Poule des villes ou Poule des champs!

Par Dysprapoule
Cette année, les vacances de la famille Poule se devaient d’être modestes… très modeste. Papa Poule avait vécu la grève, le lock-out et tous les inconvénients qui viennent avec. La famille décida donc de passer une semaine au lac des Commissaires, dans le bois de Papi et Mamie Poule. Pour y arriver, la route était longue et sinueuse. C’est qu’ils étaient loin, Papi et Mamie, ils n’étaient pas à une autoroute près! Tellement loin, que peu importe le temps de l’année, ils étaient toujours en plein festival de la mouche noire! Par chance, les huards et les frédérics étaient toujours au rendez-vous eux aussi et compensaient pour les piqûres!
Un bon matin, Mamie et Papi Poule eurent la bonne idée d’emmener leur petite famille pique-niquer sur une belle plage perdue de leur lac. Une plage paradisiaque où personne n’y vit. Un endroit unique où il n’y a que les animaux qui peuvent s’y rendre par la terre ferme! Le lendemain midi, toute la famille irait en bateau à la découverte de cet univers encore inconnu.
La veille de cette journée de rêve, Maman Poule n’arrivait pas à s’endormir. Où pourrait-elle faire pipi si elle ou les enfants avaient envie? Comment pourrait-elle manger les mains bien propres sur cette plage sans service? Est-ce que ses enfants risquaient d’avaler l’eau plutôt brunâtre du lac? Le produit à bibittes serait-il assez efficace contre ces insectes qui piquent et qui croquent? Y avait-il des ours ou des loups dans ce coin perdu? Maman Poule essayait tant bien que mal de se dire que ses enfants seraient heureux de leur expérience. Un peu de cette nature sur leurs petits corps ne risquait que de leur donner des anticorps, essayait-elle de se convaincre. Maman Poule de ville était dans tous ces états…
Papi et Mamie Poule étaient pour leur part des poules des champs, ils habitaient dans le nord de notre province où les arbres sont leurs gratte-ciels et où la piscine est un grand lac à truites! La mouche noire et le brûlot étaient leurs proches voisins! Pour bien-dire, ils cohabitaient!
Après le long trajet en bateau sur une eau toute sauf calme, Maman Poule constata que la plage était ensevelie. Cette année là, l’eau était haute partout, même où on ne pourrait croire qu’une famille se risque à un pique-nique! Il restait quand même un petit bout de terre qui flottait tranquillement sur l’eau. Ils stationnèrent donc les bateaux pour profiter au maximum de ce coin de paradis!
Dès que Maman Poule mis le pied dans la vase sablonneuse de la plage, elle y vu toutes ces inquiétudes de la veille resurgir. Par contre, ses enfants étaient tellement heureux et souriants… Ils commencèrent à patauger dans le lac le cœur à la fête. Ils laissaient s’échapper des gloussements de bonheur qui virevoltaient au vent. Maman Poule aurait tellement aimé partager les mêmes émotions que ses petits, mais le sable qu’elle sentait pris dans ses crocs la ramenait vite à la réalité. Au lieu de les envier, elle avait envie! Même après y être allée 3 fois avant de partir (pour être certaine), elle avait envie.
Au fur et à mesure que Maman Poule voyait ses enfants s’éloigner dans l’eau, elle perdait son contrôle. Paniquée, elle leur criait. « Restez proche » « N’avalez pas d’eau, elle est sale. » Papi et Mamie trouvaient Maman Poule vraiment poule de luxe! Quelle petite nature ces gens de la ville. Pourtant le trafic, le bruit et la pollution, n’était-ce pas pire que deux piqûres de mouches et un sandwich aux quelques grains de sable?!
Ce n’était malheureusement pas l’opinion de Maman Poule qui disait à tout vent que les mouches avaient trouvé en elle un buffet « all you can eat ». La patience s’effritait à vue d’oeil. La faim et l’envie de pipi dominaient. Papa Poule, lui, était à l’aise avec son statut temporaire des champs. Même s’il se tapait vigoureusement les bras et les mollets, son sourire ne quittait jamais son visage. Maman Poule se parlait toute seule. Elle essayait de se convaincre tant bien que mal que ce plein de nature si pure ne pouvait qu’être bon.
Le pique-nique sembla durer une éternité, ou peut-être deux. Papi et Mamie décidèrent d’aller pêcher avec Fiston. Les autres (dont Maman Poule) prirent le chemin de la toilette. Rendue à la maison, Maman Poule se dit « C’est si beau la nature vue de la fenêtre! » Elle put alors y apprécier toutes les beautés : )