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Une récession pas comme les autres

Publié le 07 juin 2011 par Copeau @Contrepoints

Par David Descôteaux, de Montréal, Québec

À lire les mauvaises nouvelles qui s’accumulent, en provenance des États-Unis et d’Europe, avez-vous l’impression que nous sommes en reprise économique? Ou que le ciel s’apprête à nous tomber sur la tête ?

Le prix des maisons chute à des bas historiques, les chômeurs se multiplient, des gouvernements se retrouvent au bord de la faillite…

Et après ça, on nous répète que la récession est finie. Que la reprise est « enclenchée ».

Une récession pas comme les autres
Vous avez le choix. Soit vous prenez la pilule bleue, et vous vous réveillez demain avec l’assurance que nous vivons une récession comme les autres. Encore un peu de dépenses des gouvernements, de « stimulus », et tout va rentrer dans l’ordre. Les citoyens vont recommencer à consommer et à s’endetter, et la roue va continuer de tourner.

Ou vous prenez la pilule rouge. Et je vous parle du livre Endgame de l’auteur et financier John Mauldin. Mais je vous avertis : la réalité qu’il décrit – et il est loin d’être seul à en parler – n’est pas jojo.

La facture arrive

Nous ne vivons pas une récession comme les autres. Mauldin et son coauteur Jonathan Tepper affirment que les pays développés se trouvent au bout d’un « supercycle de dette ». Depuis 60 ans — et particulièrement ces 20 dernières années — un nombre important de consommateurs, de banques et de gouvernements partout dans le monde développé, se sont endettés comme si demain n’existait pas.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La dette des pays du G7 a triplé depuis 1974. Au sommet de la crise, un ménage américain trainait une dette équivalente à près d’une fois et demi son revenu annuel. Près du double d’il y a 25 ans! Nous avons suivi la même tendance au Canada, où les citoyens battent des records d’endettement personnel.

Aujourd’hui, la facture arrive. Ou plutôt, elle est arrivée aux alentours de 2008.

Le hic, c’est qu’une crise d’endettement comme celle-ci peut seulement se résoudre en payant une bonne partie de cette dette. Et quand on paye des dettes, on dépense moins. Et l’économie ralentit. Des dizaines de millions de personnes qui remboursent leurs cartes et leurs marges de crédit, ou qui voient la valeur de leur maison chuter du tiers ou de moitié, c’est autant de millions de personnes de moins dans les restaurants, les centres commerciaux ou chez le concessionnaire. Avec le niveau d’endettement actuel, ce processus pourrait durer des années, et sera par moment douloureux.

Qui va sauver les gouvernements ?

Les gouvernements tentent d’éviter ce ralentissement économique en creusant d’énormes déficits et en s’endettant. Mais ça ne règle pas le problème. Les dettes ne disparaissent pas, elles ne font que changer de mains. Depuis trois ans, l’endettement des ménages américains a diminué quelque peu, mais il en reste beaucoup à faire. D’autres dettes – notamment celles de plusieurs banques dans le monde – ont été cachées, ou transférées sur le dos des gouvernements et des contribuables. Or ces gouvernements atteignent aussi leur limite d’endettement. Ils devront à leur tour se serrer la ceinture et réduire leurs dépenses. Ce qui se passe en Grèce nous offre un aperçu. D’autres pays suivront le même chemin.

Vous croyez que le Canada, avec son « plus meilleur système bancaire du monde », est à l’abri ? Avec l’endettement record des citoyens et la bulle immobilière qui ne cesse de gonfler ? J’ai plutôt l’impression que nous sommes en retard de quelques années sur le scénario que vivent bien des pays en ce moment.

Nous tous – consommateurs, banques, gouvernements – avons agi comme des adolescents depuis des années, écrit Mauldin. Devant des choix difficiles, nous avons constamment choisi celui qui allait nous procurer du plaisir instantané, et qui reporterait la douleur à plus tard.

Mais on ne peut étirer l’élastique indéfiniment.

Nous passerons à travers cette crise. Comme à travers toutes les autres. Mais la route va être tortueuse. La croissance économique risque d’être plus faible, les récessions plus fréquentes, et inévitables.

C’est ce qui arrive quand on reporte constamment à plus tard les décisions difficiles.


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