Ce blog et son auteur ont déménagé à Tel Aviv!
Brouhaha matinal, thé vert sur le balcon, rugissements d'autobus et soupirs de camions. Le taxi en triple-file coince un vieux tacot garé sur le trottoir depuis la veille, les échos de Galei Tsahal - la radio militaire - se mêlent aux cris de son conducteur pressé. Feu vert. Les files de voitures s'ébrouent, les pneus crissent, klaxons nerveux et sonnettes des vélos.
Il fait chaud à Tel Aviv, et humide. Les jupes souvent très courtes des femmes laissent déjà admirer un hâle léger. Sur la promenade des plages, les garçons déambulent au soleil torse nu. Si prêts et pourtant déjà bien loin de Jérusalem, son savant mélange de tension et de quiétude austère. Dans des épiceries à l'odeur de carton et d'air conditionné, les enfants en maillots choisissent des bâtons glacés aux couleurs chimiques, tandis que sur les terrasses toujours pleines on goûte enfin l'insouciance de ce début d'été.
Aux tables du Dizi, sur la place Dizengoff, où les clients dévorent des magazines branchés pendant que tournent leurs machines à laver...
Limonade glacées et crème solaire, sur la place Dizengoff trône une fontaine hideuse aux couleurs arc-en-ciel, où s'aspergent les enfants et se photographient des touristes. De retour avec ma lessive de mon nouveau café-laverie préféré, jazz manouche sur l'avenue Ben Gourion, et échos des sauveteurs sur la plage, qui interpellent par haut-parleur les nageurs imprudents. Les surfeurs s'ébrouent, frottent leurs sandales du sable qui partout s'est glissé, exhibent d'un air nonchalant leur bronzage impeccable - avant de se lancer à vélo dans la ville, leur planche sous le bras. Au croisement, sur la terrasse de béton d'un immeuble un peu décrépi, deux vieux israéliens se dandinent en rythme, à peine dissimulés par les grappes fleuries d'un bougainvillier.
C'est la bulle, elle existe... Je savoure mon Tel Aviv inconnu, les ruelles d'une ville encore mystérieuse de ne pas s'y être perdue. J'explore les avenues d'immeubles Bauhaus, les impasses pavées un peu sales, les petites maisons et leurs verts jardins du Kerem HaTeimanim sous l'allée centrale du Shouk HaCarmel, le grand marché de Tel Aviv. Il n'y a pas de soldats armés aux entrées - on s'y presse, on s'y pousse, entre odeurs de za'atar frais, melons murs et pastèques tranchées. Dans le frigidaire négocié dans les arrières-cours de Yafo, on entasse le houmous, les petits concombres tout fins par manque d'eau, les tomates de toutes formes, les olives marinées au citron...
Devant le supermarché du quartier, des ados distribuent des prospectus contre la montée des prix du cottage. Pour 95% des familles, c'est la base du petit déjeuner et son prix a presque doublé en deux ans. Les consommateurs israéliens se sont mis au boycott, ils demandent la réintroduction de la régulation pour les biens de premier usage. La caissière dispute une ménagère qui achète, tente de la convaincre d'abandonner pour finir par lui faire acheter un autre fromage allégé. "C'est pour vous, les jeunes et les soldats, qu'on fait ça!" - nous lance-t-elle, croisant nos regards intrigués.
Sur le toit d'Elea, barbecue de shabbat entre copains à la nuit tombée. L'odeur de la viande qui grille monte dans le soir, les conversations se font animées. Entre les affreuses tours du bord de mer et les petites constructions, la ville blanche se fait peu à peu bleue alors que sa chaleur se tait, chassée par les vent de la Méditerranée. Tout est encore à voir...