy admire l'outil qui a permis le printemps arabe. Mais il souhaite que cet outil soit "civilisé". Par civilisé, comprenez que l'on ne puisse pas critiquer ouvertement le gouvernement et ses sbires. Ce serait effectivement plus pratique de ne pas évoquer l'affaire Woerth, les magouilles Clearstream, Karachi et les terribles casseroles que Sarkozy -et l'UMP - se trainent. Pour justifier cet internet civilisé, Sarkozy

Le président du groupe français la Quadrature du Net écrit à cet effet : "en dépit d'une rhétorique apparemment inoffensive, le forum e-G8 est un écran de fumée pour masquer le contrôle accru des gouvernements sur Internet". Je vous invite à découvrir la vidéo du discours de Sarkozy à l'eG8 :

 

A droite, pendant ce temps, on applaudit un tel discours, comme Franck Riester (député UMP et rapporteur d'Hadopi) : « C'est un véritable discours fondateur qu'a prononcé ce matin le Président de la République à l'occasion de l'ouverture du premier G8 de l'Internet. Un discours engagé et visionnaire pour cette grande première mondiale ». Visionnaire ? En quoi est ce visionnaire de vouloir copier la Chine ? Fondateur ? Assurément. Fondateur de la vision de la droite francaise envers cet espace de liberté qu'est encore le web. Mais Riester va plus loin : « pour la première fois, un responsable politique du plus haut niveau démontre qu'il a parfaitement saisi les enjeux d'une révolution numérique qui bouleverse profondément nos sociétés (...) Oui, Internet est bien cette nouvelle frontière, ce nouveau continent de libertés et de libre expression, cette terre d'entrepreneurs au potentiel de croissance exponentielle pour nos économies. Faire prospérer ce formidable potentiel constitue une priorité pour le Président de la République. » Au final, Riester, se réjouit « de cet attachement renouvelé du Chef de l'État en faveur d'un Internet responsable qui constitue une conviction que je partage pleinement et que je continuerai à promouvoir. En instituant ce nouveau rendez-vous mondial, le Président de la République initie un dialogue nécessaire entre les Chefs d'État et les acteurs de l'Internet et pose les bases d'une coopération internationale indispensable pour relever les défis de ce monde virtuel global ». (source).

Une carte de l'internet européen

C'est dans ce cadre qu'OWNI fournit une carte de l'état de l'internet européen en matière de propriété intellectuelle, filtrage et accès au web... Assez édifiant !

Vers une déclaration des droits et principes d’Internet?

C'est dans ce cadre que 36 ONG ont rédigé en plusieurs langues une déclaration des "droits et principes" d'internet que voici :

Ce document définit dix droits et principes clé devant constituer le socle de la gouvernance d’Internet. Ils ont été établis par la Coalition Dynamique Droits et Principes d’Internet (IRP), un réseau ouvert de personnes et d’organisations ayant pour objectif le respect des droits de l’homme dans l’environnement Internet. Ces principes sont enracinés dans les standards internationaux des droits de l’homme, et sont dérivés de la Charte des Droits de l’Homme et Principes pour Internet développée par la Coalition.

Internet offre des possibilités sans précédent pour la réalisation des droits de l’homme, et joue un rôle de plus en plus important dans notre vie quotidienne. Il est par conséquent essentiel que tous les acteurs, tant publics que privés, respectent et protègent les droits de l’homme sur Internet. Des actions doivent aussi être entreprises pour assurer qu’Internet fonctionne et évolue de manière à réaliser les droits de l’homme dans la mesure la plus large possible.
Pour aider à concrétiser cette vision d’un environnement Internet fondé sur les droits, les 10 Droits et Principes sont :

1/ Universalité et Égalité

Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits, ce qui doit être respecté, protégé et réalisé dans l’environnement en ligne.

2/ Droits et Justice sociale

Internet est un espace pour la promotion, la protection et la réalisation des droits de l’homme et pour le progrès de la justice sociale. Chacun a le devoir de respecter les droits d’autrui dans l’environnement en ligne.

3/ Accessibilité

Chacun a un droit égal à accéder et utiliser un Internet ouvert et sécurisé

4/ Expression et Association

Chacun a le droit de chercher, recevoir et répandre librement l’information sur Internet sans censure ni autre interférence. Chacun a aussi le droit de s’associer librement à travers et sur Internet, pour des objectifs sociaux, politiques, culturels et autres.

5/ Vie privée et protection des données

Chacun a le droit au respect de sa vie privée en ligne. Cela inclut le droit de ne pas faire l’objet de surveillance, le droit à l’usage de la cryptographie, et le droit à l’anonymat en ligne. Chacun a aussi le droit à la protection de ses données personnelles, ce qui inclut le contrôle de leur collecte, leur conservation, leur traitement, leur usage et leur publication.

6/ Vie, Liberté et Sécurité

Les droits à la vie, la liberté et la sécurité doivent être respectés, protégés et réalisés en ligne. Ces droits ne doivent pas être enfreints, ni utilisés pour enfreindre d’autres droits, dans l’environnement en ligne.

7/ Diversité

La diversité culturelle et linguistique sur Internet doit être promue, et l’innovation technique et politique doit être encouragée pour faciliter la pluralité de l’expression.

8/ Accès non discriminatoire

Chacun a le droit à l’accès universel et ouvert aux contenus sur Internet, sans priorisation discriminatoire, filtrage ni contrôle du trafic sur des bases commerciales, politiques ou autres.

9/ Standards et Régulation

L’architecture, les systèmes de communication, les formats de documents et de données d’Internet doivent être fondés sur des standards ouverts assurant une interopérabilité totale, ainsi que l’inclusion et l’égalité des chances pour tous.

10/ Gouvernance

Les droits de l’homme et la justice sociale doivent constituer les fondements légaux et normatifs du fonctionnement et de la gouvernance d’Internet. Ces processus doivent être conduits de manière transparente et multilatérale, sur la base des principes d’ouverture, de participation inclusive et d’imputabilité.

Une conclusion pessimiste

Un tel évènement abordé d'une telle manière est assurément peu rassurant. Entre justification du filtrage DPI et débacle d'Hadopi, l'UMP ne sait plus quoi faire pour faire passer la pillule de la censure.



Retour à La Une de Logo Paperblog