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Pauvre Tapie. ANNEXE

Publié le 02 juin 2011 par Malesherbes

Nouvel Observateur du 7 au 13 avril 2001

Le recours à l’arbitrage était illégal

Thomas Clay est doyen de la faculté de droit de Versailles et titulaire de la chaire d’arbitrage.

N.O. - A quoi sert un tribunal arbitral ?

T.C. - C’est une juridiction à part entière qui rend des décisions de justice exécutables dans le monde entier. La justice arbitrale fonctionne particulièrement bien, essentiellement dans les litiges commerciaux, souvent internationaux. C’est un système qui permet aux parties en conflit de choisir ceux qui vont les juger et d’attendre d’eux de la compétence, de l’attention, du temps et de l’indépendance.

N.O. - Justement, comment s’apprécie l’indépendance des arbitres ?

T.C. - Au début de toute instance arbitrale, un arbitre doit révéler les liens qu’il a avec les parties, ce qui montre son indépendance. Dans l’arbitrage Tapie, il semblerait, d’après les informations de la Cour des comptes et d’autres parutions récentes, que l’un des arbitres a fait des déclarations lacunaires.

N.O. - Cette procédure était-elle adaptée à l’affaire Tapie ?

T.C. - Cette affaire n’aurait jamais dû aller à l’arbitrage et lui cause d’ailleurs beaucoup de tort. Elle est extravagante pour au moins trois raisons : d’abord, parce que le choix d’y recourir s’est fait en cours de procédure judiciaire, déjà bien avancée, et après une décision défavorable à Tapie rendue par la plus haute juridiction de l’État, la Cour de cassation. Ensuite, parce que c’est un dossier dans lequel le contribuable est intéressé, et cela est peu compatible avec la confidentialité de l’arbitrage. Enfin, parce qu’on ne peut occulter la forte dimension politique de l’affaire, qui semble avoir été pilotée depuis le plus haut sommet de l’État.

N.O. - Y a-t-il aujourd’hui moyen de revenir sur le jugement de ce tribunal ?

T.C. - On sait depuis le début que le recours à l’arbitrage était illégal. On voit maintenant que le gouvernement le savait dès le début de l’arbitrage et à la fin, lorsqu’il a refusé d’attaquer la décision le condamnant, alors qu’il avait sans doute là le moyen de la faire annuler. Que faire aujourd’hui ? Il reste un recours, qui pourrait être actionné si suffisamment d’éléments étaient réunis pour prouver qu’il s’agit d’un arbitrage frauduleux, et les dernières révélations semblent l’attester. Mais seul l’État est recevable à agir. C’est donc désormais un problème politique.


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