l’hypothèse centriste, une hérésie ?

Comme je ne vois pas mes collègues blogueurs se préoccuper du sujet, je me pose la question d‘autant plus intensément : qu’est-ce qui explique que la plupart des commentateurs politiques ne voient pas poindre à l’horizon un possible rassemblement des centres ? Que celui-ci pèse si peu dans leurs analyses, aussi brillantes soient-elles ?

 Je ne peux pas employer le terme de danger, puisque d’essence socio-démocrate, le centre français ne saurait se comparer – faut pas pousser – à cette droite dure qui gouverne la France depuis 4 ans, et que je combats. En outre, je doute qu’elle soit si différente que cela de cette gauche du centre, qu’incarnent selon moi la plupart des candidats aux primaires socialistes. Montebourg tente bien de se placer (un peu plus) à gauche, mais n’est-ce pas un positionnement artificiel, lui qui a soutenu Royal en 2007 ? je ne fais là que répercuter la question de militants socialistes de mon entourage…

 Aussi, la déclaration d’Hulot selon laquelle il aurait pu avoir des points de convergence avec Borloo (ou l’inverse) ne m’étonne aucunement. Et je ne considère pas, contrairement à Melclalex, que ce soit une erreur, mais un positionnement cohérent : Hulot est de centre droit quoi qu’il en dise , comme Borloo, Villepin et toute la clique de ces indécis politiques qui n’ont aucun intérêt à être de gauche vraiment, et je ne vois pas où est le problème de le faire savoir ouvertement… sinon à considérer qu’il a trahi son camp ¹.

 Mais quel est-il, au fait ? je n’ai pas vu dans ses actions qu’il se soit particulièrement distingué par une conduite vertueuse, comme je l’évoquais plus en détail dans cet article dédié, en matière de conduite économique, où il ,  dès qu’il a pu,  adopté des pratiques caractéristiques de ce capitalisme que je combats. De plus, il n’a été que bien tardivement anti-nucléaire, comparativement à des militants écolos quelque peu plus crédibles, comme Stéphane Lhomme. mais peut-être le sera-t-il davantage maintenant qu’il voit l’opinion tourner ?

 Cependant, il maîtrise un savoir-faire médiatique certain, et  si l’ensemble des démocrates sociaux de centre droit et gauche se regroupaient, voilà qui risquerait bien de faire de l’ombre au candidat du PS, quel qu’il soit. Ils constitueraient en effet une somme statistique non négligeable. Et si Sarkozy attaque si fort face à ce que lui considère comme un danger, ce centre que Borloo tente de développer et unir, ce n’est pas un hasard : c’est un habile tacticien, on peut au moins lui laisser ça…

 L’hypothèse peut paraître utopique, et dénuée d’intérêt aux purs et durs qui se fient aux seules analyses politiques actuellement disponibles sur le marché, mais je pense que le commun des mortels résistera toujours aux ruptures politiques proposées par les partis de transformation sociale, mouvement qui est le mien, mais dont je suis capable de me distancier. Les gens pourraient donc trouver un confort personnel dans ce genre de choix qui leur apparaîtra probablement plus modéré… et donc rassurant, car formaté par un certain discours médiatique dominant duquel ils sont familiers. Une masse non négligeable du peuple pourrait ainsi se laisser abuser par l’aura faussement bonhomme de gens comme Hulot et Borloo qui, malgré leurs erreurs du passé, pourraient tout simplement, aux yeux des gens non politisés, représenter une certaine forme de différence, qu’ils souhaitent probablement, mais qui constituerait toutefois à leurs yeux  un changement soft qui aurait pour avantage de ne pas trop les bousculer.

 Le peuple est probablement bien las des dinosaures de tous bords, et les nouvelles têtes en politique, pas (ou plus…) marqués par les deux partis dominants, pourraient bien bénéficier de ce critère de choix qui vaut ce qu’il vaut… Il peut apparaître léger, et les blogueurs politiques s’en moquer, ce n’en est pas moins ainsi que votent de nombreuses personnes qui ne sont pas toutes aussi politisées que nous autres : à la tête du client.

Aussi, malgré leurs passés, qui plaident bien peu en leur faveur en termes de rupture avec la pensée politique dominante,  ainsi que certains des éléments de leur trajectoire bien peu reluisants, il se pourrait bien que la population passe au-delà pour leur donner un avantage décisif, qui constituerait une surprise là où d’autres attendent celles du front national…

Pourtant, dirait le sage, ce qui arrive n’est jamais ce que l’on redoute, ni ce que l’on espère…

¹ Il y en eut bien d‘autres, de Boekel à Kouchner en passant par l’inusable Besson, ancien proche de Royal, qui l’a reniée ensuite, percevant le sarkozysme comme  certainement plus profitable…