La bergère Lobel
La bergère Lobel était belle. Elle était même très belle.
Quand on lui disait qu’elle était belle, elle répondait, sarcastique : « Et si j’étais laide ? »
Lobel était une gazelle du Sahel. Elle n’était ni douce, ni tendre.
Le bonheur et le malheur des autres ne touchaient point cette princesse sombre, dont le seul regard transformait en fumée les flammes portées par de probables bergers.
Seule sa mère lui résistait et lui assénait : aane wadi jainngol é reedu ( tu es un feu vif dans le ventre ), et ce, malgré la révélation des lanceurs de cauris* qui affirmèrent que Lobel avait une jumelle invisible, sorte de génie du mal qui la hantait.
Si le "coeur sec" de Lobel restait insensible à la joie ou la peine des autres, les mots de sa mère lui faisaient souffrir.
Parfois il lui arrivait de pleurer, mais personne n’en connaissait la raison.
Peut-être que ses vaches savaient.
A toi "chère" princesse Lobel.
Safi
*Lanceurs de cauris : des voyants à travers les cauris.