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Interview : Jonathan Aflalo (Technion)

Publié le 29 juin 2011 par Brokenbird @JournalDuGeek

Jonathan Aflalo, ce nom ne vous dit sans doute rien. Pourtant, il s’agit sans doute de l’une des personnes les plus impressionnantes qu’il m’ait été donné de rencontrer la semaine passée. Voyez plutôt : après être passé par Polytechnique, il se retrouve débarqué en Israël, pilotant un projet visant à permettre l’amélioration de reconnaissance de formes 3D. Explications, via une interview en bonne et due forme ! Notons tout de même que si nous ne sommes pas réellement en mesure de vous offrir de quoi vous faire une idée précise de la chose, les perspectives évoquées quelques lignes plus bas devraient en faire baver plus d’un !

Jonathan AFLALO 403x540 Interview : Jonathan Aflalo (Technion)

Pourrais-tu tout d’abord te présenter, nous en dire plus sur ton parcours ? Sur les choix qui t’ont poussé à partir en Israël ?

Je m’appelle Yonathan Aflalo, j’ai grandi à Paris, et ai étudié en France, à l’Ecole Polytechnique. Arrivé à la fin de ma troisième année à l’X, je me suis interrogé sur l’avenir professionnel que j’envisageais. Ayant étudié les mathématiques financières, je me voyais partir aux Etats Unis pour finir ma formation. La fin de la scolarité à l’X passe dans un premier temps par un stage scientifique généralement effectué à l’étranger, puis par une formation de quatrième année dans une université partenaire de l’X. Je comptais donc partir finir ma formation aux Etats Unis et je cherchais un endroit pour y effectuer mon stage. J’ai entendu parler du Technion par des prof de l’X qui m’ont fortement conseillé d’y aller, en me faisant comprendre que cette faculté était d’acabit international.

J’ai donc commencé par un stage au technion dans un laboratoire de mathématiques appliquées pour faire de la recherche opérationnelle, un domaine des maths utilisé en finance. J’ai fait alors la rencontre de pas mal d’étudiants et de profs qui parlaient de high tech et de start up, ce à quoi je n’étais pas familier. En France, je n’avais pas connu cet engouement pour la création de sa propre entreprise dans le domaine des technologies, et je me suis dit que ça serait plus intéressant que de faire de la finance, avec un aspect un peu plus constructif et un apport dans le domaine des sciences (sans juger le milieu de la finance, ce qui est un tout autre débat). J’ai donc décliné mon acceptation à l’université américaine ou j’étais censé aller étudier et me suis inscrit au Technion à la dernière minute en tant qu’étudiant (car j’y étais en tant que stagiaire). Je suis satisfait de cette décision car j’ai pu apprendre beaucoup de choses dans cette institution, et je continue mon doctorat dans le domaine du traitement des formes géométriques.

Peux tu nous parler rapidement de la Technion, sur ce que tu y fait ? Sur ce qu’elle pourras t’apporter ?

Le Technion est un établissement très prestigieux en Israël et dans le monde en général. La formation de Bachelor dure 4 ans et un Master environ deux ans et demi. Le système de formation n’a rien a voir avec le système français et est beaucoup plus proche du système américain. En gros, la sélection se fait après le bac, comme aux Etats Unis, et n’est pas aussi discriminante que celle des grandes écoles françaises qui filtrent les élèves par le système des prepas et des concours. Il est beaucoup plus difficile d’intégrer une grande école comme l’X, les mines, l’ENS, ou centrale que d’être accepté en Bachelor au MIT ou au Technion, car la sélection est totalement différente et le nombre d’élèves acceptés tout les ans y est plus élevé. La prepa est d’ailleurs un point fort des grandes écoles françaises car le niveau des élèves y est très élevé et la formation est très pointue. Par contre, la différence se fait après. Les élèves ayant intégrés le Technion doivent faire leurs preuves, alors que ceux ayant intégrés une grande école les ont déjà faites. Ce qui donne un aspect très sérieux à la formation du Technion et qui fait que les élèves travaillent énormément ! De plus les notes lors de la scolarité à la Technion sont non seulement importantes pour le passage en Master ou en doctorat mais aussi pour trouver un emploi dans une entreprise, qui filtre les CV en fonctions des notes. Ceci est une source de motivation. Dans les Grandes Ecoles en France, l’état d’esprit global tend à envisager sa carrière comme dirigeant ou cadre de société. Ce qui gâche un haut potentiel de futurs scientifiques qui se reconvertissent en manager. Au Technion, les étudiants aspirent plutôt à devenir des rois de la high tech et d’inventer une technologie révolutionnaire, être un geek n’est pas une honte au Technion!

J’étudie ce qui touche de près ou de loin au traitement des formes géométriques, à la reconnaissance tridimensionnelle, au traitement d’image, et à la reconnaissance de mouvements capturés par une camera 2D ou 3D. Je fais aussi un peu de traitement d’images car ça rentre dans le cadre de ma recherche.

Passons aux choses sérieuses : parles nous de ton projet phare, permettant l’amélioration de reconnaissance de formes 3D !

J’effectue ma thèse sur les possibilités de comparer deux formes géométriques tridimensionnelles en un minimum de temps. Mon idée de travailler sur les formes 3D vient du fait que les cameras 3D commencent à s’ouvrir au grand public, avec par exemple la Kinect de Microsoft, et qu’il existe déjà des téléphones portables avec une camera 3D intégrée. Je pense que d’ici une dizaine d’années, tout les smartphones seront équipés d’une camera 3D. Malheureusement, la plupart des algorithmes existants sur la 3D sont consommateurs de grosses ressources en terme de processeur et ne sont pas implementables sur des smartphones. C’est la raison pour laquelle la recherche sur ce domaine est en plein essor. On peut imaginer qu’avec les algorithmes de reconnaissance faciale 3D, on pourra payer avec son téléphone, rentrer chez soi ou retirer de l’argent en se servant de la signature 3D de son visage, ce qui d’un point de vue sécurité est bien plus performant qu’un code ou qu’une carte que quelqu’un peut copier.

Une autre source de motivation est le fait que ma recherche peut avoir des impacts dans le monde de l’imagerie médicale, et contribuer avec des maths à l’évolution de la médecine, c’est quelque chose de satisfaisant intellectuellement!

A terme, à quels logiciels pourrait-être intégrée cette technologie ? Quand sera t-elle exploitable par le grand public ?

A terme, les technologies que l’on développe pourraient être intégrées dans le milieu médicale comme c’est déjà le cas, ou dans celui de la sécurité, et même du jeu video. Un des étudiants du laboratoire effectue la recherche de son Master sur la possibilité de développer une camera 3D sur l’iPhone, qui ferait de l’iPhone un scanner 3D, et même une Kinect portable ! Il m’est arrivé aussi de me rendre a l’hôpital pour discuter avec des médecins qui ont des besoins spécifiques pour analyser des données telles que des scanners 3D, des IRM, des radios, afin de procurer une aide au diagnostique. Ces technologies évoluent en permanence, c’est ce qui rend ce domaine aussi excitant.


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