AIMER JUSQU'A LA PRUNELLE DE SES YEUX...
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Une aveugle souffrait, tout en se détestant,
Ne pouvant supporter son handicap tenace,
Elle haïssait les gens, proférait des menaces,
Et passait ses journées à jurer en pestant!
Un garçon, son ami, seul pouvait l’approcher,
Il était toujours là, usant de prévenances.
Un jour, elle exprima, pour lui ses espérances:
Si jamais je voyais, je pourrais t’épouser.
Son souhait fut exaucé, un donneur anonyme,
Lui fit don de ses yeux, elle fut opérée.
Et l’heure enfin sonna, si longtemps espérée:
Voir le jour et enfin changer de patronyme!...
Son ami était-là, on ôta les bandages,
Elle pouvait tout voir , elle le découvrit,
Ce fut inattendu, son aspect la surprit:
Il était non-voyant… il attendait son gage!
Maintenant que tu vois, voudras-tu m’épouser?
Ses paupières fermées, la glaça d’épouvante,
La vie à ses côtés lui parut éprouvante,
Il n’en avait rien dit, comme pour la blouser.
C’était là un projet, au-dessus de ses forces,
Aussi sans hésiter et sans le moindre égard,
Elle le rejeta, il repartit hagard,
Pleurant, désespéré, c’était comme un divorce.
Plus tard, il écrivit, ceci sans amertume,
Prends bien soin de tes yeux, savoure ton bonheur,
C’étaient les miens, vois-tu, je l’ai fait de bon cœur,
Moi aussi, il faudra, que je m’en accoutume.
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St Just ( Joël Gauthier ) le 21.4.2010