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Ha ! M’enfoncer avec délice sous les brumes de cette somptueuse fatigue qui donne goût amer à chaque heure, incite à regarder tourner, aux cadrans des horloges, les minutes et les secondes qui séparent encore de l’ultime délivrance.
Ha ! débrider une fois pour toute la contrainte des monnaies sonnantes et trébuchantes et demeurer entre deux bras de printemps, amoureux de toutes beautés.
Ha ! Ne plus rien concéder au monde et à sa course, s’offrir, royal, des journées de triomphes inactifs, rêves à profusion au panier vide d’un marché détourné.
*
Alors, paupières lourdes d’une nuit insuffisante, retourner sur ses pas.
Regarder derrière et noter qu’un rien sépare la veille de son lendemain, et qu’en cette course absurde, c’est l’âme qui prend le bouillon de minuit.
Au midi de toutes les espérances, glisser quelque billet tendre pour ne rien perdre de ce souffle, éreinté, hagard d’avoir déjà bien trop existé.
*
Car c’est de douces palpitations que se nourrit l’espoir.
Un soupçon de rêve demeure suspendu au lumignon du jour.
Ce qui demeure du lien élastique nous retient à la couette.
Chaque instant se met à peser des tonnes sur les épaules fourbues.
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Les yeux voient formes alanguies
Disponibles à l’intensité des baisers
Assoiffées de caresses subtiles
A l’ombre de futaies irisées de ciel bleu
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Les yeux voient ce que le cœur leur propose
Ils se ferment pour ne plus rien saisir d’un réel trop sombre
Ils plongent avec délice entre deux doigts étoilés
Boivent à cette source de mémoire
.
Car c’est toujours même désir et même fuite
Que mains d’aveugle cherchent dans l’obscurité
Et trouvent mieux que ce que voyant pourrait découvrir
*
Ha ! M’enfoncer en ces taillis profonds
Allongés sur la mousse d’un destin provisoire
Boire aux lèvres de l’instant
Le suc délicieux des pensées de passage
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Manosque, 24 mai 2011
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